Voilà ce que propose noir sur blanc le site Modamily.com, une plateforme de rencontre spécialement dédié à la coparentalité nouvelle génération.
Modamily pousse le pathos à son paroxysme. En jouant sur l’angoisse des individus et en mettant en avant la pression sociale liée à la parentalité, ce site de coparentalité semble avoir le cocktail explosif pour créer du trafic.
Le fonctionnement est simple : on s’inscrit comme sur un site de rencontre basique, chaque potentiel parent à une fiche d’identité et une case où il stipule ses critères de sélection. Modamily opère une rationalisation de la parentalité, tout simplement. Au même titre que faire sa liste de course, on organise sa parentalité 2.0 : accéder à la parentalité en un clic, le rêve de la working girl, bien évidemment !
Si aujourd’hui il est convenu que le lien parental a pris le pas sur le lien conjugal, il n’en demeure pas moins que la parentalité digitale pose des questions de fond et de forme, entre autres juridiques et sociales.
Modamily pourrait être une fabuleuse place de rencontre pour les individus souhaitant devenir parents et ne sachant pas par où commencer. Le fond de son commerce n’est pas déplorable, c’est la forme qui pose problème. Le ton employé par la plateforme profite des individus désemparés à qui on fait très clairement comprendre qu’à part le web, difficile pour eux de trouver un compagnon. Tout ça sur un fond d’images de personnes seules mais contentes de tenir dans leurs bras un nouveau-né…
Et pourtant, cette plateforme est au cœur des sujets d’actualité brulants. La question de la parentalité a bouleversé et continue à faire des ébats au sein du monde sociologique. Les nouveaux ressorts de la parentalité sont un sujet complexe et polémique et cette plateforme est une belle piqûre de rappel. D’ailleurs, le sociologue François de Sigly spécialisé dans la famille n’hésite pas à souligner : «L’avenir de la famille est ouvert, étant donné sa capacité de changement, prouvée par les trente dernières années de ce siècle.»
Nous sommes dans une société du «co», après le co-voiturage, le co-shopping, la co-création, place à la co-parentalité exclusivement sur la toile. Internet a donné la fabuleuse impression que tout se partage, rapidement, efficacement et sans grand effort. Alors pourquoi pas un enfant ?
Ce réseau de rencontres co-parental, venu tout droit d’outre-atlantique pointe un véritable problème d’éthique lié à internet : quelles sont les limites du partage digital, pouvons-nous tout modeler sous couvert de simplicité? Et le modèle des parents désunis est-il un exemple à suivre ou a défendre sous prétexte d’émancipation culturelle et sociale?
Karima Benamer