3 janvier 2022

Temps de lecture : 4 min

En 2022, le respect de la vie privée sera au cœur des décisions marketing

L'arrêt « Schrems II » rendu par la Cour de justice européenne en 2020, les navigateurs qui délaissent les cookies tiers, ou encore les travaux sur le futur règlement ePrivacy : tous ces éléments façonneront le marketing en 2022 autour d’un thème commun : la vie privée. Longtemps mise de côté, c’est maintenant un critère que les entreprises doivent intégrer dans leurs opérations. L’addition marketing et vie privée n’est pas impossible, et les entreprises ont les moyens d’obtenir les données dont elles ont besoin concernant leurs clients, tout en leur garantissant un niveau de sécurité satisfaisant.

Les nouvelles lois sur la protection de la vie privée, la fin des cookies tiers dans la plupart des navigateurs et l’omniprésence des bloqueurs de publicité rendent désormais la collecte de données tierces presque impossible ; les professionnels du marketing ne pourront bientôt plus compter sur elles.

Les données first-party occuperont le devant de la scène

Pour autant, cela ne signifie pas la fin de la publicité ciblée, puisque les entreprises ont la possibilité de se tourner vers les données first-party et d’accéder à des informations complètes et précises sur leurs clients. Grand avantage par rapport aux données tierces, les entreprises possèdent plus de contrôle sur ces données first-party, et peuvent décider des détails qu’elles veulent collecter sur leurs clients.

L’intérêt accru pour les données first-party accentuera la popularité des Customer data platforms (CDP), une technologie utilisée pour intégrer les données et les rendre exploitables. Les CDP offrent aux entreprises un excellent moyen de consolider toutes leurs sources de données first-party en profils d’utilisateurs détaillés. Elles sont également simples d’utilisation, car les personnes qui les utilisent n’ont pas à s’occuper de mises en œuvre techniques complexes, mais peuvent intégrer les données des clients par elles-mêmes.

Les walled gardens continueront à dominer le marché

Avec la disparition des cookies tiers, les annonceurs et les spécialistes du marketing se tourneront vers d’autres sources de données fiables pour le ciblage publicitaire, renforçant ainsi l’emprise des géants de la technologie tels que Facebook, Google et Amazon sur le marché publicitaire. Selon une étude, ils dominaient déjà le marché numérique en 2020, avec plus de 70 % des dépenses publicitaires totales. Leur succès réside dans leur approche « walled garden », des écosystèmes fermés dans lesquels toutes les opérations passent et ne sortent pas et au sein desquels toutes les données restent.

Ces walled gardens, alimentés par les données de milliards d’utilisateurs dans le monde, peuvent constituer une option sûre et facile d’accès pour les entreprises qui cherchent à remplacer leurs anciennes données tierces. Toutefois, cela se fait au détriment de la transparence et du contrôle, car les clients des walled gardens ne pourront pas utiliser ces données en dehors de la plateforme du fournisseur ou les adapter à leurs besoins. Par ailleurs, les géants de la tech ne donnent pas un aperçu complet de la manière dont ils évaluent les performances des annonces faites par les entreprises, et il est complexe de comparer les résultats entre leurs diverses plateformes.

La hausse du server-side tracking

Pour pallier la disparition des cookies tiers, une technologie gagne en popularité depuis 2020 : le server-side tracking (SST), introduit par Google comme une nouvelle option de suivi pour son Tag Manager. Avec cette méthode de collecte de données, votre instance analytique (ou d’autres types d’instances) se connecte directement aux serveurs qui hébergent votre site Web ou votre application, en contournant le navigateur.

Le SST permet aux propriétaires de sites Web de mieux contrôler les informations qu’ils collectent et envoient à leurs plateformes d’analyse, de marketing et de publicité. Cela dit, les trackers côté serveur sont indétectables pour les navigateurs respectueux de la vie privée et les extensions de blocage des publicités. Ils rendent également difficile pour les internautes et les autorités de protection des données de vérifier si un produit ou un propriétaire de site web collecte des données d’une manière qui respecte les droits des visiteurs. Cela signifie que les autorités de protection des données seront bientôt confrontées au défi de réglementer l’utilisation du SST. D’ici là, les entreprises devront s’assurer qu’elles informent correctement leurs utilisateurs des technologies de suivi qu’elles utilisent et qu’elles recueillent les consentements applicables.

Un avenir incertain pour les transferts de données de l’UE vers les États-Unis

En juillet 2020, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu l’arrêt Schrems II, invalidant le régime de transferts de données entre l’Union européenne et les États-Unis (Privacy shield). Près de deux ans plus tard, il n’y a pas encore d’accord successeur qui règlemente le flux de données entre les deux. Pour l’instant, la Commission européenne a adopté deux clauses contractuelles types (CCS) pour rendre possibles les transferts de données de l’UE vers les États-Unis. Les négociations sont toujours en cours, mais leurs résultats sont difficiles à prévoir.

Il est possible que les données des résidents européens doivent être conservées en Europe. Si c’est le cas, les géants de la technologie, qui effectuent ce type de transfert, devront s’y préparer.

Par ailleurs, le Royaume-Uni profite de l’incertitude de l’après-Schrems II pour définir ses propres conditions de transfert de données avec les États-Unis, alors que la Commission européenne a déjà adopté deux décisions d’adéquation qui garantissent la libre circulation des données personnelles entre l’UE et le Royaume-Uni. Cela signifie que les accords d’adéquation entre le Royaume-Uni et les États-Unis pourraient effectivement faire du Royaume-Uni le noyau des transferts de données entre l’UE et les États-Unis.

La collecte de données sera exemptée des exigences de consentement dans de nombreux pays d’Europe

Avec le règlement européen ePrivacy en cours d’élaboration, chaque pays doit mettre en œuvre ses propres directives et son interprétation des exigences RGPD. Nombre d’entre eux ont pour l’instant décidé que les données analytiques sont exemptées de l’obligation de consentement – c’est notamment le cas de la France.

Cela signifie que dans de nombreux pays en Europe, les entreprises peuvent bénéficier de règles plus souples pour la collecte de données analytiques, à condition d’utiliser des plateformes qui répondent aux exigences de confidentialité de leurs autorités de protection des données (APD) et qu’elles limitent la collecte de données conformément à leurs directives. Même si cette exemption ne s’applique qu’à certains pays, il y a de fortes chances que quelque chose de similaire soit bientôt possible dans d’autres pays couverts par le RGPD.

Les prochains mois seront intéressants pour le marketing. De nouvelles lois sur la vie privée feront du marketing et de l’analyse basés sur le consentement une norme dans de nombreuses régions du monde. Dans le même temps, les nouvelles technologies utilisées dans le développement du web rendront les sites web plus difficiles à tracer à l’aide d’outils d’analyse standards.

 

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