Le shopper est un être insaisissable et complexe. Prédire son comportement a toujours été « The Big Question » pour les marques, notamment celles de la grande consommation. Un challenge encore plus compliqué depuis la crise du Covid. 54% de nos concitoyens ont en effet affirmé qu’ils souhaitaient changer leur comportement d’achat de produits de grande consommation (PGC) révèle une étude réalisée par Kantar*. Des comportements qui s’expliquent également par de nouvelles habitudes de travail, tel que le télétravail qui gagne 10 points en France. De futurs changements qui pourraient s’avérer anxiogènes pour la plupart des industriels, puisque pour le shopper français, le mot « futur » ne rime pas vraiment avec « optimisme ». « 38% s’attendent à une baisse de leurs revenus dans les prochains 12 mois, contre 25% au Royaume-Uni et 28% en Espagne », précise Lionel Germain , expert global chez Kantar Worldpanel à l’origine de cette étude
Tandis que moins d’un Français sur 2 (47%) est optimiste sur les douze prochains mois, la même proportion (49%) déclare en effet ne pas être certaine que cela va s’arranger pour eux à la sortie de la crise sanitaire. Une situation qui pourrait paraître désespérée, mais qui, selon l’étude, cache des états d’esprit et des comportements disparates, qui vont dessiner le shopper post-pandémie. « C’est la compréhension fine de ces différences, mais également la prise en compte du poids de chacun des différents groupes de shoppers dans la clientèle des marques ou des distributeurs, qui permettra à ces derniers d’appréhender l’avenir et les changements qui vont se produire, de façon sereine et réfléchie », souligne Lionel Germain.
Sur la base du comportement d’achat réel issu des panels et d’une interrogation commune auprès de 25000 shoppers en France, au Royaume Uni et en Espagne, Kantar a défini quatre profils type de shoppers, du plus préservé au plus exposé aux tensions économiques. « Deux groupes sont particulièrement importants en France puisqu’ils pèsent plus de 60% des dépenses PGC », détaille Lionel Germain: les « pragmatiques » et les « vulnérables ».
1. « Les pragmatiques » / (« Realists ») : un groupe important dans la population française (notamment par rapport à l’Espagne et au Royaume Uni), puisqu’il pèse pour 33% des foyers et 34% des dépenses PGC.
- On y observe une sur-représentation de familles, de foyers aux revenus confortables, et de shoppers un peu plus jeunes que la moyenne nationale.
- Bien que la pandémie n’ait eu qu’un impact très modéré sur leur situation professionnelle et financière, ils ne semblent pas être convaincus qu’un avenir meilleur se dessine, avec seulement 53% d’optimistes à long terme.
- Leur comportement d’achat change également, et ils aspirent à plus de qualité, sont en recherche de Bio – qu’ils achètent déjà plus que la moyenne – et de produits locaux.
2. « Les vulnérables » / (« Vulnerable ») : ce groupe n’est pas marginal en France puisqu’il représente près d’1/3 des foyers et des dépenses PGC (32%).
- Leur profil est très hétérogène, puisqu’on y retrouve à la fois un mix d’actifs, de retraités et des personnes en recherche d’emploi. Ce sont ceux qui ont été le plus impactés par la crise tant au niveau de leur situation professionnelle que de leurs revenus.
- Très pessimistes quant à l’avenir, ils prévoient une détérioration de leur situation. Ils pensent que leur situation a toujours été compliquée, même avant la pandémie, et ne font confiance à personne pour les aider, ni aux marques, ni aux distributeurs.
- Leur intention de changement est très forte, et sans surprise très orientée sur la recherche de prix bas et promotions, ce qui va les pousser vers des achats plus importants dans les enseignes de discounteurs.
3. « Les préservés » / (« Safe Established ») : ils représentent 20% des foyers français et réalisent 19% des dépenses PGC.
- Ce sont très majoritairement des retraités qui n’ont pas de difficultés financières, et qui dans leur grande majorité n’envisagent pas une dégradation de leurs revenus suite à la crise. Par rapport à la population française, ils sont très logiquement plus âgés, et plus nombreux à vivre dans des foyers de petite taille (1 à 2 personnes).
- Ils sont globalement optimistes (59%), et ont confiance dans les industriels (marques et distributeurs) pour participer à la relance de l’économie, mais également pour booster leur pouvoir d’achat.
- Près de la moitié veut changer son comportement d’achat, avec une tendance plus qualitative, notamment le développement d’achats en commerces de proximité pour soutenir l’économie locale.
4. « Les combatifs » / (« Les Defying ») : ce groupe représente 15% des foyers et 16% des dépenses PGC.
- Il est en moyenne le plus jeune des quatre, il sur-représente également les familles, et dispose d’un revenu en ligne avec celui de la population française. Il est composé de shoppers pour lesquels les conséquences de la pandémie, que ce soit au niveau professionnel ou financier, sont un peu plus marquées.
- Une partie d’entre eux craignent que leur situation se détériore à l’avenir. Ils sont cependant plus optimistes sur le long terme (69%), et majoritairement convaincus qu’en définitive ils vont « s’en sortir » (74% vs 49% en moyenne pour la France). Ils ont également une confiance importante dans les marques et les distributeurs pour aider à la reprise économique du pays et développer leur pouvoir d’achat au passage.
- Ces shoppers ont une intention de changement un peu plus marquée que celle des 2 groupes précédents. Et elle devrait se concrétiser par un double axe qualitatif via le local, mais également une recherche de promotions et de prix bas, la contrainte budgétaire étant plus marquée dans ce groupe par rapport aux deux précédents.
Sur la base de ces quatre groupes, Kantar a développé un indicateur « score de risque », qui permet d’appréhender le niveau de changement et le risque associé pour une marque ou une catégorie. Il est construit à partir des réponses au questionnaire, du comportement d’achat issu du panel et des intentions de dépenses en liaison avec le poids de ces groupes d’un point de vue business sur une base foyer. De façon logique, plus le profil est typé « vulnérable », plus le score de risque sera élevé. « Cet indicateur aidera les industriels à se positionner face à leurs concurrents et à anticiper les actions prioritaires face aux changement à venir», explique Lionel Germain.
*Etude réalisée au printemps 2021 sur un échantillon de 25 000 shoppers en France, Royaume Uni et Espagne. L’échantillon est issu des panels Kantar Worldpanel. La personne interrogée est le responsable des achats PGC au sein du foyer
En résumé
4 groupes ayant chacun des attentes, un état d’esprit et des comportements différents. Mais également une appétence au changement différente qui sera mesurée via un indicateur dédié : le score de risque.