La finance alternative a l’euro en poupe en France, où sa croissance ferait fantasmer n’importe quel ministre de l’économie : +50%. La popularité du crowdfunding, soutenu par de plus en plus en de plateformes, y est pour beaucoup.
» Chez nous, vous pouvez être philanthrope ou donateur le lundi, aider votre voisine à monter une crèche le mardi et investir 200 € dans une PME, le mercredi. Quand vous faites cela vous reprenez le pouvoir sur votre argent, vous devenez un véritable agent économique proactif avec un impact réel dans l’économie « . Le tout évidemment sans jamais solliciter une banque. Dans cette définition de la mission de KissKissBankBank & Co par son co-fondateur Vincent Ricordeau, La Banque Postale y a vu une complémentarité avec ses services bancaires traditionnels. En rachetant en juin 2017 le leader européen du financement participatif, la banque publique française a confirmé le rapprochement récent entre la “ fintech ” et le monde bancaire. Pas folles les guêpes bancaires: comme le révèlent KPMG et l’Association Financement Participatif France, le crowdfunding s’inscrit durablement dans le paysage du financement en France.
D’après le baromètre annuel de référence de la finance participative, la finance alternative affiche une insolente croissance de 50% entre 2016 et 2017. En 2015, 297 millions d’euros de fonds étaient collectés, puis 629 millions en 2016. L’année dernière, le cumul se rapproche du seuil symbolique et historique du milliard d’euros (940 millions). Cette excellente santé s’explique selon le baromètre par le développement des plateformes et l’apparition de nouveaux outils de financement, permettant davantage de modèles hybrides. La place grandissante du crowdfunding se confirme avec +44 % de fonds collectés en 2017 : + 20 % pour le don et + 102 % pour le prêt, dit crowdlending. Enfin, le nombre de financeurs de projets continue également sa progression puisqu’ils sont désormais 3,9 millions de financeurs depuis le lancement des plateformes (contre 2,6 millions à fin 2016).
Plus de 90 % du financement participatif finance l’économie réelle
Depuis la première publication du baromètre du crowdfunding en 2013, la collecte de fonds auprès des particuliers par les plateformes a connu une croissance de 828 %, passant de 36 millions en 2013 à 336 millions en 2017. » Cette croissance a été rendue possible grâce à l’ouverture du secteur à différents types d’outils financiers (émissions obligataires, minibons, titres participatifs…) qui rendent accessibles aux particuliers des financements jusqu’alors réservés aux investisseurs professionnels et institutionnels ; ceci dans le cadre d’une grande transparence et d’une traçabilité réelle, ce que les particuliers recherchent et trouvent sur les plateformes « , explique Stéphanie Savel, présidente de la FPF.
En avril dernier, Vincent Ricordeau nous faisait la démonstration de l’impact d’une plateforme comme KissKissBankBank sur l’économie réelle : » Elle représente un levier hyper simple pour agir. Il n’y a pas besoin d’avoir fait » math sup « , d’être riche ou d’avoir un gros réseau. Il suffit simplement de se dire que, quel que soit le montant d’argent disponible, cela peut être 20 € par mois, je décide de le placer dans l’économie réelle « . Le constat publié par KPMG et la FPF abonde dans son sens : plus de 90 % du financement participatif vient financer l’économie réelle (261 millions) et plus particulièrement les secteurs de l’immobilier (42 %) et de l’environnement & ENR (22 %). Le secteur culturel rassemble de son côté 45 millions, devant le social et ses 30 millions collectés.
Quand le citoyen retrouve sa place dans la Cité
L’autre tendance notable confortée par le baromètre est l’élargissement du champ d’intervention du financement participatif. Il s’adresse aujourd’hui presque tous les secteurs de l’économie et tous les types de structures, de l’association à la start-up, en passant par les TPE-PME et les projets personnels. » Le crowdfunding est un mode de financement de plus en plus populaire chez les Français, notamment auprès de la population jeune, adapté tant aux nouveaux usages qu’à la possibilité pour chaque financeur d’agir sur sa stratégie d’investissement dans l’économie réelle « , analyse Mikaël Ptachek, spécialiste Fintech chez KPMG. Pour rappel, en 2015 une étude de l’université de Cambridge -en partenariat avec KPMG- estimait que les plateformes de financement participatif avaient financé des projets à hauteur de 319 millions d’euros, faisant de la France le deuxième marché de financement européen, derrière le Royaume-Uni.
» Nous avons généré presque 500 millions de chiffres d’affaires, créé 3000 structures et 1 euro investi ou donné sur la plateforme génère 2 euros dans l’économie réelle. C’est un poids réel mais il est tout petit. Nous nous rendons compte quand nous décortiquons les chiffres, que nous n’en sommes qu’au tout début « , nous avouait l’an passé Vincent Ricordeau. L’avènement de ce levier politique au sens propre du terme -celui qui permet au citoyen de retrouver sa place dans la Cité- dépend surtout de la maturation de l’esprit public. Plus que d’un marché.