Un vent de révolte souffle sur les producteurs de podcasts américains. Depuis l’annulation de l’arrêt Roe v. Wade par la Cour suprême le 24 juin dernier, plusieurs séries de programmes audio ont battu numériquement le pavé pour défendre les droits génésiques des Américains. Réunies sous l’égide de la campagne PodVoices.help, elles ont choisi de réutiliser leurs espaces publicitaires pour afficher clairement leur soutien à la cause auprès de leurs auditeurs. Arielle Nissenblatt, fondatrice du mouvement, a été particulièrement touché par cette décision de la plus haute juridiction américaine. Professionnelle aguerrie du milieu – elle a notamment fondé EarBuds, une newsletter hebdomadaire dédiée aux programmes audio –, elle a choisi d’utiliser ces connaissances… et son réseau pour la combattre. « Lorsque j’ai appris que l’arrêt Roe avait été annulé, j’étais à la VidCon à Anaheim et je me sentais vraiment mal à l’aise à l’idée de poursuivre ma journée comme si de rien n’était », a-t-elle expliqué à un journaliste de Mashable. « J’ai réfléchi à la façon dont nous (l’industrie du podcast) pouvions réagir. À partir de là, j’ai travaillé avec au moins 25 personnes différentes pour affiner le discours qui serait utilisé par les podcasters du monde entier pour exprimer leur opposition à la décision », a-t-elle déclaré.
La Pub sauvera le monde…
Vous l’aurez compris, pas question de faire chacun.e à sa sauce. Cette bande de pubards aux grands cœurs a publié un guide dédié à tous les animateurs/producteurs désirant les rejoindre. Il comprend des directives générales, notamment sur les manières d’intégrer ces publicités dans leurs épisodes et l’utilisation d’un vocabulaire non sexiste – un conseil qui ne mange pas de pain –, mais surtout les scripts au mot près de ces spots pre-roll et post-roll de 30, 60 et 90 secondes. Sans oublier de multiples ressources académiques sur les droits génésiques à inclure dans les notes d’émission, le tout décliné en anglais, en espagnol et en français. Comme nous avons pu le lire sur le site dédié à l’opération, l’objectif initial était de produire des call to action « facilement intégrables dans tous les types de programmes audio ». Natifs ou catch-up. Le site guide également les visiteurs qui chercheraient à s’impliquer vers une liste de liens utiles pour la défense de l’avortement.
De nombreuses émissions ont déjà choisi d’inclure ce spot en ouverture de leur émission : « Bonjour, _____ [auditoire]. Avant de commencer l’épisode, nous prenons un moment pour parler de la décision du 24 juin de la Cour suprême qui a invalidé l’arrêt Roe contre Wade. Cette décision a supprimé le droit légal à un avortement sûr et légal. La restriction de l’accès à des soins complets de santé reproductive, qui incluent l’avortement, menace la santé et l’indépendance de toutes les personnes vivant aux États-Unis. Cette décision de la Cour suprême risque également d’entraîner la perte d’autres droits. Pour en savoir plus, rendez-vous sur podvoices point help. Nous/Je vous encourage/encourageons à vous exprimer, à prendre soin de vous et à faire passer le message ». Avec plus de 120 millions d’auditeurs de podcasts aux États-Unis l’année dernière et plus de 2 millions de podcasts accessibles dans le monde, la force de frappe de cette initiative est non négligeable. De quoi inspirer des régies publicitaires d’autres industries médiatiques ?
Déceler le vrai du fake
#MeToo, #FridaysForFuture, #BlackLivesMatter… les mouvements sociaux et environnementaux ont pris du poids cette dernière décennie dans l’écosystème médiatique et plus spécifiquement publicitaire. A mesure que les jeunes générations s’éduquent et s’engagent dans ces mouvements, il est tout à fait logique que l’activisme de marque – le terme peut déranger – trouve une place dans les stratégies de communication. Une étude publiée en 2020 par le cabinet Advent pour Capital avait parfaitement mis en exergue cette idée que « les Français ont intégré que les entreprises étaient des acteurs économiques et sociaux qui agissent dans leur vie de tous les jours ». Jérôme Neveu, le président d’Advent, avait ajouté à l’époque : « Les Français veulent aujourd’hui que l’entreprise rende à la « Terre », via des efforts environnementaux et sociaux, ce qu’elle lui prend en ressources humaines et naturelles. Et la crise sanitaire a accentué cette quête de sens ».
Si la sincérité de cette campagne, de ses têtes pensantes tout du moins, ne prête qu’à peu de doute, comment éviter l’opportunisme de façade ? Tout simplement en organisant ses prises de parole et ses actions philanthropique en fonction d’une stratégie globale qui servira à rendre le tout cohérent… et sincère. Fin juin, nous avions interrogé Maxime Quillévéré, le co-fondateur de Charitips qui propose à ses clients la « première solution marketing de fidélisation et d’engagement par la philanthropie ». Il nous avait révélé que « ces entreprises qui se saisissent de ces questions, souvent pour la première fois, ont peu d’expérience en la matière. Pour piloter leur politique RSE, elles nomment des salariés qui viennent généralement du marketing, du partenariat ou autre », peu capables de développer une stratégie de marketing activiste – pas forcément mieux – globale.
Mais ils sont souvent « friands de nouveaux procédés et de nouvelles solutions pour venir appuyer leur mandat. Notre mission est de faire en sorte que nos clients adaptent notre technologie à leur quotidien pour générer un fort impact social. Voila pourquoi on se voit avant tout comme des créateurs d’expérience caritative ». En même temps, il est bien plus simple de faire valider une campagne de donation à sa direction quand on a un ROI valable à faire valoir. « Quand une entreprise nous contacte, 60% du budget de sa campagne de donation sont déductibles des impôts. On lui propose de maximiser les 40% restants en augmentant sa marque employeur ». C’est tout simplement la logique du marché – caritatif –.