19 mars 2017

Temps de lecture : 3 min

Droit vs Start-up : bienvenue à l’innovation déontologique

Lorsque Uber & Lyft refusent de se plier à la nouvelle législation du Texas, cela devient une opportunité pour les start-up de réinventer le modèle économique en proposant une innovation non pas technologique, mais bien déontologique

Lorsque Uber & Lyft refusent de se plier à la nouvelle législation du Texas, cela devient une opportunité pour les start-up de réinventer le modèle économique en proposant une innovation non pas technologique, mais bien déontologique

Le Droit passe son temps à courir après l’innovation et les nouvelles économies. Un retard qui engendre de vrais problèmes de société comme on peut le voir, entre-autre avec les Taxis confrontés à de nouveaux services comme Heetch ou Uber. Mais quand les institutions et la legislation avancent au même tempo, la donne s’avère très différente… Depuis 10 mois, l’Etat du Texas impose une nouvelle législation : tous les conducteurs de VTC doivent enregistrer leurs empreintes digitales à des fins d’harmonisation avec le régime applicable des taxis. Cette mesure fait également suite à la nécessité, selon l’Etat du Texas, de connaitre l’ensemble des antécédents judiciaires des conducteurs.

Or, les deux mastodontes du service de transport, Uber et Lyft, ont décidé de cesser leur activité sur le territoire au Texas afin d’obtenir l’amendement de cette loi jugée inutile puisqu’ils exercent déjà leur propre contrôle. Cette tentative de lobbying rappelle celui qu’avait exercé Airbnb qui, sans interrompre ses services, avait lancé fin 2015 une campagne de communication agressive contre la décision de la Mairie de San Francisco de limiter la location d’un logement particulier à 75 jours par an.

Une offre concurrentielle renouvelée

De jeunes start-up ont néanmoins pris la relève, notamment RideAustin et Fasten, considérées comme les meilleures concurrentes locales. Désireuses de mettre au cœur de leur offre une valeur ajoutée personnelle, elles conservent le système de mise en relation d’un conducteur et d’un client via une plateforme numérique tout en proposant deux innovations. Un partage des données collectées par l’application avec les villes concernées, mais aussi une politique tarifaire plus avantageuse avec les conducteurs.

Or, cette nouvelle offre, plus généreuse et partageuse, n’aurait pas pu voir le jour sans l’obligation légale d’enregistrer les empreintes digitales des conducteurs. Par l’exercice d’un lobbying agressif, Uber et Lyft ont vu leur oligopole économique renversé. C’est cette nouvelle donne qui a permis une innovation non pas technologique, mais bien déontologique en terme de transparence des données et de rémunération. Alors que le tribunal correctionnel de Paris vient d’interdire à Heetch d’exercer en France, qui pensait encore que la loi amènerait les concurrents de grandes entreprises à poursuivre leur activité avec une déontologie repensée ?

Une nouvelle opportunité

Si les bras de fer entre intérêt privés et intérêts publics deviennent de plus en plus récurrents, celui concernant Uber et Lyft est bien une occasion en or pour les start-ups concurrentes d’émerger plus facilement. Le tremplin décisif fut le South by Southwest (SXSW), festival qui prend vie à Austin Texas et rassemble chaque année plusieurs dizaines de milliers de personnes (72 000 pour l’édition 2016) autour de la musique, du cinéma et des médias interactifs. Le SXSW a représenté pour RideAustin, Fasten et consorts la double opportunité d’une mise en situation à grande échelle et d’une visibilité auprès des grands acteurs du numérique qui y participent. Il s’agissait donc d’un baptême de feu pour ces jeunes start-up.

L’épreuve a été rude pour les deux principales plateformes qui ont souffert d’une foule dense et d’une pluie battante au moment d’un pic de consommation, samedi soir dernier. Les deux serveurs ont crashé successivement, réduisant grandement la mobilité des festivaliers. Mais cette paralysie a ouvert le champ aux start-up concurrentes qui parvinrent, à leur échelle, à assurer un service opérationnel. Malgré les difficultés essuyées, cet évènement a incarné une mise en situation grandeur nature des services de start-up émergentes. Une telle offre déontologique repensée n’aurait jamais été médiatisée et connue du grand public sans la restriction législative qu’a imposé le Texas, soulignant les vertus de la loi sur la concurrence. Quand le droit recadre et innove plus vite que les fameux  » barbares  » du numérique, on peut presque parler de monde à l’envers… Et c’est ce qui nous a particulièrement intéressé dans cette histoire. Une évolution de la nouvelle économie qui vient d’une institution d’état. Une avancée intéressante, et surtout sociale, pour les travailleurs du numérique.

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