Nous sommes en 2015 et pour faire leurs présentations, la majorité des professionnels continuent de souffrir en utilisant Power Point. Pourtant depuis deux ans, il existe une vraie alternative, elle s’appelle Bunkr, elle est Française, utilisée dans le monde entier et elle vient de sortir sa V2… Précisions avec l’un des co-fondateurs, Edouard Petit.
Pourquoi donc l’outil de présentation rigide et chronophage de Microsoft continue-t-il de rester le standard international, alors que la technologie permet aujourd’hui la création de présentations interactives à partager avec un contenu web enrichi ? Cette question légitime, Alexis Jamet et Edouard Petit en ont fait leur mojo depuis septembre 2012 et la création de Bunkr : le « Power Point killer » qui a lancé sa V2, le 3 février -neuf mois après avoir levé un million d’euros auprès d’Idinvest, de Daniel Marhely, co-fondateur de Deezer, et de Xavier Niel.
Logiciel mais aussi service -saas en anglais pour « Software as Service »- Bunkr, avec ses 80 000 utilisateurs, veut simplifier la présentation et remettre le contenu au cœur de son processus de création. Comment ? Notamment par une intégration soignée d’applications externes comme Youtube, Twitter ou Flickr, et par la mise à jour en temps réel des données lisibles en format HTML 5 ou téléchargeables sur tablettes comme sur PC. Avec ce nouveau produit c’est une deuxième vie qui commence pour la start-up de Rouen. Et forcément… Edouard Petit, le co-fondateur et directeur marketing de Bunkr a pris le temps d’en discuter avec INfluencia.
INfluencia : avec cette nouvelle version, Bunkr change t-il de mission ou bien l’outil s’est-il simplement adapté aux nouveaux formats de contenu ?
Edouard Petit : l’idée de départ de Bunkr n’a pas changé, à savoir éviter qu’il y ait trop de perte de temps dans les outils d’une présentation qui n’apportent presque pas de valeur puisque le contenu est déjà fait. Comment justement remettre de la valeur sur le contenu ? Comment s’appuyer sur les contenus déjà existants pour que les gens puissent présenter rapidement ce qu’ils ont déjà fait ? C’est pour répondre à ces deux questions que nous avons crée Bunkr en septembre 2012, lancé une première Beta en décembre 2012 et une V1 en avril 2013. Cette première version était vraiment simple, avec des vidéos YouTube, des tweets et des images Google, juste pour identifier si le besoin que nous avions ciblé était réellement attendu par les gens. Nous nous sommes rendu compte que nous avions plein d’utilisateurs qui généraient des présentations à la volée grâce à notre simplification. En mai 2014, nous avons levé un million d’euros avec pour objectif de recruter l’équipe technique et faire le produit identifié depuis un an et demi. Puis, en juin/juillet, nous sommes repartis d’une feuille blanche avec notre nouveau CTO, qui a monté toute la solution cloud chez Gandi.
INfluencia : peut-on donc dire que vous avez développé les moyens techniques sans changer le produit mais en l’adaptant encore mieux à la demande constatée depuis 18 mois ?
Edouard Petit : le produit change un peu car nous avons réalisé que dans l’usage il y avait plein de choses qui étaient demandées mais pas utilisées ou d’autres utilisées mais sur lesquelles nous n’avions pas mis l’accent. Les cartes étaient dans notre camp, il fallait tout remettre à plat après avoir bien distingué ce que nos utilisateurs utilisent vraiment, pas ce qu’ils veulent. On ne repart pas de zéro, l’idée d’utiliser les contenus est toujours là. Au début nous voulions juste construire une maison pour abriter 50 personnes, là nous savons que nous avons les moyens de remplir un immeuble en béton armé. Nous avons recruté les personnes pour cela. Nous étions très jeunes dans le produit, il fallait évoluer mais cette volonté a ralenti la levée de fonds, qui a été compliquée en France. Nous avons failli partir aux Etats-Unis mais nous voulions vraiment lever en France, car c’était quand même plus simple et plus rapide.
INfluencia : Bunkr a-t-il créé une appétence inédite sur un nouveau processus de création de présentation qui va vous obliger à constamment évoluer technologiquement ?
Edouard Petit : toutes les technologies et tous les contenus évoluent. Quand nous nous sommes lancés, Vine par exemple n’existait pas sous son format actuel, nous n’avions pas réfléchi à cela. Aujourd’hui l’avantage c’est que nous nous sommes posés pour réfléchir et nous savons que nous devons créer une coquille qui demain pourra encapsuler tous les formats, même ceux qui n’existent pas encore. Ce qui est bien pour nous, c’est qu’aujourd’hui le web se base sur plein de standards que tous les gros valident par des consortiums. Donc si nous restons dans ce cadre, nous devrions nous en sortir. L’application a été refaite sur une base d’API, qui est une idée de prise électrique sur laquelle on peut brancher n’importe quoi. Si demain un nouveau format voit le jour, ce n’est pas grave, car la fonctionnalité qu’on a créée marchera toujours. Il faudra juste créer un raccord.
INfluencia : l’estampille Power Point Killer, c’est votre création ou vous en avez été affublé et l’avez accepté ?
Edouard Petit : nous ne l’avons pas conçu comme tel dans un premier temps même si on se détachait vraiment de Power Point. Nous ne parlions que de présentation, c’est plus les médias et les gens qui nous ont vu comme ça. On a pris cette appellation avec humour et on l’accepte car la seule et unique raison pour laquelle nous avons quitté nos boulots pour créer Bunkr, c’est parce que cela nous saoulait de passer autant de temps sur les présentations. Si on peut tuer Power Point on le fera, on n’a pas de souci avec ça car aujourd’hui c’est une souffrance pour tout le monde. Personne n’aime cet outil mais malgré tout, le monde entier l’utilise comme un standard depuis 25 ans.
INfluencia : Bunkr est-il finalement un outil « disruptif» ou simplement une réponse à une certaine lassitude ?
Edouard Petit : je le qualifie de totalement « disruptif ». Certes cela part d’une identification mais la façon de faire de Bunkr est d’inverser le processus de création. Aujourd’hui quand on veut réaliser une présentation on ouvre un document vide et on commence à créer des choses. Nous, notre vision, c’est que ce temps là ne fait pas partie de notre boulot. Si on est un architecte, son métier est de passer son temps à faire de la 3D et non pas à créer la présentation finale envoyée au client. Cela n’a pas de sens. Seulement aujourd’hui le fichier 3D on ne peut pas l’envoyer à son client, donc on fait des captures jpeg qu’on met dans Power Point. Nous on est là pour présenter la 3D qui est sa valeur. On doit récupérer la matière source pour la présenter.
Quand on commence à travailler en arrêtant de penser au support mais plutôt au contenu, du coup on connecte les contenus au support de présentation. Donc si la personne fait des modifications, le fait d’être en lien en temps réel fera qu’on verra forcément les évolutions de la production ou du produit. C’est là où la présentation est quasiment transparente. On est vraiment dans autre chose. Notre paradoxe c’est que nous sommes un outil de présentation conçu pour que les gens arrêtent les présentations. Nous pensons qu’un journaliste qui numérise ses notes doit pouvoir les récupérer s’il doit les présenter à quelqu’un. Ce qui fait perdre beaucoup de temps aux gens c’est qu’ils refont en permanence ce qu’ils ont déjà fait. Bunkr s’implémente dans une logique où il faut tout matérialiser. Dans un premier temps, nous allons donc nous appuyer pour cette nouvelle version sur des utilisateurs qui ont déjà un usage web très ancré, qui font déjà des présentations qui finalement s’appuient à 80% sur des données web.