Cette question que d’aucuns voudraient ajouter à toute publicité s’inscrit bien dans le monolithisme de la bien pensance actuelle. Surprotéger le citoyen, le consommateur lui dire ce qu’il doit faire/ne pas faire/ où et comment le faire…(quitte à changer d’avis le lendemain…) au nom d’une morale collective qui désigne ses exutoires. La publicité en est un, facile, identifiable, punissable, taxable, …attention les médias arrivent derrière, en ligne de mire.
Bientôt pour les magazines print ou TV, dans la même logique, vous pourriez être exposé.e à la mention « Êtes- vous sûr.e d’avoir besoin de lire ce papier ou d’écouter ce débat ? » ou encore « Attention la diversité des opinions des protagonistes peut choquer » ou plus sérieusement (quoique …), sous couvert de vérification de l’information, la question peut devenir dès demain matin : « Etes- vous sûr.e de ce que vous lisez/ regardez,… ». Les deux libellés sur le besoin et sur la véracité sont individuellement pertinents et renvoient à une dimension personnelle et naturelle. C’est la systémie de la question qui exaspère. Désolé, cette tendance n’est pas nouvelle : on voyait déjà se profiler cette surprotection carcérale pour les jeux, les prêts financiers, l’alimentation, l’énergie, la vitesse (90 pardon 80 oui mais non). Je ne vais pas vous en infliger la litanie, il n’est que d’écouter les radios dites commerciales et de prêter oreille aux mentions légales qui accompagnent toutes ces pub et qui tuent toute tentative de rêve.
Ce qui est gênant, c’est l’accumulation permanente
On dira que j’exagère que nombre des mesures précédentes qui ont accompagné ses slogans d’état ont produit des effets, protégé des vies, … c’est sûr. Ce qui est gênant, c’est l’accumulation permanente : on retire peu de phrases- contraintes années après années même quand les scientifiques mettent en doute leur validité, on en ajoute toujours plus. Conséquence immédiate le sentiment de réduction du périmètre de liberté du consommateur et du citoyen. C’est flagrant ces jours-ci avec la crise sanitaire, mais peut être était ce plus profond et non limité à cette période d’exception. L’Etat démocratique en France comme ailleurs concentre ses pouvoirs sur la morale, car de plus en plus de domaines lui échappent au profit des médias (qui ont la prise de parole), des entreprises (qui offrent l’emploi et font l’économie), des associations (qui animent le culturel), …et lui font craindre à juste raison tous les extrémismes.
L’aseptisation de la pensée n’est pas une solution
L’aseptisation de la pensée n’est pas une solution, elle annihile les réactions du plus grand nombre, mais génère des rejets violents des chapelles qui en dénoncent la mollesse. La crise des régimes démocratiques en est un exemple depuis des années. Dans toute règle majoritaire et dans le système médiatique actuel, les minorités dites agissantes sont l’objet lancinant de tous les discours politiques et médias, et de tous les focus quotidiens. L’exaspération de la majorité passive devant ce spectacle se double d’un sentiment de stigmatisation des minorités. Les réseaux sociaux leur offrent une caisse de résonnance et de de « raisonnance » permanente qui facilite l’éclosion des communautés. Ces temps-ci, la cohabitation des démocraties et du système médiatique en devenir n’est pas simple.
On dira que l’éducation est la véritable réponse.
On dira que l’éducation est la véritable réponse. Pourquoi pas ? Méfions-nous cependant de l’éducation des masses populaires qui n’a pas laissé que des bons souvenirs. L’éducation est essentielle mais doit intégrer avant tout la dimension de transmission de savoirs et de savoir être. Et c’est peut- être là où le bas blesse. Le savoir s’appuie sur des connaissances qui forgent la personnalité et le savoir- être. Le libre arbitre n’aura pleinement son sens que dans cette construction individuelle des opinions. Or cette bien « pensance » touche aussi l’éducation : des pans entiers de la pensée d’hier et d’aujourd’hui ne sont plus enseignés, et alors que l’information existe notamment on line, on n’apprend pas à en développer l’accès individuel. L’enseignement se contente peut-être un peu trop de cette information consensuelle. Au final ce qui manque peut-être c’est cette culture ouverte, curieuse parfois irrespectueuse, qui amène à la réflexion individuelle et à la prise de compte de l’autre et de l’environnement. Et si c’était cela le rôle de l’état, la culture plus que la morale, la culture pour que la morale se construise collectivement sans langage condescendant, sans position infantilisante. Et si on définissait la Raison d’Etre de l’Etat.
(au lieu d’imposer aux marques de se comporter en agents d’une faible pensée d’État)