INfluencia : comment êtes-vous parvenu à percer sur le marché du crédit à la consommation face aux géants de la finance ?
Charles Egly : en proposant un produit unique que personne d’autre n’offrait sur ce marché. Nous sommes en effet les seuls à proposer des crédits instantanés avec de longues échéances et pour des montants pouvant atteindre 50.000 euros. Il vous suffit pour cela de remplir un formulaire en une minute à peine et nous vous dirons en quelques secondes si nous pouvons vous octroyer un crédit ou non.
Le plus difficile dans notre business est d’éviter les défauts de paiement.
IN : comment faites-vous ?
C.E. : avec le temps, nous sommes parvenus à accumuler des données et à développer des algorithmes de scoring et de détection de fraude. Depuis notre création en 2011, nous avons travaillé comme des ânes et nous avons levé plus de 300 millions d’euros pour investir principalement dans notre outil technologique. L’entrée en vigueur de la deuxième directive européenne sur les services de paiement (DSP2), le 13 janvier 2018, a également changé la donne car ce texte permet à tout le monde d’avoir accès aux données bancaires de ses clients. Nous pouvons ainsi vérifier en quelques secondes l’histoire bancaire d’une personne, le solde de son compte, son loyer, ses crédits en cours et son salaire net mensuel. Le plus difficile dans notre business est d’éviter les défauts de paiement. L’analyse des données bancaires nous aident en ce sens mais nous utilisons également de nombreuses données non conventionnelles afin de repérer les possibles fraudeurs ou ceux qui n’ont pas les moyens de prendre un nouveau crédit. Notre système permet ainsi de détecter une demande envoyée d’un coffee-shop à Bangkok le dimanche à 5 heures du matin.
IN : quel est le pourcentage de demandes que vous refusez et cela a-t-il un impact sur votre croissance ?
C.E. : nous pré-acceptons entre 30% et 40% des demandes que nous recevons. Refuser la majorité des requêtes ne nous empêche toutefois pas de croître très rapidement. L’an dernier, nos revenus ont progressé de 100% pour atteindre 150 millions d’euros et le volume de crédits octroyés a bondi de plus de 140%. A ce jour, nous avons déjà financé 151.327 projets. Beaucoup de personnes nous ont dit que notre croissance en 2021 était liée à la reprise économique générale mais nous devrions croître encore plus rapidement cette année. Notre production de crédit devrait en effet bondir de 150% et nos revenus doubler à nouveau.
Notre système permet ainsi de détecter une demande envoyée d’un coffee-shop à Bangkok le dimanche à 5 heures du matin.
IN : comment parvenez-vous à progresser aussi rapidement ?
C.E. : notre hypercroissance est la résultante de deux choix. Notre outil technologique est tout d’abord désormais au point. Notre stratégie de partenariat avec des acteurs de l’e-commerce qui sont en plein boom porte également ses fruits. Nous en avons aujourd’hui une cinquantaine et nous en signons de nouveaux presque tous les jours. Le fait d’avoir Apple et Microsoft comme partenaires nous aide beaucoup car ces groupes signent des accords uniquement avec des entreprises très sérieuses. Aujourd’hui, les crédits que nous accordons directement aux clients représentent entre 70% et 75% de nos revenus et le montant moyen des prêts est compris entre 5000 et 10.000 euros. C’est plus que pour les contrats signés via nos partenaires (500 à 2000 euros) mais cette partie de notre business se développe très rapidement.
nous ne communiquons pas trop sur le fait d’être une licorne car c’est très « show off »
IN : à quoi vont vous servir les 170 millions de dollars que vous avez levé l’été dernier auprès des fonds américains Goldman Sachs et Bridgepoint et de vos actionnaires historiques Eurazeo, Bpifrance et AG2R La Mondiale ?
C.E. : à investir dans la tech et les datas… Nous allons aussi accroître nos dépenses en marketing et recruter environ 100 personnes cette année pour atteindre un effectif total de 600 collaborateurs. Après l’Italie, l’Espagne, le Portugal et l’Allemagne, nous comptons également nous lancer dans trois nouveaux pays européens entre 2023 et 2025.
Les investisseurs sont à la recherche d’actifs et ce phénomène provoque une inflation de la valorisation des entreprises
IN : votre levée de fonds, l’an dernier, vous a permis d’obtenir le statut de licorne mais vous n’avez pourtant pas communiqué sur ce sujet alors que de nombreuses autres start-ups françaises ne s’en sont pas privées. Pouvez-vous nous expliquer ce choix ?
C.E. : nous ne communiquons pas trop sur le fait d’être une licorne car c’est très « show off ». Ce qui nous intéresse est d’atteindre nos objectifs de revenus et nous souhaitons réaliser un chiffre d’affaires de 1 milliard d’euros en 2025. Le seul avantage d’avoir une valorisation élevée est que cela vous permet de lever de gros montants de capitaux.
IN : comment expliquez-vous l’explosion récente du nombre de licornes françaises ?
C.E. : il y a actuellement énormément de liquidités sur les marchés. Les investisseurs sont à la recherche d’actifs et ce phénomène provoque une inflation de la valorisation des entreprises. La France profite également d’un effet de rattrapage par rapport aux pays anglo-saxons. Les investisseurs réalisent que ce que nous faisons ici est assez disruptif. Les marchés anglophones développent surtout des innovations marketing et d’usage alors que chez nous, les business-modèles que nous mettons en place sont plus complexes. C’est pour cela que nous commençons à voir de très gros investisseurs comme Tiger, SoftBank et General Atlantic arriver en France.
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