L’éloge de la paresse… est un talent communément attribué -à tort ou à raison- aux Français notamment par les Américains, réputés eux, pour leur addiction au travail. Alors plutôt que de se battre contre ce mythe, deux Françaises, persuadées que « lazy is the new cool » ont décidé de tourner à leur avantage cet art de vivre à la française. Pour en faire justement un business productif mais respectueux de l’environnement et de l’humain au pays de l’oncle Sam ! Ingrid Vierne, la financière et Babette Auvray-Pagnozzi, la publicitaire, vont en effet lancer, d’ici la fin de l’année, dans le hippie et néanmoins huppé quartier de Mission District à San Francisco, leur provocateur : Paresse Café. Là, dans ce joli endroit de Valencia Street, les clients seront assis uniquement dans des hamacs (de taille différente) autour de tables/aquariums qui accueilleront toutes sortes de poissons tropicaux multicolores mais tous sauvés et adoptés !
Le « break » à la française : très (ré)créatif et productif
« So What ? », son slogan entre ironie et humour également, renforce le ton de la promesse : un lieu glamour et reposant pour permettre une déconnexion totale de la frénésie citadine et professionnelle, et une pause bien méritée pour se sentir mieux et travailler, ensuite, avec plus d’efficacité.
Plutôt osé d’offrir aux Américains comme des mini vacances à la plage et de les télé transporter dans une autre façon de vivre que celle de boire son soda et de manger son hamburger en marchant jusqu’au prochain rendez-vous. Même très culottée cette petite récréation au cœur de la ville qui ne leur parle que de bio, de bon, de local, d’art food, de recyclage, de respect de l’environnement et de l’humain. Tout en les invitant à un laisser-aller complet physique et culturel avec des ateliers cuisine et des massages de la nuque aux épaules. Ainsi qu’à travers la découverte de musiciens, de photographes, de sculpteurs, de peintres ou d’écrivains (français, autochtones ou étrangers) invités à la semaine ou au mois pour jouer, exposer et commercialiser librement leurs œuvres. « L’intérêt du projet est qu’il cherche à innover sur tous les plans pour révolutionner l’industrie du café », explique Ingrid Vierne dans sa présentation « de plus la « french touch » sera rappelée à plein d’endroits grâce aux artistes que nous recevrons et aux plats ou boissons qui feront découvrir de façon ludique et souriante notre gastronomie ».
Autre détail et de taille : son aspect solidaire et social. Car Paresse Café -qui publiera ses comptes- fera travailler les fermiers du coin, leur garantira un prix équitable, les laissera livrer gratuitement les paniers de fruits et légumes commandés par les citadins/voisins du café et reversera en fin d’année, une part de ses bénéfices à des associations locales qui participent au bien de la communauté mais en quête de subsides.
Un projet solidaire jusque dans son financement : le crowdfunding
On croit rêver ! Mais bien qu’idéal(iste) ce lieu peu commun de partage est bien ancré dans le concret. Tout d’abord, son business plan a été suivi par Score/Small Business et les partenariats avec ses fournisseurs (matériels, fruits, légumes…) sont presque tous ficelés. Sa promotion est déjà lancée via un logo, un site, un film drôle tourné avec les moyens du bord, une page Facebook et les réseaux sociaux.
Enfin, son financement passe par lecrowdfunding car comme le souligne Babette Auvray-Pagnozzi : « pour parler d’humain, mieux vaut faire appel aux humains. Et à leur générosité. Ce sont des gens comme vous et moi, des personnes qui ne sont pas obsédées par le profit qui sont plus sensibles à un projet qui se fonde sur le respect, le vrai, l’organisation horizontale et la transparence ». Un discours et un plan de communication qui marchent car non seulement la presse en parle mais en plus la campagne de levée de fonds lancée depuis quelques jours sur Indiegogo a déjà séduit plus de 2600 personnes.
En échange chacun d’entre eux, selon sa contribution, a reçu une récompense sous la forme d’un mug, un verre, un sac, un T-shirt, un hamac ou même un voyage à San Francisco… « Mais il aura surtout la satisfaction d’avoir contribué à l’émergence d’un projet créatif, humain, osé et très frenchy qui serait sinon tombé à l’eau ou… de son hamac », souligne B. Auvray-Pagnozzi « et chacun aura réalisé son rêve américain, par personne interposée ». Un rêve qui, s’il se concrétise avec succès, fera des petits notamment à Paris.
Florence Berthier