Les Romains (Romain Demongeot et Romain Foulcher) s’associent au collectif d’artistes Emmanuelle pour un clip qui a du chien: Yellow Books.
Un clip représentant nos relations avec notre meilleur ami. Jusque-là, rien de bien particulier, une histoire vieille comme le monde… Le chien, interactant privilégié de l’humain, a depuis longtemps contribué à expliquer le fonctionnement de celui-ci: de la théorie de Pavlov à la série Lassie, le toutou se présente comme grille d’interprétation des hommes dans leur quotidien.
Décryptage en trois temps d’un clip prenant l’axe historique à l’envers, pour nous raconter le passage de l’animal social vers l’animal primitif, ou comment passer de la distinction à la zoophilie.
Quand le mammifère domestique rencontre le mammifère primate…
Dès les premières notes, le clip nous montre de manière poétique, par plans simultanés, la rencontre entre l’homme et le chien. Au rythme de la musique, on est entraîné à découvrir ce rapport asymétrique et particulier entre l’homme-maître et le chien-esclave. Cette découverte se fait dans un univers enchanté, similaire au rêve: des hommes et des femmes semblant sortir tout droit du Seigneur des Anneaux, entourés de ballons, retrouvant leur fidèle compagnon. Un chien qui accourt vers son maître, un homme sur un canapé caressant son chien, une femme faisant un câlin à son toutou en recoiffant sa crinière. Si l’on retire le traité original esthétique et l’accoutrement des différentes personnes, pas de quoi faire aboyer un chien! Seulement, c’est loin d’être fini…
Le rapport fusionnel entre le chien et l’homme
La seconde rythmique du clip nous dévoile l’aspect charnel de la relation homme-chien, ici marquée par le mimétisme: les hommes adoptent la même posture que leurs chiens, ils miment l’expression de leurs gueules, ils sont à quatre pattes, ils hument leurs compagnons. Le mimétisme va jusqu’au vêtement, quand la peau de la femme s’habille de vison. On décèle de l’émerveillement, on perçoit de la tendresse, un maître qui se met au même niveau que son fidèle compagnon-esclave. Puis une femme retire son manteau, un homme aboie : c’est l’étape de thérianthropie, ils se libèrent, ils acquièrent réellement le même statut que leur acolyte. Cette mise en abyme de l’individu tend à nous montrer sa part d’animalité par un effet miroir avec son chien.
«L’homme est un chien, la femme est une chienne»!
Le morceau se termine sur la représentation de la déviance par excellence, la visualisation de l’interdit, bouleverser le cadre social et montrer l’inconcevable, des mâles et de femelles, des hommes dépourvus de codes sociaux, copulant avec des chiens! L’homme, au même titre que l’animal, suit ses instincts, plus de morale, plus de codes, plus de socialisation. La fin de la vidéo est l’image de l’expression «la femme est une chienne» car pour respecter les traditionnels clichés misogynes, les femmes donnent -bien sûr-davantage à voir dans l’acte sexuel…
Quand le collectif Emmanuelle clame sur son site que sa principale motivation est de «promouvoir l’excitation quelle qu’elle soit», le pari de l’excitation de l’œil est gagné, mais gratuit pour ce groupe de pop rock qui n’aura pas de mal à émerger avec ce clip où les images sexuelles déviantes piquent les yeux.
In fine, un clip qui buzze en nous montrant des scènes sexuelles très dérangeantes, même si on peut les trouver esthétiques, l’art de passer de l’amour à l’insulte, de la tendresse à la zoopholie…. Le doggy style a de l’avenir… Pourquoi Snoop Doggy Dog n’y a t-il pas pensé avant?
Karima Benamer
Planneuse stratégique digitale