Dix-huit ans après Sa Raison d'Être (Pascal Obispo), le Sidaction revient avec Grand Soleil interprété par le rappeur Damso et 17 artistes complices. Un beau clip et un titre qui devraient toucher le grand public. Au micro Raphaël Fruchard, co-fondateur de The Sound Production.
INfluencia : comment est née cette collaboration ?
Raphaël Fruchard : tout s’est fait très rapidement. Nous ne réalisons pas encore pleinement l’exploit que nous avons eu la chance de mener à bien qui a commencé mi-septembre lorsque Alexandre Jalbert, Directeur de la communication de Sidaction, m’a contacté pour me parler de son souhait de créer un nouvel hymne, 18 ans après « Sa Raison d’être ». L’objectif était clair : s’adresser à la jeune génération, aujourd’hui moins sensibilisée aux enjeux du VIH et des IST.
Avec Antoine Le Guern, superviseur musical de The Sound Production, nous avons immédiatement pensé à associer Charles Moukouri et Rémi Campet de Dat-Way, avec qui nous collaborons régulièrement sur différents projets. Ça nous semblait intéressant de se rapprocher de ces talents, car depuis son lancement, Dat-Way a pour vocation de créer plus de ponts entre la nouvelle pop culture et les annonceurs. En nous réunissant, une évidence s’est imposée : ce projet devait être orchestré autour de Damso.
Nous avons voulu lui laisser une totale liberté artistique, car nous travaillons en confiance avec nos partenaires. Alexandre Jalbert et Noemi Naudi de Sidaction nous ont donné carte blanche, ce qui est remarquable et mérite d’être souligné.
IN. : c’est facile de contacter Damso pour un projet tel que celui-là ?
R.Fr. : oui ! Nous avons donc contacté Damso et son équipe (Amaury Feron, Audrey Vanspringel et Olivia Barbier). Ils ont immédiatement accepté et ont commencé à réfléchir aux artistes qui pourraient rejoindre l’aventure. De notre côté, nous avons également proposé des noms, et le casting s’est fait très naturellement. Tous les artistes contactés ont répondu présents sans hésiter, même si, pour certains, des contraintes de planning ont empêché leur participation finale. Ce qui est impressionnant, c’est que nous avons réussi à rassembler autant d’artistes en si peu de temps. Cela prouve qu’une grande et belle cause peut fédérer au-delà des agendas et des styles musicaux. Nous sommes fiers d’avoir pu démontrer cela avec ce projet.
IN. : qu’attendait Sidaction de vous ? Vos interlocuteurs avaient-ils une idée en tête ?
R.Fr. : bien sûr, Sidaction voulait revivre une aventure similaire à celle de « Sa Raison d’être ». Ils souhaitaient s’adresser aux jeunes, mais n’avaient pas nécessairement accès aux figures qui pouvaient leur parler directement. Et dans une époque marquée par les divisions et les tensions, Sidaction voulait unir et rassembler autour d’un hymne porteur d’espoir et d’universalité. Peu de marques ou d’associations de cette envergure osent prendre ce risque. Mais Sidaction a pour objectif de parler aux jeunes et de montrer que nous pouvons tous nous unir autour de valeurs communes.
IN. : ce clip est une première du genre. Pourquoi avoir choisi le rap ?
R.Fr. : nous voulions parler aux jeunes, nous devions utiliser leur langage et leurs codes. Mais ce projet va encore plus loin : nous sommes convaincus que ce type d’initiative contribue à démocratiser la nouvelle pop culture et à faire évoluer les mentalités. Le message est d’apprendre à écouter l’autre à travers ses émotions et ses goûts. Et quoi de mieux que la musique pour ça ? Avec « Grand Soleil », nous prouvons que les genres et les générations peuvent se mélanger, et que la musique est un langage universel. Et puis Historiquement, le rap a toujours été une voix pour les luttes sociales, donnant la parole à ceux qui en étaient privés. Aujourd’hui, il mérite ses lettres de noblesse et doit être reconnu comme une musique aussi légitime que la pop ou le rock.
IN. : comment avez-vous choisi les artistes : entre autres Charlotte Gainsbourg, Eddy de Pretto, El Grande Toto, Eva, Fally Ipupa, Hoshi, Juliette Armanet, Kalash Criminel, Louane, Pomme…?
R.Fr. : le processus a été très organique. Damso a conceptualisé le titre, et nous lui avons simplement demandé de mélanger les genres et les générations. Le casting s’est fait étape par étape. Certains choix étaient évidents dans l’entourage de Damso, mais il y avait aussi une volonté d’ouverture. Certains artistes n’étaient pas disponibles, d’autres ont dû enregistrer à distance, mais le titre s’est construit naturellement. La musique est une matière vivante, elle évolue au fil du projet. Et quand la cause est juste et que la musique est forte, il se passe quelque chose d’inexplicable.
IN. : quel est le constat aujourd’hui autour du VIH ?
R.Fr. : le VIH est toujours un enjeu majeur de santé publique, mais il souffre aujourd’hui d’une banalisation et d’un déficit de sensibilisation, notamment chez les jeunes générations. D’un point de vue médical, les avancées scientifiques ont permis de transformer le VIH en une maladie chronique, avec des traitements qui, lorsqu’ils sont bien suivis, empêchent la transmission du virus. Une personne séropositive sous traitement ne transmet plus le VIH, ce qui est une révolution.
Le VIH reste aussi un combat social et culturel. La stigmatisation et la sérophobie sont encore très présentes. Les personnes vivant avec le VIH doivent souvent faire face au rejet, aux discriminations et à des difficultés d’accès aux soins. Beaucoup préfèrent taire leur statut par peur d’être marginalisés.