Notre cerveau code les informations que nous percevons via nos 5 sens en les associant à des ressentis, des émotions… Il constitue ainsi une sorte de base de données phénoménale dans laquelle il va ensuite puiser pour forger sa propre interprétation de la réalité. Ce processus relève de l’expérience de chacun, qui est la voie de connaissance la plus marquante à l’échelle individuelle, mais qui n’est pas facilement modélisable à l’échelle d’un groupe d’individus. Les couleurs s’inscrivent dans ce schéma de perception-décodage. Physiologiquement, nous savons que l’œil humain peut distinguer jusqu’à 200 nuances. Mais les effets psychologiques des couleurs ne se laissent pas cerner avec évidence et font l’objet de diverses spéculations, dans des champs de recherche variés allant des sciences humaines à la biologie. Transversalement aux théories élaborées, trois voies de connaissance nous guident dans la compréhension de l’impact psychologique des couleurs : la science, la systémique et la symbolique.
Une couleur se rattache à un contexte
L’analyse scientifique aide à connaître les couleurs sous l’angle de leurs effets physiologiques. La science nous apprend par exemple qu’une lumière bleue a pour effet de stimuler l’état d’éveil en diminuant la production de mélatonine, une hormone favorisant le sommeil. Ou encore qu’une exposition à de la lumière bleue a un effet globalement relaxant, les deux n’étant pas nécessairement antinomiques. Une couleur se rattache néanmoins à un contexte. Le rouge va évoquer la chaleur au contact du jaune et de l’orangé. Alors que le même rouge va plus facilement évoquer l’érotisme au contact du noir, du violet et du rose. Prendre en compte le contexte et les relations qui s’y tissent est indispensable lorsqu’on pénètre en terre de couleurs. C’est le principe du mode de pensée systémique.
Une couleur symbolique est une couleur que l’on associe consciamment à un sens
Il importe également de prendre en compte le sens que l’on associe consciemment à telle ou telle couleur. Dès lors qu’il y a « sens » et que l’on a conscience de ce sens, on entre dans l’univers du symbole. Il s’agit là d’un processus de portée collective, qui peut traverser le temps ou se propager d’une société à l’autre. Une symbolique des couleurs établie aujourd’hui ne peut pas faire l’impasse de notre histoire, pas plus qu’elle ne peut ignorer les phénomènes de pénétration et d’influence interculturels. Dans notre culture occidentale, le jaune a longtemps été voué à l’infamie. Aujourd’hui, le sens qu’on associe au jaune puise aussi dans d’autres cultures et renvoie à l’idée de rayonnement, de conscience ou d’intelligence. Dans les faits, seules les principales catégories de couleurs ont une portée symbolique affirmée (blanc, noir, rouge, jaune, vert, bleu). Cela a déjà évolué par le passé et peut encore évoluer mais les changements se font lentement, sur des décennies ou plus.
Le packing reflète l’évolution du sens associé aux couleurs
L’univers du packaging, parce qu’il est en prise directe avec les symboliques les plus immédiatement décodées par les acheteurs, permet de suivre les évolutions. L’orangé par exemple amorce une transition. Lui qui pendant longtemps n’a eu qu’un statut de nuance (jaune renforcé, rouge atténué) est en train de développer son statut de couleur symbolique. Il ouvre ainsi la perspective d’une nouvelle palette de sens, parmi lesquels l’audace et le concept de low cost. Le violet, qui pendant des siècles n’a pas bénéficié du statut de couleur à part entière, s’apprête à suivre le même chemin. Nous sommes à l’aube de l’éclosion symbolique de cette couleur.
Véronique Trichard
Fondatrice associée et co-gérante d’Elysées Consulting
Pour aller plus loin : « Quels effets psychologiques produisent les couleurs de vos packagings ? Introduction à la sémiologie des couleurs. » Rendez-vous le jeudi 10 avril 2014 de 14h30 à 15h15 au Printemps des Etudes, Palais Brongniart, Paris.
printemps-etudes.com