Le téléphone portable fait déjà office de mouchard avec la géolocalisation et tous les services et innovations qui en découlent. Désormais il devient l’outil idéal de la «balance» qui dans sa quête de reconnaissance ou de nuisance n’hésite pas de tout temps à dénoncer, voire accuser des personnes sans réelles preuves…
En mars 2011, l’état du Kentucky lançait son application iPhone «Eyes and Ears» , promue par son département à la sécurité intérieure. Un an plus tard, c’est le voisin de la Virginie-Occidentale qui confirme l’utilisation des téléphones portables comme outil de prévention sécuritaire.
L’outil de dénonciation ou de délation, au choix, se nomme Suspicious Activity Reporting Application . Il est disponible sur App Store et Android Market et conforte le rôle du citoyen modèle américain dans la lutte contre le crime. Si son interface est très simple, l’application dispose de plusieurs volets.
L’utilisateur est invité à contacter 911 puis à activer la géolocalisation. Ensuite, et seulement ensuite, la caméra se met en marche. Le témoin peut ensuite affilier les informations relatives à l’image capturée sur son téléphone : nom, sexe, couleur de cheveux et des yeux, voire même la plaque d’immatriculation du supposé criminel ou terroriste en puissance.
Le crowd securing
Une fois envoyées, les informations filent dans les ordinateurs du West Virginia Intelligence Fusion Center, née du partenariat entre la police de l’état et le département fédéral de la sécurité intérieure, dépendant de la Maison-Blanche. Officiellement, l’application « permet à nos forces de l’ordre de mieux protéger les citoyens grâce à leurs propres informations », affirme dans un communiqué , le gouverneur de la Virgine-Occidentale. Le crowd securing serait-il né?
Suspicious Activity Reporting Application pose en tout cas deux questions: pourquoi dans cet état? Selon une étude publiée en février par l’université de Duke, la Virginie-Occidentale n’a pourtant jamais abrité la moindre activité terroriste de musulmans intégristes! A en croire une enquête de 2010 du Washington Post, elle fait même partie des 15 états américains à n’avoir jamais eu le moindre condamné pour terrorisme, quel qu’il soit.
Enfin, et surtout, la seconde interrogation repose sur la perniciosité de cette application. En ne requérant aucune preuve de crime, réel ou suspecté, elle ne protège aucune liberté civile. Rien n’empêche quiconque de faire ficher, pendant un temps qui n’a pas été défini, un voisin embêtant ou un ennemi intime devenu trop lassant. Souhaitons-nous vraiment ce type d’innovation en France ?
Benjamin Adler
Source : publicintelligence.net