15 mai 2022

Temps de lecture : 3 min

Menart Fair, c’est le parcours d’une combattante, Laure d’Hauteville …

Laure D’Hauteville organise, du 19 au 22 mai, la deuxième édition de Menart Fair. Cette Foire internationale d’art moderne et contemporain dédiée aux artistes du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord avait l’habitude de se tenir à Beyrouth mais le chaos qui touche le Liban a forcé l’ancienne journaliste à rapatrier son événement en France. Pour l’instant… Parcours d'une combattante au service de l'art.

Son parcours ressemble à celui du pays qu’elle aime tant. Laure d’Hauteville a traversé tous les soubresauts du Liban. La guerre, la révolution, une explosion apocalyptique, la corruption généralisée, l’inflation galopante… Cette ancienne journaliste culturelle, qui a étudié l’histoire de l’art avant de travailler dans une galerie parisienne spécialisée dans les oeuvres des années 50, lutte sans relâche pour maintenir à flot la Foire internationale d’art moderne et contemporain dédiée aux artistes du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord qu’elle a créé il y a plus de 20 ans. Pour la seconde édition Menart Fair se tient dans l’Hôtel particulier de Cornette de Saint Cyr, 6 avenue Hoche, à deux pas de l’Arc de Triomphe. Dès qu’elle le pourra, Laure d’Hauteville retournera s’installer à Beyrouth. L’histoire est un éternel recommencement…

 

 

Lorsque cette passionnée et passionnante femme d’affaires a posé ses valises en 1991 dans la capitale libanaise pour suivre son mari banquier, elle a commencé à suivre le parcours « typique » de l’expatriée. « Nous étions constamment invités à des dîners avec mon ancien mari et pendant que les hommes parlaient finance, leurs épouses discutaient d’art, se rappelle-t-elle. L’art a toujours occupé une très grande place dans ce pays. La vie artistique ne s’est jamais arrêtée. Durant la guerre lorsqu’un quartier était bombardé, les galeries transféraient leurs œuvres sous les bombes pour les installer dans une zone moins dangereuse afin d’assurer leurs expositions. Au fil du temps, les femmes avec qui je parlais m’ont persuadé de fonder le premier salon d’art moderne et contemporain de la région. Mon idée était de faire un « one off » en 1998 mais Artuel a connu un tel succès que j’ai continué à organiser cet événement chaque année. »

Un bref passage par Singapour

En 2005, l’assassinat du Premier ministre, Rafiq Hariri, plonge le pays dans le chaos. Obligée de rentrer à Paris, Laure d’Hauteville rejoint l’équipe d’Artparis pour les aider à s’implanter au Moyen-Orient. En 2007 et 2008, elle fonde et pilote la foire Artparis-Abu Dhabi qui existe toujours sous le nom d’Abu Dhabi Art Fair.  En 2009, elle retourne au Liban pour créer et prendre la direction de Beirut Art Fair. Cinq ans plus tard, elle créé dans la Cité-Etat le Singapore Art Fair qu’elle cédera un an plus tard à ses partenaires locaux, ne parvenant plus à gérer ses multiples occupations.

A nouveau, le chaos

Le 10ème anniversaire de la Beirut Art Fair en 2019 est un succès énorme avec 36.000 visiteurs contre à peine 3500 lors de la première édition. Mais trois semaines après cet événement, la révolution éclate au Liban et le 4 août 2020, l’explosion sur le port de Beyrouth qui détruit tout le centre-ville de la capitale ainsi que ses musées et ses galeries d’art finit de jeter le pays dans la plus grande anarchie. La devise nationale s’effondre. Le cours de la livre libanaise passe de 1500 à… 26.000 pour un dollar. La corruption est partout. L’électricité est constamment coupée et le mazout se vend sous le manteau. Tous les avoirs des particuliers sont également bloqués par leurs banques. « Du jour au lendemain, j’ai tout perdu, résume Laure d’Hauteville. Je suis donc rentrée à Paris en 2020 en ayant l’impression que l’histoire se répétait quinze ans plus tard. J’ai toutefois utilisé le confinement à bon escient, car pour la première fois de ma vie, j’ai eu le temps de réfléchir à mon avenir. »

 

 

L’idée lui est alors venue de fonder à Paris une foire équivalente à celle qu’elle avait créée à Beyrouth. La première édition de Menart Fair se déroulait déjà au sein de l’Hôtel particulier de Cornette de Saint Cyr. En dépit des restrictions sanitaires, l’événement parvient à réunir 3600 visiteurs. 22 galeries originaires de 13 pays ont exposé leurs œuvres. Le succès a été tel que certains exposants ont choisi cette année de réserver des espaces plus importants. 18 galeries basés dans 12 pays ont ainsi prévu de présenter cette année les pièces de plusieurs de leurs artistes. Un espace important sera également consacré aux NFT, ces certificats numériques basés sur la blockchain qui s’échangent souvent en cryptomonnaie et qui ne peuvent pas être censurés par les gouvernements. 4500 curieux sont attendus, principalement des collectionneurs et des membres d’institutions qui souhaitent avoir un espace consacré à l’art moyen-oriental dans leurs musées. Menart Fair devrait encore rencontrer un joli succès cette année. Laure d’Hauteville l’espère tout en rêvant probablement de retourner un jour dans son Beyrouth chéri…

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