13 janvier 2016

Temps de lecture : 6 min

C’est quoi le goût d’une marque ?

Le goût est un des premiers critères de préférence et d’achat pour les consommateurs. De la tomate au Nutella, le palais des français s’est développé pour accueillir de nouvelles saveurs créées par les marques. Comment le goût est-il devenu un atout de marque pour nous séduire et re-séduire ?

Le goût est un des premiers critères de préférence et d’achat pour les consommateurs. De la tomate au Nutella, le palais des français s’est développé pour accueillir de nouvelles saveurs créées par les marques. Comment le goût est-il devenu un atout de marque pour nous séduire et re-séduire ?

Le goût est l’un des cinq sens, renseignant sur les saveurs et la composition des aliments. Le chef Thierry Marx nous explique : « sous l’effet de la mastication, les molécules aromatiques d’un mets se libèrent et peuvent alors se fixer sur nos récepteurs sensitifs… » Ainsi nous percevons l’acide, le salé, l’amer, le sucré, le chaud, le froid, le craquant, le mou… de l’aliment ingéré.

Mais au-delà de la saveur, on parle du goût comme d’une impression polysensorielle. Quel enfant n’a pas un jour repoussé le plat que lui a préparé sa mère, rien qu’en voyant sa couleur et sentant son odeur ? Le goût est donc étroitement lié aux caractéristiques perçues par les autres sens. La saveur, la texture, l’aspect, l’odeur… sont autant de paramètres qui participent au jugement d’un aliment. C’est sur ce fait précis qu’a capitalisé cette nouvelle marque d’éclairs, baptisée humblement « L’éclair de génie », qui fait fureur dans notre capitale. Un goût succulent mais surtout des produits design, valorisant d’autant plus le goût. On a envie de tous les manger !

Nous avons tous dès la naissance un penchant pour le sucré. Ce goût reste l’une de nos principales sources de plaisir et de réconfort tout au long de la vie. Un enfant pleure ? Hop un bonbon et ses larmes cessent de couler. Un chagrin d’amour ? Un énorme pot de glace et tout est oublié ! Le sucré qui fait l’unanimité est un cas à part car en réalité le goût est très personnel et les différences de perception gustatives entre deux personnes sont importantes, surtout en ce qui concerne l’amertume. Certains adorent le goût du café, celui de l’endive et du pamplemousse, d’autres ne pourront les supporter. Chacun ses goûts !

Le goût se développe dès le plus jeune âge

Des études ont montré que notre alimentation à l’âge adulte est largement influencée par ce que nous mangeons quotidiennement avant l’âge de trois ans. Un enfant qui a l’habitude de trouver des épinards dans son assiette continuera à en manger régulièrement une fois adulte. Pourtant nous commençons tous notre vie avec une palette de saveurs très restreinte et c’est en testant divers goûts que les préférences se développent. C’est pourquoi il est primordial d’éduquer très tôt à un large choix de saveurs. D’autant plus qu’avec environ 10 000 papilles, soit deux fois plus qu’un adulte, les tout petits sont ultra-réceptifs à ce qu’ils mangent.

Mieux, les préférences alimentaires se développent dès la vie intra-utérine. A cinq mois, le fœtus démarre l’éducation de ses papilles. Il découvre différentes saveurs grâce à l’alimentation de sa maman, qui influence le goût du liquide amniotique et ensuite celui du lait maternel. Ce n’est qu’à partir de ses six mois que le nouveau-né va pouvoir découvrir le vrai goût des aliments grâce à l’étape de la diversification alimentaire, étape clé dans la vie d’un bébé. Il a enfin le droit de manger autre chose que du lait et quel plaisir pour lui ! Il découvre un par un de nouveaux aliments, goûts, textures… commençant par ceux qui sont le mieux tolérés par son estomac.

Goût & identité

L’apprentissage du goût est une étape primordiale car à l’âge adulte, nos goûts alimentaires en disent long sur qui nous sommes. En effet, le goût est d’abord preuve de connaissance. Une personne qui saura reconnaître un bon vin d’un mauvais sera alors valorisée : elle a bon goût. La connaissance peut être signe de statut social. Le goût de chacun est aussi largement influencé par nos origines et notre culture. Chaque continent, chaque pays a ses propres traditions culinaires. En Inde par exemple, les enfants sont habitués très tôt au goût des épices et plus particulièrement à celui du curry (souvent présent dans le goût du lait maternel). Tout naturellement, cette épice jaune accompagnera leurs mets au quotidien. Il en est de même pour le riz en Asie, l’huile d’olive dans les pays Méditerranéens… Ainsi en analysant les menus quotidiens d’une personne, on pourrait presque deviner d’où elle vient. Le goût devient identitaire.

La palette des goûts, du plus naturel au totalement créé

La nature est extrêmement riche en goût, chaque fruit, légume, viande, épice… a son propre goût, parfois indéfinissable autrement que par son propre nom : le goût de la viande de bœuf par exemple. Dans une même typologie de produit, on peut retrouver de multitudes variétés, c’est le cas des pommes. La golden est croquante, sucrée, douce; la Granny Smith est plutôt acidulée et juteuse. Il en existe des centaines différentes avec chacune des propriétés gustatives qui lui sont propre. Et puis il y a aussi celle qui sont créées ou modifiées par l’homme, comme la Pink Lady, conçue à partir des variétés Golden Delicious et Lady Williams et reconnue aujourd’hui pour son goût ultra-sucrée.

Parce que les consommateurs sont toujours adeptes de découvrir de nouveaux goûts, l’homme en créé toujours plus chaque jour. Ces arômes font fureur et les chips Lay’s saveur poulet rôti gagnent du terrain dans nos magasins. Nous sommes conscients de la totale absence de poulet dans ce paquet de chips mais nous adorons le goût du produit. Non, pas le goût du poulet rôti mais le goût du poulet rôti de Lay’s ! Oui vous avez bien compris, le goût est devenu marque…

Voilà des marques qui font partie de nos quotidiens, que nous achetons pour leur goût à part. Aux goûts naturels, s’ajoute alors une palette infinie de goûts créés. Dans notre répertoire de fraises par exemple, à côté des Gariguette, Mara des bois, Pajaro… on retrouve tout naturellement ou presque, la Tagada. La marque devient ici un goût inimitable et irremplaçable.

Ces marques sont plébiscitées des français, parfois plus que les produits issus de la nature. Kinder est d’ailleurs aujourd’hui plus apprécié des enfants que le vrai chocolat, et d’ailleurs pour eux, le Kinder C’EST du vrai chocolat. La marque /goût devient prédominante sur le produit d’origine. C’est aussi le cas de la fameuse Pink Lady, citée plus haut. Elle a été élue pomme préférée des français. Bien plus qu’une variété de pommes, Pink Lady est avant tout une marque. Son goût n’est pas seulement sucré, il est Amour.

Le goût, source d’émotions

Quel plaisir de croquer un morceau de chocolat ou de savourer une bonne pâtisserie ! Cela provoque en nous un sentiment de bonheur. Selon une étude sur les français et le chocolat, 73 % d’entre eux affirment se sentir plus heureux après en avoir mangé un carré. On pourrait croire que c’est psychologique, mais en fait c’est chimique. Des chercheurs américains ont prouvé le goût à lui seul peut provoquer du plaisir. Ils ont étudié les changements chimiques au sein du cerveau pendant que les personnes boivent de la bière. Dès les premières gorgées, donc sans l’effet de l’alcool sur le corps, leurs cerveaux ont relâché de hauts niveaux de dopamine. La dopamine est un neurotransmetteur, molécule du plaisir.

Oui il y a donc bien un lien fort entre le goût et les émotions. Proust, mieux que personne, l’avait déjà souligné grâce à son « épisode de la madeleine ». Souvenez-vous, le personnage du roman, croque dans une madeleine. Elle provoque en lui un souvenir involontaire de dimanches matins passés à Combray chez sa tante Léonie, et surtout une impression de joie. Il avait pourtant déjà perçu à maintes reprises ces petits gâteaux moelleux mais c’est seulement en les goutant qu’il s’était replongé dans son passé : « La vue de la petite madeleine ne m’avait rien rappelé avant que je n’y eusse goûté ».

Le goût est un stimulus spécial puisqu’il est relié directement à une partie émotive du cerveau, l’amygdale. Ainsi en dégustant un aliment, les souvenirs personnels reviennent en tête… notre enfance, nos traditions, nos voyages… mais aussi une personne, une ambiance, un fou rire, un moment de tristesse…

Opération séduction

Le goût se développe dès le plus jeune âge et dure toute la vie. Il créé des préférences et surtout suscite des émotions. Les marques alimentaires l’auront compris. Plus que jamais elles veulent créer un engagement émotionnel fort et durable avec les consommateurs. Le goût est devenu un levier de séduction incontournable mais surtout un code identitaire de marque.

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