INFLUENCIA : Après les récentes acquisitions des agences LDR, Petit Ami et Phénomène, vous annoncez aujourd’hui l’achat de l’agence Win-Win. Qu’est-ce qui a guidé ce choix ?
Franck Chaud : C’est d’abord une histoire d’hommes comme pour chaque rapprochement. Nous allons passer du temps ensemble à travailler sur un projet, si nous ne connaissons pas encore exactement le chemin que nous devons parcourir, nous devons au moins être certains de vouloir atteindre le même objectif. Le deuxième point, c’est l’expertise. Le passé de Christophe (Cousin) de Communicant avec un grand « C » et aussi de créatif venant du monde de la pub nous a beaucoup intéressés. Ensuite, c’est la transformation marketing qu’il arrive à appliquer sur nos métiers et qui donne une couleur aux opérations Win-Win. C’est une agence qui a une patte ! Nous allons mettre toute cette richesse en juxtaposition avec d’autres compétences pour offrir à nos clients, suivant leurs besoins, des formats différents ou/et des touches différentes. Enfin, l’expertise de Win-Win sur le digital est également un point décisif. Toutes les entreprises du marché ont fait une formation accélérée sur le digital pendant le covid mais c’est Christophe avec Mathieu (Venturini, directeur général associé de Win-Win) qui l’ont le mieux transformé en construisant un modèle et en implantant dans le digital toutes les notions de marketing événementiel ou marketing expérientiel dont beaucoup parlent et peu réalisent aujourd’hui.
Nous étions alignés sur tous les sujets aussi bien la stratégie, la vision du marché, de notre métier, les investissements ou encore les innovations à apporter
IN. : Win-Win est une agence connue et (re)connue sur le marché. Pourquoi avoir décidé de rejoindre un groupe et plus précisément WMH Project ?
Christophe Cousin : C’est très simple. Nos métiers sont rentrés dans une ère industrielle et à notre taille nous avions deux choix. Soit il fallait qu’on parte dans une croissance avec une capacité à racheter, à intégrer d’autres agences pour grossir très vite, soit redevenir un artisan avec trois ou quatre personnes et faire de la haute couture à toute petite échelle car la taille moyenne aujourd’hui est très difficilement tenable sur le marché. Nos clients sont des grands comptes qui veulent de plus en plus de garanties et de certifications, et la pression sur les achats est colossale. Selon que l’on pèse 10-15 millions ou 240 millions d’euros, on n’achète pas et on n’organise pas de la même façon, on ne dispose pas non plus des mêmes capacités pour développer des expertises. Je prends par exemple un domaine où nous avons été précurseurs, la certification ISO 20121. Chaque année, cela me prend entre six et sept jours. En intégrant WMH Project, nous bénéficierons de l’expertise d’une équipe dédiée et spécialisée sur ces sujets qui maîtrise bien plus les process qu’un chef d’entreprise comme moi. Ce temps gagné va me permettre de me consacrer pleinement à ce que j’aime faire, de la strat, du développement, de la créa… C’est pour toutes ces raisons que j’ai décidé de rejoindre un groupe. Alors, j’ai alors rencontré plusieurs entreprises et mon choix s’est porté sur WMH Project pour deux raisons principales. La première, c’est un groupe bien équipé et structuré et la deuxième est le fait de s’associer avec des entrepreneurs. Dans nos discussions avec Franck et Marc (Fischer co-président de WMH Projet), à aucun moment il y a eu la moindre anicroche ou même négociation, nous étions alignés sur tous les sujets aussi bien la stratégie, la vision du marché, de notre métier, les investissements ou encore les innovations à apporter.
Le projet c’est de servir des entrepreneurs à qui on n’a pas besoin d’expliquer comment ils vont faire leur métier mais plutôt comment on va mieux le faire ensemble et comment on va pouvoir innover ensemble
IN. : Vous évoquez l’importance des services achats et de la trésorerie des agences…
F.C : Aujourd’hui, il faut avoir les curseurs financiers au vert, cela s’est accentué depuis le covid, c’est le premier point. Le deuxième point, c’est que nous devons répondre de plus en plus à des critères tels que la certification ISO 20121 mais aussi 27001 en matière de sécurité des données et sécurité informatique, un certificat loin du monde des agences… Tous les critères aujourd’hui sont importants pour séduire les achats. Effectivement, notre groupe est important en termes de taille, de volume, de métiers etc… mais ce que nous aimons faire c’est rapprocher des entrepreneurs. Notre différence sur le marché, nous ne sommes pas dans une opération financière mais dans un projet. Le projet c’est de servir des entrepreneurs à qui on n’a pas besoin d’expliquer comment ils vont faire leur métier mais plutôt comment on va mieux le faire ensemble et comment on va pouvoir innover ensemble.
Nous terminons l’année 2024 avec 240 millions d’euros de chiffre d’affaires en comptant l’intégration de Win Win et 74 millions d’euros de marge brut, soit une croissance de 27% par rapport à 2023
IN. : Cette acquisition marque une nouvelle étape dans votre stratégie de croissance pour devenir leader européen de communication hors-média ? Une ambition dont vous nous aviez parlé il y a un an. Objectif atteint ?
F.C : Aujourd’hui nous nous considérons comme leader européen français de la communication hors-média. Nous terminons l’année 2024 avec 240 millions d’euros de chiffre d’affaires en comptant l’intégration de Win Win et 74 millions d’euros de marge brut, soit une croissance de 27% par rapport à 2023. Notre trajectoire repose sur un modèle basé sur la croissance externe et la croissance organique qui fait ses preuves. Dans notre stratégie aujourd’hui, nous voulons adresser le B to B, le B to C et aussi ce que nous appelons en interne, le « B to I » pour les institutionnels. Ce sont les trois grands marchés sur lesquels nous voulons être présents. Ensuite, nous développons des grands métiers que sont l’événementiel, le spatial design, l’incentive and travel, l’influence et le digital.
À date, nous constatons un peu de rationalisation de budget et du report de la fête de fin d’année
IN. : Dans un contexte géopolitique, social et politique très tendu… ressentez-vous un impact sur votre activité et vos clients ?
F.C : Nous avons des clients inquiets mais cela dépend de leurs secteurs d’activité. Notre avantage aujourd’hui est que nos différents métiers exposés ou commercialisés nous donnent une résilience particulière que nous pouvons éprouver encore assez fort cette année puisqu’effectivement notre carnet de commandes n’a pas faibli. Néanmoins, quelques signaux indiquent que cela va être un peu plus difficile dans certains secteurs mais pour le moment il est difficile de se prononcer. Mais à date, nous constatons un peu de rationalisation de budget et du report de la fête de fin d’année, au premier trimestre de l’année prochaine, et dans un autre format plus particulièrement une opération commerciale. Aujourd’hui, les entreprises opèrent des arbitrages.
C.C : Nous avons beaucoup gagné en crédibilité et en efficacité avec Paris 2024. Les métiers de l’événementiel sont aujourd’hui beaucoup plus reconnus au sein des entreprises comme un élément moteur de l’engagement des collaborateurs, des clients… Là où on pouvait être futile, aujourd’hui nous avons une posture très utile et même incontournable. Le covid a renforcé le côté de l’humain qui doit s’engager… Bien sûr que ça tape dans les entreprises mais elles ont besoin d’engager l’humain et de rassembler leurs équipes.
Nous allons continuer à chercher des entreprises dans différents domaines du spatial design, de l’incentive, de l’influence, du digital
IN. : Rassembler les équipes est au cœur de votre métier…
F. C : WMH pour We Make it Happen, nous avons rajouté le mot Project (projet) car notre mission aujourd’hui est d’être capable d’engager tous les publics, on a su comment les engager hier, on sait comment les engager aujourd’hui mais on ne sait pas encore comment on les engage demain. Nous sommes dans une quête d’innovation, ce qui nécessite de rassembler des entreprises d’où notre modèle basé entre autres sur la croissance externe. Nous allons continuer à chercher des entreprises dans différents domaines du spatial design, de l’incentive, de l’influence, du digital…
Nous devrions ouvrir prochainement aux États-Unis pour accompagner certains de nos clients mais aussi à Milan
IN. : Avez-vous le projet d’ajouter ou de développer de nouvelles expertises ? Quelles sont vos ambitions pour 2025 ?
F.C : Oui, nous voulons développer la partie expérientielle sur les espaces, appelée chez WMH Project Spatial Design, nous lançons un appel (rires) ! et la partie conseil qui va nous amener vers du branding à un moment donné. Ensuite, nous souhaitons nous renforcer dans le secteur du luxe, sur la base de Petit Ami et également sur les métiers apportés aussi par l’agence Phénomène (médias digitaux, production audiovisuelle…). Nous cherchons également à nous renforcer au niveau sectoriel et faire du multi local. Nous sommes aujourd’hui implantés en Bruxelles (Belgique), à Lyon, à Bordeaux, à Paris et bientôt à Marseille (avec Win-Win). Nous devrions ouvrir prochainement aux États-Unis, sur la Côte ouest (Los Angeles) pour accompagner certains de nos clients (en vue notamment des JO de Los Angeles 2028) mais aussi à Milan. Nous faisons partie avec Petit Ami des quelques agences qui travaillons sur les vingt clients qui font des défilés haute couture. De fait, nous devons les accompagner aussi bien à Paris qu’à Milan. Ensuite, sur la partie institutionnelle, notre volonté est également de nous renforcer sur les pays de l’Est, en Roumanie ou Pologne également pour accompagner nos clients. Enfin, d’autres sociétés viendront bientôt nous rejoindre. Nous ferons des annonces, certainement d’ici la fin de l’année…
IN. : Intégrer un volet publicité, un projet dans les cartons ?
F.C : Non car nous tenons à être un groupe hors-média. En revanche, nous avons un gros pôle vidéo qui a été renforcé avec l’apport de Phénomène. Nous produisons pour plus de 22 millions d’euros de vidéo, c’est un métier qui est aujourd’hui à consolider car nous devenons un réel producteur de contenus vidéo. L’étape suivante est de positionner ces ressources sur de la production de films mais non publicitaires. Ce qui nous intéresse c’est le documentaire d’entreprise, qui est à la bonne croisée de notre connaissance des marques et le monde vidéo.
IN. : Vous êtes la premier groupe de communication hors-média entreprise à mission depuis 2023…
F.C : Nous avons entamé une démarche développement durable, nous étions parmi les premières agences avec Win-Win à avoir la certification ISO 20121, pour accompagner nos clients sur leurs engagements RSE depuis quelques années. Ensuite, pour mieux répondre à la quête de sens de nos talents, nous avons cultivé en interne un certain nombre de choses avec notamment la mise en place d’opérations comme du mécénat de compétences, du fonds de dotation… Mais à un moment, nous nous sommes rendu compte qu’au vu de nos investissements, de la mobilisation de beaucoup de collaborateurs pour alimenter les projets internes et externes… nous devions aller plus loin dans notre engagement écologique, social et sociétal. Nous avons donc décidé de devenir entreprise à mission (définie par la loi PACTE de 2019) « pour avec nos équipes, nos clients et nos partenaires rendre possibles des rencontres durables au service d’une société et d’une économie plus respectueuses, plus engagées et plus solidaires » (dans les statuts du groupe). Je terminerai par un chiffre, 400 jours de mécénat de compétences ont été réalisés cette année dans le cadre de « CALL TO Actions », notre programme d’engagement solidaire.
En résumé
Groupe WMH Project
• 423 collaborateurs (avec l’effectif de Win-Win)
• Présence à Paris, Bordeaux, Lyon et Bruxelles (Belgique) et bientôt Marseille (+ à venir ouvertures à l’international, Etats-Unis, Italie, Pologne…)
• Expertises de conception et de production sur cinq métiers : Event, Incentive & Travel, Spatial
Design, Image et Influence
• Entreprise à mission depuis novembre 2023
• Dernières acquisitions
Win-Win (décembre 2024) – Phénomène (début 2024) – Petit Ami (décembre 2023) – LDR (2022) et Vademecom, en Belgique devenu WMH Brussels (2021