Que ce soit pour la sécurité routière, contre le tabagisme ou contre les violences physiques faites aux femmes, les campagnes choc ont déjà prouvé leur efficacité. Pour lutter pour la préservation de la vie marine, faudrait-il donc, là encore, frapper les consciences pour remuer les esprits ?
« Jusqu’à ce qu’ils puissent se défendre, nous le ferons pour eux ». Le slogan de la dernière campagne global de la Sea Sheperd est éloquent. Mais l’ONG américaine a voulu accoler à ces mots déjà trébuchants des images fortes et choquantes. Le combat pour la conservation des océans et la protection des espèces marines prend une nouvelle tournure : fini le dialogue de la persuasion et la diplomatie de la conscientisation, place désormais au combat.
Dans sa dernière guérilla publicitaire contre le zèle suicidaire de la pêche de baleines, de requins et de dauphins, la Sea Sheperd Conservation Society prend les armes et franchit un pas dans sa stratégie agressive : avec la même philosophie que la marque californienne « Arm The Animals », l’ONG internationale réintroduit les armes dans la communication engagée et militante.
Si la Sea Sheperd est coutumière de campagnes offensives (exemples ici ou là) à faire passer Greenpeace pour des formalistes un peu trop tendres, elle a cette fois usé des sentiments pour sensibiliser le public sur les conséquences de la surpêche. En harponnant notamment un ours polaire et un pélican, deux espèces plus ancrées dans l’affectif du grand public, l’organisation déploie un message clair : en tuant trop de poissons, on assassine aussi ceux qui s’en nourrissent. Cette stratégie sera t-elle payante ? Un long métrage comme « Les Seigneurs de la Mer » ne se révèle-t-il pas plus efficace pour toucher le citoyen ?
Une chose est certaine, le jeu de la provocation en vaut la chandelle. Selon Greenpeace, 80% des stocks de poissons sont surexploités ou à la limite de la surexploitation. Les ressources de la mer s’épuisent et le risque de vider nos océans d’ici 2048 est crédible si rien ne change rapidement. Chaque année plusieurs dizaines de milliers de cétacés dans le monde sont pris accidentellement dans les filets de pêche qui dérivent avec les courants et la plupart des études estiment que le nombre de requins tués pour leurs ailerons serait de 38 à 100 millions chaque année dans le monde entier. L’Union européenne a publié le chiffre de 800 000 tonnes/an en 2008, dont 100 000 tonnes/an essentiellement pêchées en mer du Nord, Atlantique nord-est et eaux norvégiennes, mais aussi en Atlantique centrale, Océan Indien ou Pacifique par des bateaux européens.
Benjamin Adler / @BenjaminAdlerLA