Quali, quanti et maintenant Big Data… Le nombre d’études et d’enquêtes ne cesse d’augmenter. Mais le plus est souvent l’ennemi du bien.
N’en jetez plus, la coupe est pleine. Chaque jour, la liste s’allonge encore et toujours. Les entreprises et les journalistes ont toujours été friands d’études. Les sociétés les utilisent pour préparer le lancement d’un produit, vérifier l’impact d’une publicité ou comparer leurs références avec celles de la concurrence. Les rédacteurs s’en servent pour alimenter leurs articles de données chiffrées et d’exemples précis. Les cabinets de conseil, les instituts de sondage et les universités ont toujours été d’excellentes sources d’information. Mais depuis quelques années, de plus en plus d’experts autoproclamés et de compagnies plus ou moins connues publient des études.
Quali ou quanti
La bataille entre les partisans du « quali » et les inconditionnels du « quanti » ne date pas d’hier. L’enquête qualitative se base sur des entretiens individuels et des réunions de groupe et cherche à évaluer et comprendre les besoins, les comportements et les attitudes de consommation de personnes triées sur le volet et appartenant au target group visé par le client. Les études quantitatives analysent les comportements, les attentes et les opinions d’un échantillon important de la population. Réalisés le plus souvent sous forme d’un questionnaire, ces sondages impliquent généralement plusieurs centaines voire même quelques milliers de consommateurs. Les résultats chiffrés tirés de cette enquête d’opinion sont ensuite extrapolés à l’ensemble de la population étudiée. Avec l’arrivée du Big Data, le « quanti » est entré dans une nouvelle ère.
Big Data, petits enseignements
Les ordinateurs surpuissants et leurs algorithmes permettent de traiter les données de plusieurs dizaines de milliers de personnes en quelques heures voire même en quelques minutes et pour un coût relativement modeste. Des enquêtes européennes et mondiales commencent ainsi à être publiées sur tous les sujets possibles et imaginables par des plateformes. Récemment, le fournisseur de solutions de relation client HubSpot a constaté la manière dont notre travail pouvait empiéter sur notre vie privée en recueillant les datas de 7000 personnes dans vingt pays. Mais que sont des chiffres, aussi élevés soient-ils, sans analyse ? Quel est l’intérêt de dévoiler des statistiques si aucun spécialiste n’est capable de les rendre intelligibles ?
Révéler des données comme on lancerait un morceau de viande
Révéler des données comme on lancerait un morceau de viande à un fauve affamé peut rassasier la personne pressée par le temps et/ou le manque de moyen mais cette pratique fait-elle avancer pour autant la recherche ou la compréhension d’une tendance ? Récemment, l’auteur d’une étude envoyée à INfluencia s’est montré incapable de fournir la moindre explication sur les données qu’il avait lui-même rassemblées. Ce cas n’est, hélas, pas unique en son genre. La communauté scientifique, elle-même, commence, elle aussi, à constater le même phénomène.
Ecoutons Henry Ford
Une enquête réalisée par des chercheurs en Finlande et en Californie et intitulée Attention Decay In Science a examiné toutes les publications écrites en anglais jusqu’à fin 2010 dans la base de données de Thomson Reuters (NDLR, TR) Web of Science. Ces scientifiques ont constaté que le nombre d’articles augmentait d’année en année. « La croissance exponentielle du nombre de publications, qui accélère inévitablement le turnover des articles » provoquerait, selon cette étude, un chute de l’attention des chercheurs. Le nombre maximum de citations pour un article est ainsi atteint de plus en plus rapidement ce qui tendrait à prouver que « les universitaires “oublient” plus facilement de nos jours que par le passé » ces publications, assure ce rapport.
Ce trop plein d’informations peut être préjudiciable
Le bien-fondé des enquêtes en elles-mêmes est périodiquement remis en question par de nombreux experts. Les études sont généralement un moyen de conforter un concept ou une idée que l’on a déjà approuvé. Les questions sont le plus souvent orientées pour ne pas dire biaisées. Il est rare qu’une idée géniale sorte de tels travaux. Henry Ford l’avait lui-même résumé de la plus belle des manière : « Si j’avais demandé aux gens ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu des chevaux plus rapides ».