En Alsace, 35 agriculteurs se sont regroupés pour racheter un ancien Lidl et le transformer en supermarché de vente directe et d’échange avec un consommateur de plus en plus demandeur de circuits-courts. L’initiative confirme un profond changement culturel dans la production et l’achat de produits agricoles.
» Nous n’étions pas satisfaits de l’offre alimentaire qui nous était proposée, alors nous avons décidé de créer notre propre supermarché « . Voilà les mots explicatifs de La Louve sur son site internet. Crée par deux Américains résidents dans la capitale française, le premier supermarché coopératif et participatif de Paris est inspiré du Park Slope Food Coop, ouvert à Brooklyn en…1973. Avec l’expansion du mouvement » slow food « , le mieux-manger se démocratise, les circuits courts des AMAP et des Ruches se développent, et les supermarchés collaboratifs débarquent avec leurs grands principes d’auto-gestion coopérative sur un marché de la grande distribution en pleine prise de conscience. Puisque l’adage du » on n’est jamais lieux servi que par soi-même » ne vaut pas que pour les consommateurs, 35 agriculteurs alsaciens se sont regroupés pour racheter un ancien Lidl et livrer le consommateur directement, sans intermédiaire.
Rebaptisée Cœur Paysan, cette grande surface qui invite « l’Alsace au coeur de votre assiette » est un lieu de vente directe dont l’objectif est triple : éviter les marges et les cahiers des charges standardisés des réseaux de distribution traditionnels, valoriser le savoir-faire des producteurs et répondre à une demande croissante pour les produits locaux. » Je suis maraîcher et pratique la vente au détail depuis longtemps mais j’en avais assez de livrer mes produits à la grande distribution, de cette pression perpétuelle sur les prix et les services et la situation ne cesse de se détériorer « , a expliqué Denis Digel, initiateur du projet et représentant du collectif des 35 paysans, dans plusieurs médias généralistes français.
Ouvert en décembre 2016 à Colmar, Coeur paysan confirme la volonté grandissante des agriculteurs de revenir aux valeurs du métier de » payculteur » promu par l’association Fermes d’Avenir de Maxime de Rostolan, porte étendard médiatique de l’agroécologie et de la permaculture. Pour renouer le lien avec les consommateurs et échapper à la pression exercée sur les tarifs par les enseignes, cette initiative innove en créant un nouveau modèle disruptif. En tenant des permanences de deux demi-journées par mois minimum, les producteurs veulent offrir aux consommateurs une transparence totale qui peut signifier » la fin de l’anonymat alimentaire « , estime Denis Digel » Nous avons besoin du retour du consommateur, c’est valorisant et puis nous adaptons, si possible, notre offre à leur demande « .
Quand un resto possède sa propre ferme
Propriétaires de leurs produits jusqu’au passage en caisse où une commission de 22 à 32% est prélevée par le magasin, les agriculteurs de Coeur paysan, tous situés à moins de 40 km du magasin, sont donc responsables de leurs produits face aux clients : ce sont eux qui en fixent les prix. Si INfluencia évoque aujourd’hui ce nouveau modèle du producteur au consommateur, c’est qu’il consolide une nouvelle pensée de nos habitudes alimentaires et nos comportements d’achat. Cette mutation en cours se caractérise depuis deux ans par plusieurs parangons révélateurs de profonds changements culturels. Auto-promue chantre militante du nouveau modèle très couru labellisé « De la ferme à la table », la chaîne Dig Inn, qui possède onze restaurants dans la Big Apple, a par exemple poussé l’évolution du concept vers une nouvelle étape. Laquelle ? Posséder sa propre ferme où seront produits les fruits et légumes proposés sur ses menus, comme nous l’expliquions en avril 2016.
Quand il faut monter au créneau pour défendre les intérêts du consommateur, certaines marques n’hésitent pas à multiplier les initiatives pour coller au maximum aux notions d’engagement, de transparence et de respect. C’est ce que rappelait le Rapport INfluencia x Dagobert sur les marques qui comptent. La recherche de nourriture dans votre quartier peut-elle être un voyage à travers le temps et la culture ? L’application Falling Fruit le pense et invite le citoyen urbain à célébrer une alimentation hyper-locale. Pensée et développée par une association nord-américaine à but non lucratif, l’application répertorie les arbres fruitiers dans les grands centres urbains.
Replacé dans le contexte de l’industrie publicitaire, le farm-to-table rappelle la nouvelle concurrence des agences, ces boîtes de production et studios qui, après avoir fait office de prestataires de services, sont contactées aujourd’hui en direct par les marques. INfluencia analysait le phénomène en juin 2015, juste avant les Cannes Lions.