La première chaîne française de restauration à table a décidé de jouer la carte bleu, blanc, rouge dans son menu. Un défi de taille lorsque ses achats annuels de viande atteignent 5000 tonnes…
Certains paris qui semblent anodins peuvent en réalité se révéler être de véritables casse-têtes. Offrir dans ses restaurants des viandes provenant d’animaux élevés en France peut paraître simple. Sauf quand on cherche à acheter 5000 tonnes d’entrecôtes et autres ribs du jour au lendemain… Voilà maintenant deux ans que Buffalo Grill a été croqué par le fonds d’investissement britannique TDR Capital . Chaque année, 42% des Français viennent dévorer une pièce de bœuf, un faux-filet ou un burger dans un des 360 restaurants de l’enseigne au toit rouge. Pour que ce taux de pénétration dépasse le cap symbolique des 50%, la plus grande chaîne française de restauration à table, qui fête cette année son 40ème anniversaire, ne ménage pas ses efforts.
20 ouvertures par an
« Nous allons ouvrir une vingtaine de restaurants par an pour franchir le plus rapidement possible la barre des 400 établissements, révèle Jocelyn Olive, le directeur général de Buffalo Grill. Nous nous implantons notamment dans les villes de 20.000 à 30.000 habitants où nous réalisons de très bons résultats. Nous nous installons généralement sur les mêmes carrefours que McDonald’s qui était, jusqu’à notre arrivée, la seule enseigne à viser ce marché ». Parallèlement, le groupe s’est lancé dans la livraison à domicile après la signature d’un partenariat avec Uber Eats . Cette initiative a vite porté ses fruits car les 100 restaurants qui participent à cette opération (160 d’ici la fin de l’année) ont déjà vu leur chiffre d’affaires progresser de 5%. Le restaurateur a aussi retravaillé sa carte. Nouvelles recettes, cheeseburger sans viande… Pour séduire une clientèle plus large, Jocelyn Olive a, en outre, choisi de jouer une carte très à la mode depuis quelque temps : le Made in France.
La carte du made in France
Les clients sont en effet de plus en plus nombreux à vouloir consommer des aliments produits ou élevés près de chez eux. « J’ai donc décidé il y a dix-huit mois de proposer dans nos restaurants de la viande bovine certifiée origine France, explique le directeur de Buffalo Grill. A l’époque, 50% de nos viandes provenaient d’animaux élevés dans l’hexagone. Nous devrions passer à 85% cette année pour atteindre progressivement le cap des 100% dans un avenir proche ».
La concurrence est rude
Cette hausse peut paraître lente. « Mais il n’est pas aisé de trouver 5000 tonnes de viande qui répondent à notre cahier des charges, se défend l’ancien directeur général de Burger King France de 2013 à 2016 qui a ensuite occupé le poste de directeur général adjoint du même groupe après le rachat de l’enseigne Quick. Une vache n’a que cinq côtes et une seule partie de l’arrière de l’animal peut servir pour préparer des rumsteaks. Pour des chaînes comme Hippopotamus ou Flunch qui doivent consommer 1500 tonnes par an, passer au 100% France est plus aisé. Et puis, il ne faut pas oublier que la grande distribution cherche, elle aussi, à proposer des viandes élevées en France». La concurrence est donc rude pour trouver des pièces de qualité sans exploser ses charges fixes. « Nous ne pouvons pas nous permettre d’accroître nos prix, juge Jocelyn Olive. Si nous augmentons les tarifs de nos menus de deux euros, plus personne ne viendra chez nous car nous attirons une clientèle très populaire ». Pour fidéliser les 15.000 éleveurs qui lui fournissent les bêtes qui sont ensuite découpées et préparées dans son atelier basé dans la l’Essonne, la chaîne de restauration leur signe des contrats avec des volumes d’achat garantis sur douze mois.
Observer un groupe aux prix si serrés (son menu plat et dessert ou boisson ne coûte pas plus de 7,95 euros) se débattre pour trouver des matières premières françaises montre à quel point le Made in France est passé dans les mœurs de notre société. La traçabilité, la sauvegarde de nos éleveurs et la protection de l’environnement sont devenus des priorités pour les consommateurs. Mieux vaut tard que jamais…