L’influence entre nouvelles contraintes et nouvelles exigences
Avec cette proposition de loi, l’influenceur change de statut et s’assimile à un publicitaire auquel tout le corpus de la réglementation peut s’appliquer. Il est par exemple soumis à la loi Evin, doit être transparent avec l’obligation d’informer, notamment pour les jeux d’argent ou les promotions, et devient pénalement et financièrement responsable des contenus qu’il publie. A ce contexte de régulation de la part des autorités, s’ajoute une demande d’authenticité de la part du public. Cette dernière n’est pas nouvelle, mais s’est incarnée de plus en plus concrètement au cours des derniers mois. Un exemple : l’émergence du mouvement du « deinfluencing » dénonçant certaines pratiques commerciales trompeuses dans des domaines variés (cosmétique, mode, mais aussi tech…).
Une disparition difficile à envisager
Les influenceurs constituent un paysage numérique dont on imagine mal la disparition, quand suivre des influenceurs et des célébrités représente l’une des motivations principales à fréquenter les réseaux sociaux. Les chiffres parlent d’eux-mêmes avec des influenceurs aux centaines de millions d’abonnés comme Ronaldo (546 millions sur Instagram), Léo Messi (429), Kylie Jenner (379) ou Selena Gomez (377). Rien qu’en France, Squeezie, Nabilla, Cyprien, TiboInShape, sont suivis par plus de cinq millions de personnes sur cette plateforme, incarnant de manière emblématique cet engagement encore bien réel. De leur côté, les plateformes continuent de développer des applications pour aider à multiplier les points de contacts avec des influenceurs.
Si la beauté, la cosmétique et la mode, sans oublier le lifestyle et l’humour, restent privilégiés par les followers, les territoires d’expression et d’expertise des influenceurs se sont largement diversifiés. La vie d’une boulangère fait le succès de Varockkk (14K abonnés TikTok), le quotidien d’un vigneron celui d’Emile Coddens (548K), et les conseils d’une prof de maths celui de Wonderwomath (366K).
Une dynamique nouvelle, source d’opportunités
Si parler de la fin des influenceurs semble exagéré, leurs profils, leurs discours et la relation qu’ils entretiennent avec le public se redéfinit sans aucun doute. Et si ce nouveau souffle était une opportunité pour les marques et les acteurs publics de repenser leur stratégie d’influence ? D’une part, la multiplicité et la variété des influenceurs permet de toucher de nouveaux publics, ce qui implique de déterminer le poids de chacun (leur nombre étant évalué à 150 000 en France), mais aussi de comprendre leur style d’influence. D’autre part, la recherche d’authenticité ouvre sur de nouvelles pratiques collaboratives, tout l’enjeu étant d’identifier quels profils sont réellement en résonnance avec la marque, son ADN, les sujets qu’elle souhaite aborder. Autre opportunité nouvelle : à travers leur activité fourmillante, les influenceurs, plus que jamais, révèlent et alimentent les tendances, transmettent des signaux faibles, permettent d’anticiper ceux qui cristallisent l’opinion et vont se diffuser.
[1] Proposition de loi n°1194, modifiée par le Sénat, visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux (assemblee-nationale.fr)