Belén Frau Uriarte, Ikea : “nous explorons de nouveaux modèles, comme la location de meubles sur quelques années.”
Belén Frau Uriarte, la Global Communication Manager d’Ikeaprésentait sa vision de la communication aux Cannes Lions 2022. Pour Influencia, elle explique pourquoi les entreprises doivent s’engager davantage et comment le groupe Ikea fait évoluer son modèle.
A une époque où les produits et les services se banalisent, leur associer du sens, de la passion et de l’humanité permet d’ouvrir les vannes de la créativité.
INfluencia.: selon vous, quels sont les points communs des marques qui réussissent aujourd’hui et qui réussiront demain ?
Belén Frau Uriarte: pour réussir, les entreprises doivent être capables d’articuler quatre dimensions : “profit”, “purpose”, “people” et “passion”. Avoir une raison d’être est aujourd’hui est de plus en plus évident pour les marques, mais cela ne peut pas fonctionner sans la profitabilité, puisque c’est ce qui donne les ressources pour être une entreprise responsable. La passion est également clé, car elle conduit des gens ordinaires à faire des choses extraordinaires. Les gens aussi, évidemment, car ce sont eux qui opèrent le business. A une époque où les produits et les services se banalisent, leur associer du sens, de la passion et de l’humanité permet d’ouvrir les vannes de la créativité.
IN. : comment Ikea se positionne-t-il sur ces différentes dimensions, et en particulier sur le « purpose » ?
B.F.U. : nous avons la chance d’avoir une vision qui va au-delà de la recherche du profit depuis les origines de l’entreprise, avec notre ambition d’améliorer la vie du plus grand nombre : c’était la volonté de notre fondateur, énoncée dès 1976 dans un manifeste. Son raisonnement ? Si c’est bon pour les gens, c’est bon pour le business.
Nous avons également pour objectif de faire en sorte que d’ici à 2030, 100% de nos produits soient conçus dans une démarche circulaire, grâce à des matières premières recyclées, refabriquées, rénovées ou réutilisées.
Nous avons ainsi pris de nombreux engagements en matière de développement durable, avec notamment un investissement récent de 4 milliards d’euros dans les énergies renouvelables. Nous voulons réduire notre empreinte et évoluer vers l’utilisation d’énergies 100% renouvelables sur l’ensemble de notre chaîne de valeur. Nous avons également pour objectif de faire en sorte que d’ici à 2030, 100% de nos produits soient conçus dans une démarche circulaire, grâce à des matières premières recyclées, refabriquées, rénovées ou réutilisées. C’est le cas de 60% de nos produits désormais. Nous cherchons aussi à aider nos clients à adopter un mode de vie plus durable, grâce à nos produits. D’ores et déjà, un tiers de nos ventes sont faites avec des produits qui répondent à cet enjeu.
Nous travaillons avec des réfugiés – de longue date, pas seulement depuis la guerre en Ukraine – pour les former et les aider à trouver un emploi et s’insérer sur le marché du travail.
Sur le plan social, nous travaillons avec des réfugiés – de longue date, pas seulement depuis la guerre en Ukraine – pour les former et les aider à trouver un emploi et s’insérer sur le marché du travail. Sur ce sujet, comme sur les autres, nous cherchons à entraîner avec nous un maximum d’entreprises, en partageant nos bonnes pratiques et en créant un mouvement rassemblant d’autres grands groupes engagés. Nous pensons que les entreprises doivent jouer un plus grand rôle dans la société.
Il y a maintenant des “circular hubs” dans chacun de nos magasins et certaines de nos filiales explorent de nouveaux modèles, comme la location de meubles sur quelques années.
IN. : concilier développement durable et prix bas, est-ce possible ?
B.F.U. : une des particularités d’Ikea est effectivement de s’appuyer sur le concept de “democratic design” depuis toujours : quand nous concevons des produits, nous prenons en considération tout aussi bien la forme et la qualité que le prix. Désormais, nous y ajoutons la durabilité. Certes, nos produits sont tellement abordables qu’ils peuvent donner envie à nos clients d’en changer souvent. C’est pour cela que nous faisons tout pour donner à nos produits une seconde chance, via des programmes de reprise et de rachat. C’est une façon pour nous d’être plus circulaire. D’ailleurs, il y a maintenant des “circular hubs” dans chacun de nos magasins et certaines de nos filiales explorent de nouveaux modèles, comme la location de meubles sur quelques années.
IN. : comment faites-vous pour déployer cette vision au sein d’un groupe aussi grand qu’Ikea ?
B.F.U. : nous sommes en effet un très grand groupe, mais le fait d’avoir une raison d’être depuis toujours a cimenté nos valeurs. Nous avons recruté des gens qui les partagent et poursuivent un même but, avec passion, partout dans le monde. L’enjeu est d’avoir une stratégie commune, aussi mondiale que possible et aussi locale que nécessaire. Chaque filiale adapte la stratégie localement, mais la vision reste la même.
L’enjeu est d’avoir une stratégie commune, aussi mondiale que possible et aussi locale que nécessaire.
En externe, nous travaillons beaucoup avec le World Economic Forum pour partager nos bonnes pratiques et nous nous appuyons sur nos partenaires, qui sont aussi les ambassadeurs de nos actions. Nous pensons que nous avons la possibilité – et même la responsabilité – d’influencer les autres entreprises pour les inciter à s’engager.
IN. : l’inflation, la guerre en Ukraine, les problèmes de logistique mettent à mal votre modèle… Comment gérez-vous cette situation ?
B.F.U. : en faisant preuve de transparence ! Nous souffrons comme tous les autres distributeurs des problèmes logistiques. A chaque fois, nous avons essayé autant que possible de trouver des alternatives, notamment en produisant davantage en Europe. Lorsque cela n’a pas été possible, nous avons été honnêtes et transparents avec les clients, par exemple en les orientant vers des alternatives que nous avions en stock. Être honnête et transparent, c’est la seule façon de réagir dans pareille situation.
Nous avons été contraints d’augmenter nos prix, mais en nous assurant toujours de proposer le meilleur prix, afin de rester une destination abordable pour un maximum de gens.
Quant aux prix, notre ambition est toujours d’améliorer la vie du plus grand nombre. Nous faisons donc tout ce que nous pouvons pour garder les prix aussi bas que possible, et nous avons fait des efforts sur nos marges cette année. Lorsque cela n’est plus possible, nous avons été contraints d’augmenter nos prix, mais en nous assurant toujours de proposer le meilleur prix, afin de rester une destination abordable pour un maximum de gens.
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