14 mars 2025

Temps de lecture : 3 min

Avec les formats immersifs (presque) en temps réel, TF1 anticipe les JT de demain

Être au cœur de l’info, quoi de plus naturel pour un journal télévisé ! Le 20h de TF1 inaugure samedi 15 mars 2025 une approche éditoriale immersive qui s’appuie entre autres sur la réalité augmentée. Explications avec Yoann Saillon, directeur artistique du Groupe TF1.

(c) Lucie Cosnier TF1

INfluencia : comment ont été conçus les formats immersifs mis à l’antenne dans les JT de TF1 à partir de ce samedi 15 mars 2025 ?

Yoann Saillon : tout part de l’éditorial et de la volonté de rendre certains sujets plus attractifs en créant une diversité visuelle et formelle, en cassant la grammaire systématique et même systémique d’un JT. S’il n’y avait pas eu cette volonté éditoriale, nous n’aurions pas eu recours à ce type de formats. Comme d’autres chaînes, nous produisions déjà des sujets avec de la réalité augmentée très impactants mais il s’agissait jusqu’à présent de sujets post-produits et qui demandaient de lourds développements. Nous avons voulu aller plus loin pour être le plus proche possible de l’actualité, en créant un écrin mobilisable en temps réel et dans le cadre du direct. Quand l’actualité le nécessitera ou pour des rubriques régulières comme Infox qui inaugure le dispositif, des éléments de réalité augmentée et de XR (réalité étendue, ndlr) seront intégrés dans toute une partie du plateau. Il sera aussi possible d’intégrer un flux digital natif. Les journalistes – Gilles Bouleau, Anne-Claire Coudray ou Marie-Sophie Lacarrau – seront immergés dans ce décor et s’appuieront beaucoup plus sur l’image. Cela leur demande un important travail d’adaptation dans l’écriture, qui devient plus elliptique et plus dynamique au moment de lancer les sujets ou de commenter une information, un chiffre… Ces formats spectaculaires ne sont ni des gadgets, ni de l’info-spectacle, ils ouvrent beaucoup de possibilité de storytelling. On est au début de quelque chose qui va dans le sens de l’histoire et préfigure les JT de demain. Dans quatre ou cinq ans, ces formes seront totalement intégrées.

IN : dans quels cas y aurez-vous recours et avec quels objectifs ?

Y.S. : ces formats permettent de mettre en situation des sujets souvent difficiles à illustrer – inondations, intempéries, grève des transports… – pour lesquels nous allions jusqu’à présent chercher la sempiternelle vidéo d’archive, avec un traitement et une écriture qui restaient un peu classiques.  Pour les sujets de consommation, nous pourrons partir d’un univers connu, par exemple un supermarché, pour décortiquer des sujets sur le coût de la vie dans un rayon spécifique ou commenter l’inflation sur un produit en affichant de la data. En cas de grève des transports, le journaliste sera dans un aéroport ou une gare. La rubrique 13h à table, qui part à la rencontre des plats gastronomiques locaux, sera lancée de la cuisine du JT. La recette du jour pourra être incrustée dans un espace dédié et, ensuite, le sujet se lancera. Nous y aurons aussi recours pour rendre le fact-checking plus dynamique.

IN : au moment où l’IA générative nous habitue à voir des images plus réelles que nature mais montées de toutes pièces, ces formats immersifs ne créent-ils pas un risque de confusion pour le téléspectateur ?

Y.S. : l’IA générative nous sert surtout à chercher de la photo réaliste mais nous l’utilisons à la marge car le JT reste un espace d’authenticité et de crédibilité. Quand nous y avons recours, nous l’indiquons expressément. Elle est en revanche utilisée par notre service qui débuggue les fausses vidéos.

IN : vous misez sur le temps réel mais combien de temps faut-il pour préparer ces modules immersifs ?

Y.S. : il faut généralement 24 heures pour créer les modules avec de la réalité augmentée et 48 heures pour illustrer les sujets plus complexes. Comme le public est très exigeant et n’accepterait pas que nous lui proposions quelque chose d’approximatif, le niveau de qualité a été poussé à l’extrême. Nous avions recours à la réalité augmentée en post-production depuis 2018. La vidéo volumétrique, que nous avons lancée il y a un an et demi pour les modules animés par Yani Khezzar, demande quatre à cinq mois de travail. Nous sommes les premiers en Europe à recourir à ces technologies autour du temps réel. Les Américains le font pour des événements ou des soirées mais pas dans le cadre des journaux d’information avec des formats réactualisables en direct.

IN : Comment avez-vous embarqué les équipes et quelles nouvelles compétences avez-vous dû recruter ?

Y.S. : le projet, qui conserve le côté qualitatif et statutaire du plateau du JT, a nécessité neuf mois de R&D et a été monté à 90 % par les équipes en interne. Tout le monde est concerné -l’artistique, la réalisation et l’éditorial – et a dû adopter une nouvelle culture de travail. La rédaction s’est donc réorganisée, une quinzaine de personnes ont été formées ou sont en cours de formation. Nous avons recruté des compétences sur deux types de profils, des 3Distes et des personnes en charge de l’intégration artistique et graphique. Cette internalisation d’un nouveau savoir-faire dans l’élaboration des journaux télévisés a été une aventure humaine tout autant que technique.

Capture d'écran TF1

La rubrique Infox des Vérificateurs de TF1/LCI inaugure les formats immersifs, samedi 15 mars 2025. A la mi-journée, une cuisine fera son apparition pour la rubrique Le 13h à table.

Capture d'écran TF1

En savoir plus

Les formats immersifs se déploieront selon un calendrier en plusieurs étapes : avec L’Infox, samedi 15 mars, dans le 20h avec Anne-Claire Coudray, dans le 20h avec Gilles Bouleau à partir du 17 mars, puis dans le 13h avec Marie-Sophie Lacarrau à partir du 24 mars.

Chaque année, de nouvelles technologies sont intégrées au plateau du JT, un espace de 200 m² créé en 2018. La surface d’écrans LED a été doublée pour passer à 140 m² avec un sol et un mur vidéo.

Trois technologies ont été superposées au logiciel Unreal, qui vient de l’univers du jeu vidéo et que TF1 utilise déjà depuis 5 ans : la solution Onset de Disguise pour le décor et le pilotage de l’écran physique, et des outils Pixotope, la XR pour la perspective et la réalité augmentée pour les objets.

Allez plus loin avec Influencia

the good newsletter

LES FORMATIONS INFLUENCIA

les abonnements Influencia