L’autre matin, je me suis levée, encore troublée par un cauchemar terrible : des présentateurs virtuels avaient remplacé les Anne-Claire Coudray, Anne-Sophie Lapix et autres Jean-Pierre Pernaut. Google siégeait désormais dans les locaux de la Stasi à Berlin et espionnait nos pensées les plus intimes et Samsung travaillait sur un logiciel permettant de contrôler un téléviseur avec le cerveau…
Mais après ma première tasse de thé, j’ai suivi ma routine quotidienne, allumé la radio, zappé entre les stations, puis allumé la télévision, ouvert mon ordinateur, consulté mon téléphone… Et partout les nouvelles étaient les mêmes. Je n’avais pas rêvé : les deux premiers présentateurs de télévision virtuels – l’un s’exprimant en chinois, l’autre en anglais – avaient bien été dévoilés par l’agence chinoise de presse Xinhua, annonçant une « première mondiale »*. Des avatars certes au débit monotone et sans la chaleur humaine que l’on attend de nos « anchormen et women » préféré(e)s, mais qui promettent de travailler 24 heures sur 24, sept jours sur sept, sans opinion personnelle et sans faire grève bien sûr. Un monde à la Orwell.
Quant à Google, le géant de Californie, qui fait depuis des années des yeux doux à Berlin pour y installer un nouveau campus gigantesque, s’est vu offrir par des élus municipaux un emplacement « idéal » : tout simplement celui de l’ex Stasi, la terrible police politique de l’Allemagne de l’Est. Google n’a pas encore réagi et il est fort possible qu’il décline la proposition. Mais l’idée d’implanter sa vitrine locale dans un endroit qui reste associé à l’espionnage massif de la population est-allemande est pour le moins ironique. Orwell se régalerait s’il était de ce monde…
* Au Japon, le robot Erica, lancé en début d’année, devait présenter le journal sur une chaîne de télé japonaise mais, aux dernières nouvelles, elle officierait surtout comme hôtesse d’accueil dans certains centres commerciaux.