Pour la 40ème édition du salon Emballage, l’Institut Français du Design a conçu une exposition « I love pack since 1947 », qui raconte les innovations majeures et iconiques qui ont contribué à faire évoluer la société, changé nos vies, nos modes de consommation et nos habitudes d’achat. Chaque semaine INfluencia leur offrira un coup de projecteur. Aujourd’hui les années 60.
« Since 1947 », l’exposition, dont la scénographie est conçue par l’agence Dragon Rouge, et qui aura lieu du 19 au 22 novembre, commence à l’époque de la Reconstruction, période de la création du salon, et montre un déroulé dans le temps dont les repères socio-culturels éclairent la sélection. Un comité scientifique créé par l’Institut Français du Design (auquel participe notamment l’experte internationale en emballage Annette Freidinger) a permis d’établir une sélection dans tous les univers de consommation.
Dragon Rouge mettra en scène 8 décennies d’innovations majeures, présentant des pièces d’origine (sorties de musée !). Dans le même esprit que l’événement « INOVI, ces marques qui changent nos vies », Anne-Marie Sargueil, commissaire de l’exposition, a demandé à l’historien Jean Watin-Augouard de raconter les marques dans leur contexte socio-culturel, leur ancrage dans la société de consommation et la dimension visionnaire de leur innovation.
J’en ai toujours un dans mon sac: Bas en chapelet Dim
Bonnetier à Troyes, Bernard Giberstein s’est lancé, depuis 1958, dans la production de bas. Il leur a donné pour nom « Le bas Dimanche ». Raison avancée : « Je veux donner à mes produits de tous les jours un air de fête ». Le slogan est alors « Le Bas Dimanche vendu à l’unité ». En 1962, il invente un bas révolutionnaire, le bas sans couture.
Mais en 1965, les ventes n’ont toujours pas décollé. « Enlevez le manche et gardez le Dim », suggère Marcel Bleustein-Blanchet, président de Publicis. Nous sommes en 1965. Le succès est au rendez-vous. L’année suivante, DIM propose des bas vendus à l’unité en chapelet, dix bas pour dix francs. Pour éviter aux femmes de devoir racheter une paire en cas de filage d’un seul bas, cette innovation permet de glisser dans leur sac un bas de secours.
Ma robe est argentée et plissée: Boursin
C’est pour concurrencer Boursault que François Asperti-Boursin lance, le 21 janvier 1961, le Boursin « Ail & Fines Herbes ». Présenté dans un emballage en aluminium – « sa robe argentée » – avec un étui en carton, ce cylindre de 150 grammes surprend par sa modernité. Le choix de l’emballage est motivé par le souci de conservation et le souhait de faire voyager le produit ! Grâce à une méthode unique, dite de moulage à froid, le fromage reste ferme et conserve ses qualités gustatives et nutritives.
Il rentre dans la légende publicitaire en 1972 sous la forme d’une assonance avec le slogan « Du pain, du vin, du Boursin, c’est divin ! ». Il sera sacrifié sur l’autel de la loi Evin, en 1999. Si certains le trouvent peu pratique, les consommateurs restent attachés au geste de déshabiller la « robe argentée » de leur Boursin. Il obtient le label Beauté Industrie, décerné par l’Institut Français du Design (rebaptisé Janus) en 1962.
Je le vaux bien, je suis une bombe: Elnett
C’est sous la bannière L’Oréal Parfumerie qu’est lancée en 1958 la laque Oréol Net chez les coiffeurs, qui devient Ellenett puis Elnett en 1960 (contraction de « elle » et « nette »). Cette laque est révolutionnaire pour trois raisons. Accessibilité car les femmes peuvent utiliser chez elles des produits cautionnés par une marque déjà appréciée chez leur coiffeur. Commerciale quand la marque franchit le seuil des parfumeries et grands magasins en attendant les hypermarchés. Technologique, enfin, par la manière de fixer les coiffures autrement que par la brillantine ou la gomme-laque : Elnett contient des polymères anioniques plastifiants qui disparaissent « au plus léger brossage » quand les produits existants contenaient des gommes-laques, difficiles à éliminer.
En 1962, Elnett Satin est commercialisée dans un packaging « brossé or ». En 1968, la micro-diffusion, brevet déposé par L’Oréal, permet une répartition encore plus fine et uniforme de la fixation, et une élimination au plus léger brossage. Elnett s’adapte aux attentes des femmes avec Allurelle Elnett, une laque plus souple en 1975, Elnett Fixation Extra-forte en 1988, Elnett Flexible en 1998… Plus de deux milliards de bombes de laque Elnett ont été vendues depuis 1960, et la marque est aujourd’hui présente dans cent pays.
Jean Watin-Augouard