Naziha Mestaoui, architecte de formation, et Yacine Aït Kaci réalisateur, forment Electronic Shadow, un duo unique de créateurs évoluant, aux frontières des genres, des disciplines et des époques. Leurs créations font converger science, technologie, art et poésie pour mettre en scène des mondes rêvés… depuis la nuit des temps. Portrait.
Electronic Shadow fait partie de ces ‘’creative personalities’’ dont le genre est inclassable. Architectes, réalisateurs, metteurs en scène, experts de l’image et utilisateurs de la technologie, Electronic Shadow mélange les disciplines et crée des supports visuels, des installations qui connectent les visiteurs à des univers totalement émotionnels. Des nouveaux codes de création qui brouillent les repères spatio-temporels pour nous reconnecter à nos émotions.
Installation interactive, Ex-îles est composée d’un bassin de cinq mètres sur deux de 20 centimètres de haut, rempli d’eau lumineuse et d’une extension numérique sur internet.
« Le public s’y dématérialise pour entrer dans l’eau sous la forme d’une ombre lumineuse qui y inscrira la mémoire de sa présence. » Le corps physique devient une ombre numérique qui prend vie grâce à l’élément vital qu’est l’eau. Et laisse une trace réelle d’une spirale lumineuse virtuelle.
Vous suivez ?
Et pourtant. En créant ces univers technologiques et numériques que les critiques d’art ou que les médias appellent “mondes virtuels”, Naziha Mestaoui et Yacine Aït Kaci nous expliquent qu’ils racontent, au présent ou au futur proche, les histoires qui ont toujours plu aux spectateurs dans l’histoire de l’humanité. Le rapport de l’homme à la nature. Son envie de voler ou de flotter. Les échappées oniriques dans des mondes imaginaires.
Les créations d’Electronic Shadow sont des contes d’aujourd’hui. Ils redisent la même histoire, les mêmes récits que ceux qui ont bercé notre enfance, notre apprentissage. Et nous font même revivre ces moments, ces états de grâce que nous recherchons.
Célébrant la beauté onirique de la nature One Man One Tree, projette le visiteur dans une sorte de forêt virtuelle. Il est invité à prendre place dans un cercle lumineux. Sa présence fait tomber une graine de lumière dans le sol de l’installation, d’où poussera un nouvel arbre virtuel, unique et numéroté.
“Ce qui est nouveau, différent aujourd’hui, c’est que nous utilisons les images et les technologies pour convoquer les émotions. Qui sont les mêmes qu’hier. La peur. L’envie. L’émotion. Mais notre civilisation doit aujourd’hui passer par ces portes technologiques pour retrouver ces sensations. Nous inscrivons nos créations dans le cercle perpétuel et éternel des émotions. Nous faisons revenir les spectateurs à un point de départ. Grâce à un moment, une parenthèse. Celle qui nous permet de retrouver la réalité de nos émotions».
« Dès lors que la technologie est cachée, il se passe quelque chose de magique ». Une goutte tombe dans un bassin rempli d’eau, un impact, un mouvement, une forme naturelle et familière. L’impact de la goutte d’eau produit des ondes aussi bien naturelles que graphiques, synchronisées dans un ballet rythmé comme une horloge.
En s’approchant le visiteur perturbe le rythme de l’horloge, dérègle le temps qui s’arrête, une nymphe lumineuse vient le saluer tandis que les gouttes se muent en filets d’eau plus ou moins forts en fonction de ses mouvements.
Forts d’une intuition qu’un nouveau monde était en train de prendre forme et à une époque où les réseaux sociaux n’existaient pas, Electronic Shadow créait en fait les premiers doubles numériques. Et ne cesse de nous offrir depuis un monde rêvé de tous les possibles, en résonance de plus en plus proche avec notre réalité.
Marine Mandrila
La Société Anonyme