12 février 2024

Temps de lecture : 3 min

Des artistes s’insurgent contre Coca-Cola, décrétée pour l’occasion, « canette imbuvable »

Un collectif d’artistes anonymes propose sur le net des cannettes scellées pour dénoncer Coca Cola, le plus gros pollueur plastique au monde. Les profits de cette vente serviront à acheter à découvert des actions du groupe américain afin de faire chute sa valorisation. Disruptif, non?

Les artistes ont, de tout temps, été des lanceurs d’alerte. Picasso a dénoncé avec sa toile monumentale engagée, Guernica, le bombardement du marché de la ville, qui venait de se produire le , lors de la guerre d’Espagne. Une attaque en plein jour, de marché ordonnée par les nationalistes espagnols et exécutée par des troupes allemandes nazies et fascistes italiennes. . L’italien Davide Dormino a coulé dans le bronze des statues représentants Edward Snowden, Julien Assange et Bradley Manning pour montrer l’importance capitale de ces personnes qui n’ont pas peur de prendre des risques personnels pour dénoncer et dévoiler au grand public des scandales qui les dépassent…

Le collectif d’artistes anonymes QSTNMRK? vient, lui, de décider de s’attaquer à un des géants de la malbouffe pour condamner l’impact que ces sociétés peuvent avoir sur nos santés et sur la dégradation de notre planète.

Son « œuvre » intitulée « la canette imbuvable » (« The Undrinkable Can ») reprend tous les codes graphiques de Coca-Cola. Le rouge PMS 484 , comme indiqué dans le Pantone Color book, signature de la marque, la ligne blanche sinueuse qui la traverse et se termine par un majeur pointé en l’air… Tout y est. Jusqu’à l’emplacement réservé aux réglementaires tableaux de valeurs nutritionnelles, dont plusieurs mises en garde sont remplacées par « You are Fucked » (« Vous êtes foutus ») et « Tooth decay guaranteed after 10 years » (« Carie dentaire garantie après dix ans »).

 

 

Cette boîte métallique ne peut être ouverte car elle est scellée et ne comporte pas de languette. Elle contient toutefois 39 grammes de sucre comme n’importe quelle canette de Coca-Cola.

Dans son communiqué de presse, QSTNMRK? condamne l’impact que le groupe d’Atlanta a pu avoir au Mexique. L’ancien CEO de Coca-Cola Mexico n’est autre que Vincente Fox. Lorsqu’il est devenu président de son pays en 2000, l’ex homme d’affaires a permis à son ancien employeur de puiser chaque jour des millions de litres d’eau dans les nappes phréatiques. Aujourd’hui, l’eau potable dans la région du Chiapas est devenue si rare qu’elle coute plus chère que le… Coca-Cola.

Des prix en hausse constante

Pour écouler ses canettes scellées, le collectif n’a pas choisi d’organiser une vente aux enchères mais de les proposer sur internet en suivant un modèle pour le moins original. Le prix payé correspond au numéro de la commande. Ainsi, après la première canette vendue pour un dollar à son premier acheteur, l’objet voit son tarif augmenter sans arrêt… Il faut actuellement débourser 112 dollars pour s’en offrir une. La totalité des gains tirés de cette vente sera utilisée pour acheter à découvert des actions de Coca-Cola. Cette pratique, appelée short-selling dans les pays anglosaxons, consiste à investir de manière à engendrer un profit dans le cas où le prix d’une action baisse. En clair, QSTNMRK? souhaite faire chuter le titre du soda en Bourse. Si son objectif est atteint, le collectif s’est engagé à redistribuer les profits qu’il tirera à trois associations du Chiapas qui luttent contre le géant américain. L’empereur des boissons sucrées, gazeuses n’est décidément pas à la fête en ce début d’année.

100 milliards de bouteilles par an

Le 7 février, l’ONG Break Free From Plastic a élu, pour la sixième année consécutive, la Coca-Cola Company « plus gros pollueur plastique au monde ». Les déchets aux couleurs des marques du groupe américain ont été retrouvés dans les collectes des volontaires de l’association dans 40 pays sur 41 où ont été organisées ces opérations. En 2023, plus de 6% des 537.719 déchets plastiques ramassés avaient été mis sur le marché par le géant du soda. Coca-Cola produit, à lui seul, plus de 100 milliards de bouteilles en plastique par an. Et ce chiffre ne baisse pas. Bien au contraire. En 2018, la compagnie américaine a signé un accord avec la Fondation Ellen MacArthur et le Programme des Nations unies pour l’environnement dans lequel elle s’était engagée à réduire de 20% l’utilisation de plastique vierge d’ici à 2025 par rapport au niveau de 2019. Au lieu de chuter, le volume d’emballages plastiques produit par ses usines est passé de 3 à 3,2 millions de tonnes entre 2019 et 2021. Dans un rapport publié en novembre 2022, la Fondation Ellen MacArthur a précisé que l’emploi du plastique vierge chez Coca Cola était comparable à celui de 2018 avec une reprise à la hausse entre 2020 et 2021 (+ 2,5%) et que l’usage global du plastique (y compris recyclé) avait, lui, augmenté de 5% depuis 2018. Une telle honte méritait bien une œuvre d’art contestataire.

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