17 septembre 2015

Temps de lecture : 2 min

Brand journalism, cet oxymore qui ne devrait pas exister

Un article invraisemblable qui vante les mérites des journalistes qui pourront produire « the relevant and insightful copy that audiences demand ». Transformer le journaliste en VRP.

Un article invraisemblable qui vante les mérites des journalistes qui pourront produire « the relevant and insightful copy that audiences demand ». Transformer le journaliste en VRP.

Un court article sur le site cmo.com intitulé « Marketers and journalists joining forces to create killer content » fait se dresser les cheveux sur la tête. Son auteur considère que le brand journalism « gagne en popularité et en crédibilité ». Et de vanter ses avantages, la qualité des journalistes en matière de rédaction qui leur permettra de mieux transmettre des messages « sous-jacents » («underlying») de la marque via le storytelling.

Journaux et entreprises créent des équipes internes de brand journalists. Dans la presse, ils sont des « éditeurs commerciaux » au service de leurs annonceurs en recrutant des journalistes connus, sans compter la prolifération d’agences de brand content. Un défi selon l’auteur. Pour résumer, ces équipes doivent apprendre à « comprendre une marque, raconter de « great stories », à démontrer un réel ROI en engageant les lecteurs ».

Brand journalism, une vraie opportunité

Cerise sur le gâteau, le brand journaliste ne doit pas seulement créer du contenu mais être « commercially accountable ». Une « formidable combination ». Selon une étude réalisée par ses soins, 64% des patrons du marketing envisagent de poursuivre leurs efforts en termes de brand content. Ce n’est pas tout, ce nouveau métier est une vraie « opportunité ». Mieux encore, 51% des brand journalists interviewés, lors de cette enquête, considèrent qu’il leur apporte plus de satisfactions que le journalisme traditionnel. Inutile de vous dire que l’auteur de ce publi-reportage -pardon de cette tribune- est patron de la société NewsCred, spécialisée en brand content.

En ces périodes d’honnêteté, de nécessaire transparence et de RSE, on ne peut qu’être abasourdi par ce texte. Bien sûr, en toute logique, il y parle de business et de ROI à plusieurs reprises. En cherchant une illustration, on trouve des dizaines de sites vantant leur métier. Qu’en pensent les « vrais » journalistes ? Mettre leur plume au service des marques, en y perdant leur âme. Souvent, ils n’ont pas le choix, et quand on voit la pression qu’ils subissent dans la presse classique où il est interdit de critiquer, leur position n’est pas plus enviable. Mais quand même!

Bref, son texte n’est pas une great story. Mais, quand les journaux licencient à tour de bras, le native advertising devrait générer des emplois. Nécessité économique oblige. Même la presse de gauche s’y met. Deux « partenariats » -belle sémantique de Libé– pour Nestlé : pour Vittel et l’huile de palme. Une même journaliste, auteure de ces deux textes -embedded dans une équipe dédiée?- vraiment gentille et objective, sans même évoquer les problèmes que rencontre Nestlé en Amérique du Nord à propos de la gestion des sources d’eau potable et des problèmes gigantesques de l’exploitation des palmiers à huile qui, après avoir bousillé la forêt, dévore les terres arables. « Formidable combination ».

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