5 novembre 2013

Temps de lecture : 3 min

La TV : un bon vecteur pour démocratiser la culture ?

Face à la pression de l’audience, les émissions culturelles «classiques» ont dû se renouveler et adopter des formats plus ludiques et novateurs. Une culture qui évolue et qui s'impose comme incontournable. Décryptage dans la Revue INfluencia N°7 : la culture : une invitée de(s) marque(s)

Article paru dans la revue N°7 d’INfluencia sur La Culture

La télévision est un vecteur clé pour faire entrer la culture dans les foyers. Même s’ils ont une vision assez protéiforme de la culture – des retransmissions de spectacles aux fictions historiques en passant par les magazines de découverte – les Français sont pourtant nombreux à préférer regarder un divertissement ou une série américaine plutôt qu’un opéra, une pièce de théâtre ou un concert… Les émissions culturelles stricto sensu ont progressivement migré en deuxième, voire en troisième partie de soirée. Même les grandes fictions patrimoniales laissent souvent leur place à des séries contemporaines, plus compatibles avec les contraintes budgétaires du moment. Si tous ceux qui se sont émus de la disparition de « Taratata » ou des « Mots de minuit » avaient véritablement regardé ces émissions, auraient-elles été supprimées de la grille de France 2 ? Trop tard…

Alors que l’audiovisuel privé donne surtout dans le divertissement, les chaînes publiques continuent d’investir dans des formats variés pour montrer les œuvres, porter à la connaissance du public l’actualité de la création ou l’inciter à s’adonner à une pratique culturelle. N’en déplaise à certains puristes, c’est par la télévision que bon nombre de téléspectateurs ont découvert l’œuvre de Maupassant. Canal Plus, premier partenaire du cinéma, a réalisé des records d’audience en fiction avec « Borgia », une série historique de facture peu académique. Le 14 juillet dernier, près de 2,8 millions de téléspectateurs ont vibré sur les airs classiques du « Concert de Paris », diffusé par France 2 en direct de la tour Eiffel. Bien plus que les opéras diffusés par France Télévisions ! Avec 500 000 à un million de téléspectateurs en troisième partie de soirée, ils drainent toutefois un public sans commune mesure avec le nombre de spectateurs qui assistent aux mêmes opéras dans des salles de concert.

Sélectif ou fédérateur

Pour les événements diffusés plus tôt dans la soirée, le groupe public se tourne vers des projets plus fédérateurs, comme le « Concert de Paris », « Musique en Fête » ou la Fête de la Musique à Marseille. « Aujourd’hui, les Français ont un choix de programmes et d’écrans tellement important que nous ne pouvons pas exposer à 20h45 des programmes qui risqueraient de n’obtenir que de toutes petites audiences. Ce serait un très mauvais service à rendre aux créateurs et à la légitimité de nos missions car elles sont financées par toute la collectivité », affirme Frédéric Olivennes, directeur de la communication externe et du marketing image de France Télévisions. Ce qui ne trouve pas sa place sur les antennes est proposé sur le numérique grâce à Culturebox, où les droits sont négociés pour des périodes longues.

En tant que chaîne culturelle, Arte peut diffuser des projets plus pointus, qu’elle fait circuler sur ses différents écrans à la télé, en catch-up et sur ses plates-formes numériques où les spectacles restent accessibles gratuitement en moyenne six mois. Inversement, certains concerts classiques proposés dans leur version intégrale en preview sur Arte Live Web, sont remontés pour un visionnage dans une version courte en télé. « La chaîne concentre l’essentiel des investissements mais Arte Live Web et Arte Créative permettent d’exposer des créateurs moins connus ou plus contemporains », note Emelie de Jong, directrice de l’unité Arts et Spectacles d’Arte France.

Effet buzz

La programmation est une autre clé d’entrée. « L’attractivité se trouve renforcée quand un événement entre en résonnance avec une actualité patrimoniale et que l’émotion du direct peut être complétée par d’autres programmes », poursuit-elle. La soirée organisée autour du centenaire du Sacre du Printemps en mai (en direct du Théâtre des Champs-Elysées, complété par un documentaire et une autre version du ballet) a dépassé les espérances d’Arte sur l’ensemble des canaux.

Tous ces efforts contribuent-ils pour autant à éduquer à la culture au-delà d’un cercle d’avertis ? « La télévision est un média ludique et rapide, pas très adapté a priori pour la musique classique. Les retransmissions d’œuvres classiques ne servent pas à grand-chose pour les non-initiés », estime Jean-François Zygel. Dans ses émissions « La Boîte à musique » et « Les Clefs de l’orchestre », il ne propose donc que des extraits : « On peut ainsi prendre le temps d’expliquer comment fonctionne une œuvre, comment fonctionne un orchestre, montrer qu’un opéra peut être la chose la plus passionnante qui soit. »

Nouvelles écritures

« Pour demeurer un vecteur de démocratisation de la culture, la télévision publique doit impérativement renouveler et multiplier les formes d’écriture audiovisuelle. C’est par exemple notre ambition avec l’émission musicale Alcaline », affirme pour sa part Frédéric Olivennes. Les captations se font de plus en plus dynamiques. Fin 2013 sur France 2, les artistes de La vie parisienne d’Offenbach chanteront en direct de différents endroits de Paris en suivant par écran interposé la baguette du chef d’orchestre. Arte, qui développe une approche détournée et ludique de la culture, notamment pour sa programmation du dimanche, a aussi travaillé sur le théâtre fictionné, tourné en décor naturel. C’est ainsi que Roméo & Juliette ont quitté Vérone pour les carrières du Midi de la France…

Christine Monfort

Retrouvez ici l’interview de Jean-François Zygel dans la revue digitale d’INfluencia sur La Culture

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