On ne se refait décidément pas… Après des débuts dans la radio chez NRJ, puis dans la télé avec BFM TV, puis RMC Découverte et RMC Story, Alain Weill semblait avoir tourné une page de sa vie dans les médias pour se consacrer au redressement d’un titre phare de la presse française, L’Express, qu’il a racheté en 2019. Les développements de la marque s’étaient jusqu’à présent plutôt concentrés sur le print, l’événementiel et le digital avec une activité de salons virtuels, pour lesquels il avait racheté la start-up lyonnaise What the Franchise en février 2023. L’idée d’une chaîne L’Express TV n’était pourtant jamais bien loin, comme il le rappelait à l’automne dernier à l’occasion des 70 ans du newsmagazine.
Une formidable opportunité business
Cette envie de replonger dans la télé est devenue tout à fait officielle mercredi 15 mai 2014 ! Son groupe a en effet déposé auprès de l’Arcom, autorité de régulation de l’audiovisuel, un dossier de candidature pour une chaîne qui s’appellera L’Express TV et sera – bien logiquement dans la lignée des TF1+, M6+ et autres marques SVOD – assortie d’une plateforme digitale L’Express TV+. Le fondateur de BFM TV s’est donc finalement positionné à l’occasion de la remise en jeu de 15 fréquences de la TNT dont les autorisations d’émettre arrivent à échéance en 2025. « Dans notre projet de transformation, aller vers l’image est aujourd’hui indispensable. […] L’IA qui arrive va encore créer des troubles. C’est le bon moment pour lancer des diversifications. […] Ce projet est une formidable opportunité qu’on ne souhaite pas laisser passer », a-t-il résumé lors d’un point presse. Et pour cause ! Si la candidature de L’Express TV est sélectionnée par l’Arcom à l’issue des auditions qui se tiendront à partir du 8 juillet, l’homme de médias estime que le chiffre d’affaires du groupe L’Express pourrait ni plus ni moins passer « de 25 M€ à plus de 80 M€ ».
L’entrepreneur compte investir dans ce nouveau projet pas moins de 30 M€ avec l’objectif d’atteindre la rentabilité en année 5, « comme ce qui a été fait pour BFM TV, RMC Découverte et RMC Story », les chaînes qu’il avaient lancées lorsqu’il était à la tête de NextRadioTV ou chez Altice Media (en passe d’être racheté par CMA CGM). Reste donc à être sélectionné dans un exercice que le président de l’Arcom a jugé « très ouvert » mais qui laissera sans doute peu de places aux nouveaux entrants. Pas de quoi décourager Alain Weill : « Aujourd’hui, un nouvel élan est nécessaire. Notre projet contribue au pluralisme car L’Express est un nouvel entrant dans l’univers de la télé et un groupe indépendant ». Il fait aussi valoir son expérience, lui qui a lancé par le passé trois chaînes devenues rentables, quand « au bout de 20 ou 30 ans, certaines ne sont toujours pas bénéficiaires ».
Un late show satirique « à l’américaine » au cœur du projet
Le projet de chaîne repose sur une grille « extrêmement simple » qui « met le paquet sur le prime time » avec un talk show d’infodivertissement qui se rapprochera des late shows américains. Ce programme en direct qui devrait être présenté par « une star de l’audiovisuel » s’en rapprochera par son traitement satirique de l’actualité, un genre qui s’est singulièrement raréfié à la télé, mais aussi par son mode de programmation : diffusé à 21h, il sera rediffusé dans la foulée « par souci d’efficacité » et pour lui permettre de mieux émerger.
Le reste de la grille sera composé de documentaires et magazines sur l’histoire contemporaine et les sciences, autant de thématiques qui font écho à la ligne éditoriale du magazine papier autour de la rationalité scientifique et la lutte contre le complotisme. Un parti-pris qui continuera d’ailleurs de s’affuter : « Les élections européennes et américaines vont tendre les rapports de force. Nous voulons faire un journalisme plus distinctif, plus tranchant dans sa manière d’aborder les sujets », a indiqué Eric Chol, directeur de la rédaction. Le projet de chaîne comprend aussi un volet important sur l’éducation aux médias et à l’usage du numérique. La création d’un salon virtuel des médias au moment de la Semaine de la presse et des médias dans l’école serait d’une autre synergie possible au sein de l’écosystème de la marque.