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Comment la classe moyenne va t-elle agir en 2021? FreeThinking* l’a interrogée et a radioscopé 10 résolutions parmi celles qui lui ont semblé les plus importantes. INfluencia a publié la première lundi 18: « Consommer Somewhere (dans la mesure de mes moyens) », la deuxième mardi 19: « pensez aux autres », la troisième mercredi 20: « soutenir mes petits commerçants », la quatrième jeudi 21: « prendre soin de ma santé et de celle de mes proches, dans mes actes quotidiens », la cinquième lundi 25 : « redécouvrir les petits bonheurs de la vie normale ». , la sixième le mardi 26: « Garder la bonne habitude de consommer détox », la septième le mercredi 27 : « un jour, arriver au zéro déchet », la huitième le jeudi 28 : « apprendre à me débrouiller seul et à faire moi-même ce que je peux… »
Voici la numéro 9 : « voir plus loin que les étiquettes… »
« On nous a tellement menti sur les produits. J’ai viré de mes placards tous les produits ménagers – ne restent plus que le vinaigre blanc, le bicarbonate de soude et l’eau tiède avec le savon noir – j’essaie de cultiver le maximum de légumes dans mon jardin – sans engrais chimique et pesticides – et n’achète jamais de plat préparé – c’est là ma maigre contribution. » Ce commentaire d’un interviewé de l’Observatoire FreeThinking des classes moyennes révèle que les Français des classes moyennes ne connaissent et n’admettent pas de limite. Plus loin, plus dur, plus rigoureux : en matière d’exigence sur la qualité des produits, la traçabilité, la transparence et l’origine de la production/fabrication, ils ne transigent pas. Et ne laissent pas d’autre choix aux marques et aux entreprises que de progresser, visiblement, encore et toujours.
Vérifier, contrôler, maîtriser.
Ce sujet embrasse en effet la totalité des dimensions de leur vie de consommateur et de citoyen. « Il révèle aussi la distance critique qui peut être la leur vis-à-vis des marques et des grandes entreprises, plus que jamais mises face à leurs devoirs et à leurs pouvoirs d’agir, en période de crise », commente Xavier Charpentier, directeur général associé de Freethinking. Enfin, la mémoire des Français est sans pitié : scandales alimentaires ou crises sanitaires, tensions sociales ou sur les conditions de travail … rien n’est oublié, tout est stocké dans le disque dur de ces citoyens-consommateurs. « Et l’effet de cliquet que ces informations produisent est lui aussi brutal : le degré de défiance dépassé à la hausse à l’occasion de chaque affaire grave n’est ensuite que très partiellement franchi à la baisse une fois que l’affaire s’estompe », renchérit Romain Napierala, consultant chez Freethinking.
2021 accroît cette tendance de long terme. Face à la crise et à l’incertitude, la volonté de nos compatriotes de rester en contrôle de leur consommation est encore plus forte. Face aux dégâts socio-économiques qu’elle génère et face aux failles environnementales qu’elle révèle, leur exigence de garantie de qualité et de confiance se renforce. Elle tend à se transformer en recherche d’un nouveau ROI. Comme si l’acte d’achat devenait un investissement pour soi, sa santé, l’économie française, la planète.
Et si la meilleure des étiquettes était celle dont on n’avait pas besoin ?
« S’inscrire dans une consommation raisonnable et responsable, c’est d’abord pour ces Français des classes moyennes continuer à utiliser des outils de repérage incontestables dans l’univers de la « nouvelle responsabilité », celle qui intègre les dimensions à la fois économique, sociale, environnementale et locale de façon visible, si possible vérifiable », explique Xavier Charpentier. Des outils qui doivent être indépendants. Yuka et Nutriscore sont incontournables pour identifier les marques et entreprises à l’empreinte santé limitée. Mais la recherche de nouveaux instruments est permanente, pour tracer toujours plus de dimensions de cette nouvelle responsabilité.
Mais c’est aussi mener une démarche plus radicale : préférer des produits, des pratiques, des usages issus du modèle alternatif « antisystème », à l’opposé du modèle économique traditionnel. « À leurs yeux, la référence en matière de responsabilité, c’est spontanément en priorité ce qui n’a pas de marque, ni d’étiquette – parce qu’il n’y en a pas besoin : l’origine, le mode de fabrication, l’identité même du producteur sont supposés connus. La « responsabilité de proximité » dispense de l’étiquette. C’est la vertu attribuée au local, aux circuits courts, au direct producteur. Mais aussi au fait-maison, l’auto-production via son potager voire même son propre poulailler ou son système de récupération d’eau ou énergie. Ou encore à l’achat en vrac et à celui de seconde main. La confiance qui dispense de l’étiquette et de la marque, c’est d’abord celle qui est liée à des relations interpersonnelles, qu’elles soient réelles ou en partie fantasmées », souligne Romain Napierala.
C’est cette désintermédiation à la fois de la relation producteur-consommateur et de l’information qui donne le sentiment d’être plus en maîtrise de sa consommation et en accord avec ses préoccupations économiques, sociales, environnementales et de santé. Parce que ces Français ont le sentiment, ainsi, de pouvoir agir à la source, sans être dépendants d’intermédiaires et donc sans risque éthique : choisir la désintermédiation, c’est éviter la désinformation.
Solution miracle ou pensée magique ? La marque comme tiers de confiance.
Si cette désintermédiation de l’information est aussi valorisée que valorisante à leurs yeux, elle n’est pas sans faire émerger de réelles questions en termes de sécurité et de fiabilité. « Le parallèle avec ce que l’on peut observer sur les réseaux sociaux est une bonne façon de prendre conscience de la puissance du phénomène mais aussi de ses limites et de ses dérives potentielles : quand l’information n’est plus cautionnée, garantie et mise à disposition par un tiers de confiance, comment réussir à faire la différence entre la vérité et la fake news, entre des faits objectifs et l’histoire que l’on a envie de croire ? Un rôle sans doute plus exigeant que jamais pour les marques – mais aussi, heureusement pour elles, plus nécessaire que jamais », conclut Xavier Charpentier.
La 10ème résolution: « avoir 20 ans en confinement, c’est comment? » a été publiée le 6 janvier.
* Depuis 2007, FreeThinking (Publicis Media) radioscopie la classe moyenne française. Au total, quatorze ans de conversation et plus de quarante études quali-collaboratives ont été menées, rassemblant près de 5000 Français sur la plateforme fermée Freethinking dans une conversation interactive au long cours. En 2020, FreeThinking a échangé de façon qualitative mais à grande échelle, avec ces 530 Français au cours des trois temps forts de la crise : du 24 mars au 21 mai (étude #ResterChezSoi), du 10 septembre au 12 octobre (#LaRentréeD’Après), et enfin du 4 novembre au 18 décembre (#RetourChezSoi).