8 juin 2022

Temps de lecture : 3 min

Decathlon s’offre un grand stade de Ligue 1 et s’impose ainsi en acteur majeur du foot français

La marque préférée des Français se prête à l’exercice du naming en s’offrant le stade emblématique du LOSC contre un chèque de 6 millions d’euros. Bienvenue au Decathlon Arena, le nouveau fer de lance du groupe pour conquérir le football hexagonal. L’annonce officielle est prévue pour le 24 juin prochain.

L Comme l’a révélé hier la rédaction de France Bleu Nord, visiblement très enthousiaste : « cette fois ça y est, c’est officiel : le stade du LOSC devient Decathlon Arena à partir de la saison 2022-2023 ». Une opération menée sur la base d’un contrat de sponsoring relativement modeste aux vues des standards français mais qui devrait bien contenter les deux parties. D’un côté, le club emblématique de Lille trouve enfin un partenaire financier solide et s’apprête à toucher 6 millions d’euros sur 5 ans, soit à peu près 1,2 million d’euros par an, renouvelables. On est peut-être loin des 70 millions par an versées par Spotify au FC Barcelone – officiellement, on a souvent des surprises avec les contrats catalans –, mais après deux ans de recherche particulièrement couteuse sur le plan économique, on ne va pas faire la fine bouche. Même la commune devrait en profiter puisque les sommes promises viendraient alléger la facture de 15 millions d’euros par an réglés par ses soins pour la construction du stade. Les journalistes lillois avaient finalement raison de sabrer le champagne.

De l’autre côté, la marque – encore et toujours – préférée des Français, continue d’avancer ses pions dans le football français auprès d’un acteur majeur de la discipline – le LOSC étant encore auréolé de son statut de Champion de France 2020-2021 – sans avoir à débourser une fortune. Quand on considère les contrats similaires en vigueur dans notre championnat, on constate par exemple qu’Orange verserait à l’Olympique de Marseille pas moins de 2,45 M d’euros par an et que Groupama serait investi à hauteur de 2 M d’euros par an auprès de l’Olympique Lyonnais. Une différence qui s’explique également par le fait qu’il s’agisse d’un naming partiel et que le stade continuera à s’appeler « Pierre Mauroy » en dehors des matches de football. Les Dogues qui nous lisent en seront, partiellement donc, soulagés.

 

Un investissement qui en cache beaucoup d’autres

Une collaboration importante, certes, mais qui ne constitue qu’une étape de plus dans la stratégie de conquête de Decathlon du marché footballistique. A travers Kipsta, sa griffe in-house dédiée au sport préféré des Français – décidément –, Decathlon est par exemple devenue le 19 mai dernier le nouveau fournisseur du ballon officiel de la Ligue 1 Uber Eats pour les cinq prochaines saisons. Une diagonale essentielle pour asseoir son image de marque en lui permettant de faire table rase de ses principaux concurrents. Au moment de dévoiler les futurs nouveaux joujoux de Mbappé et compagnie, Frédéric Boistard, directeur général de Kipsta, avait ainsi précisé : « Notre réseau en France est fort de plus de 300 magasins, notre priorité est de le distribuer massivement chez Decathlon. Néanmoins, il est important de ne pas confisquer la distribution et de s’associer à des distributeurs complémentaires plutôt que concurrents. Mais non, il ne sera pas distribué chez Intersport à la rentrée ». La marque semble nourrir de grosses ambitions puisqu’à partir de la saison 2023-2024, elle fournira également les ballons du championnat belge.

 

 

Après le stade et les ballons, il lui fallait également une équipe. C’est chose faite depuis le 24 mai dernier – quand on vous dit que les investissements s’accélèrent – puisque Decathlon a annoncé prendre le relai de Puma en devenant le principal équipementier du Nîmes Olympique, en plus du club belge de KV Ostende. Kipsta compte également de plus en plus d’ambassadeurs individuels de notre championnat, tels que le gardien du RC Lens, Jean-Louis Leca ou son partenaire, jeune retraité des terrains, Yannick Cahuzac. Outre le simple ballon rond, Decathlon semble se repositionner depuis quelques années sur l’élite sportive en général en s’efforçant de séduire les sportifs de haut niveau.

En début d’année, le tennisman Gaël Monfils s’était par exemple allié à Artengo, la marque dédiée au tennis du groupe, qui l’habillera pour les cinq prochaines saisons. Un prestigieux partenariat signée avec le n° 1 du tennis français, qui avait même déclaré à l’Open d’Australie qu’il bénéficiait d’« une raquette incroyable ». De quoi permettre, tous comme les autres contrats mentionnés tout au long de cet article, de casser l’image un peu « cheap » que Decathlon a tendance à se coltiner. Mais rassurez-vous : « Ce n’est pas parce que notre image remonte qu’on devient tout de suite inaccessible. On restera dans l’accessibilité et la mise à la pratique. Le prix des produits ne changera pas, répond Anthony Dulieu, responsable Kiprun. Ces partenariats ne sont pas complètement nouveaux. On a toujours voulu valider nos produits avec les meilleurs », expliquait ce dernier.

Des choix qui rapportent

Si vous vous pouvez la question : oui, cette stratégie réussit parfaitement au groupe. L’enseigne, qui compte 324 magasins dans l’Hexagone, annonce avoir vu son chiffre d’affaires progresser de 18% en 2021, pour atteindre 4,2 milliards d’euros TTC, et son volume d’affaires augmenter de 22% qui, lui, s’établit à 4,5 milliards d’euros. A l’échelle internationale, le groupe affiche un CA de 13,8 milliards d’euros en 2021, contre 11,4 milliards d’euros en 2020 et 12,4 milliards d’euros en 2019, avant Covid. Une progression de 11,3% en deux ans. Qu’est ce que sera quand Gaël remportera le prochain US Open ou que le Nîmes Olympique remportera la Coupe de France en claquant un triplé à l’OM… A jamais les premiers.

En savoir plus

Le naming a été utilisée pour la première fois en France en 2011 par le Mans après son accord avec MMA pour renommer son stade au nom de l’assureur. Pourtant, la pratique pêne à décoller auprès des clubs français, bien loin des montants engrangés par leurs collègues américains en NFL ou en NBA, voir même des clubs de football allemands. Une tendance qui s’explique, selon Pierre-Alain Mogenier, avocat au Barreau de Lyon, par « des facteurs économiques, structurels, politiques mais aussi sportifs ».

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