A l’heure où tout le monde désormais communique, à bon ou à mauvais escient, sur le Développement durable, n’était-il pas temps de parler de la fonction de « ceux qui en parlent » professionnellement ? D’échanger sur les questions en débat dans l’opinion, à commencer par la première d’entre elles : après l’échec de la co-production à Rio+20, comment trouver la méthode pour intégrer toutes les parties prenantes ? Quel rôle pour la communication ?
Certes le point pourrait paraître anecdotique compte tenu de l’ampleur des enjeux qui sont actuellement au cœur des préoccupations des populations et des pouvoirs publics. Mais on peut penser que sans cette réflexion de la communication sur son rôle en matière de Développement durable, les meilleures solutions risqueraient de ne pas voir le jour…
La communication : un vrai travail de co-production
Or, quel ne fut pas mon étonnement d’entendre un intervenant de renom reléguer encore une fois la communication au rôle de «passeur ». S’il ne s’agit pas de dévaloriser cette fonction, la communication en matière de DD ne doit pas se réduire à faire passer des messages à des publics et des cibles données : le modèle classique de Shannon et Weaver assimilant la communication à une simple mécanique de transmission est aujourd’hui bien dépassé. La communication – et c’est encore plus obligatoire dans le champ du Développement durable – est bien un vrai travail de co-production : comment aller chercher les différents experts, les écouter, challenger leurs opinions pour au final, accoucher des idées nouvelles ? Comment penser à partir de là un système global, le faire exister par les mots, fabriquer le récit qui le fera finalement exister dans l’espace public pour lui permettre de se confronter à l’épreuve de la réalité et faire ainsi avancer les choses ?
Nous sommes entrés dans l’ère du récit
Communiquer c’est aussi faire comprendre, faire adhérer et donc faire, tout simplement.
Pierre Rosanvallon, qui ouvrait cette université, a d’ailleurs clairement dressé les contours de l’écosystème dans lequel nous nous inscrivons et où plus que jamais la communication est consubstantielle. Nous sommes, a insisté l’historien, entrés dans l’ère du récit où représentation et légitimité ne s’acquièrent plus par l’autorité mais par la capacité à exprimer et à représenter des enjeux en apportant de l’information en continu. Les contenus structurent une communication devenue permanente entre les différentes formes de pouvoirs -politique, économique- et la société.
La dichotomie entre ceux qui produisent d’un côté et ceux qui communiquent de l’autre est devenue erronée et dangereuse, en particulier dans un domaine aussi complexe que le Développement durable. Nous sommes dans le «mouvant »et la communication dans ce domaine est une véritable itération. C’est par approximations successives, en faisant connaître des tendances de fond, des ruptures et des phénomènes ponctuels, que la communication permet de mieux cerner le problème pour, au final, mieux le maîtriser.
Si l’on devait définir une méthodologie pour la co-production -car c’est bien de cela qu’il s’est agit au cours de ces deux journées d’université- ce pourrait bien être cette communication itérative, créatrice d’une véritable adhésion des populations sur cet enjeu majeur qui doit tous nous concerner et mobiliser chacun !
Coralie France Savin, Directeur associé Euro RSCG C&O, expert en communication sur le Développement Durable