4 août 2014

Temps de lecture : 3 min

La culture gaming adoptée par les marques

Gamification, ludification… que veulent dire pour les marketeurs ce goût permanent du jeu et cette culture de la compétition ludique ? En ligne ou sur plateau, dans la vie ou dans des opérations trans-médias, les fameuses « OP Spé », le jeu est devenu un mode de communication incontournable. Décryptage par la PQR 66 dans son dernier rapport "Françaises, Français", baptisé (R)évolutions.

Le jeu a quitté le registre simple du divertissement pour se constituer en mode d’interaction entre les individus. Entreprises, marques, institutions, associations ont parfaitement saisi ce bouleversement et s’emparent alors du jeu comme puissant levier d’implication, d’engagement et de conversion. Selon le site webmarketing.com : « la ludification est ainsi le transfert des mécanismes du jeu à d’autres domaines, avec pour but, en rendant les actions plus ludiques, d’augmenter leur acceptabilité et l’engagement des personnes qui y participent. Ce processus de gamification permet ainsi d’obtenir des personnes des comportements que l’on pourrait considérer sans intérêt ou que l’on ne voudrait ordinairement pas faire, comme par exemple remplir un questionnaire, acheter un produit, regarder des publicités ou assimiler des informations. »

Le jeu, puissant levier d’engagement…

Le jeu renouvelle les formes de participation citoyenne à la vie politique et associative. A Grenoble ou à Rennes, des associations utilisent le jeu théâtral pour sensibiliser à la dénonciation des discriminations raciales et sexistes. Sur le modèle latino-américain du Théâtre de l’Opprimé, ce théâtre forum met en scène des histoires vécues et réelles de discriminations. Les spectateurs ont la possibilité d’en arrêter le déroulement quand ils le désirent pour intervenir sur scène et jouer leur manière de modifier la situation, en remplaçant l’opprimé ou en devenant un de ses alliés. Une forme d’entraînement avant de s’engager dans la « vraie vie ». Les « role play » éducatifs et citoyens sont en plein développement et les exemples fourmillent. A Lille, une association d’éducation populaire promeut dans les écoles « Backstagegame », un jeu qui transforme les jeunes en managers de projet, en leur faisant gérer tous les enjeux de production d’un concert. Une manière ludique de les insérer dans les règles du monde du travail et de leur donner envie, comme le dit la promesse du jeu de « renouer avec leur radioréveil ».

Très utilisé par les professeurs d’histoire géographie, le jeu Third world farmer permet lui de sensibiliser les élèves aux difficultés de l’agriculture vivrière et des petits paysans dans les pays en développement. Pour faire passer son message, et inciter les 18-25 ans à se former aux gestes qui sauvent, la Croix rouge n’a pas hésité à utiliser dans sa dernière campagne l’univers et l’esthétique du célèbre jeu vidéo Grand Theft Auto. Elle s’est inspirée du langage, des mots et des codes mêmes des gamers. Avec, sur un écran divisé en deux colonnes, à gauche, la version pour les connaisseurs (« En cas de crash, le rôle du premier player sur la map est fondamental pour éviter un wipe »), et à droite, sa traduction en français (« En cas d’accident, le rôle du premier témoin est fondamental pour éviter le sur-accident ».) Signe de l’air du temps, l’association Animafac refuse de se placer « dans une démarche moralisatrice ou imposée » pour promouvoir l’engagement associatif. Elle privilégie donc la forme ludique pour valoriser le bénévolat, au moyen, cette fois d’un jeu de société classique « chacun son asso », avec plateau et pion, où les joueurs sont amenés à se mettre dans la peau d’un militant associatif.

Sensibilisation, mobilisation : dans la démocratie 2.0, le gaming s’offre comme nouveau levier pour revitaliser les formes de participation citoyenne à la vie collective. Et contribue du coup aussi à « ludifier » la politique : pendant la campagne électorale de 2012, la quasi-totalité des grands sites d’information proposait ainsi aux internautes de multiples jeux et quizz pour savoir pour qui voter et vérifier si leur choix était en adéquation avec leurs convictions. Comprendre aussi le mécanisme de report de voix avec la petite application de la Fondation pour l’Innovation politique.

…et de conversion ensuite

Le gaming publicitaire s’impose aujourd’hui comme stratégie de marques et comme arme de conversion. L’essayer, c’est l’adopter ? Pour le lancement de sa nouvelle Juke Nismo, Nissan permet au consommateur d’essayer le modèle… en jouant sur son téléphone. Chaque joueur de l’ultra populaire Asphalt 7 a la possibilité de tester la nouvelle voiture en la conduisant virtuellement, via l’écran de son téléphone. Ce nouveau modèle plutôt sportif se retrouve héros d’un jeu dans lequel sa dynamique et ses performances sont méticuleusement transposées : une manière « tendance » de toucher les fans de conduite. Coca et Sony ont lancé il y a quelques mois Coca-Cola Zéro All Stars Island, qui promeut des jeux gratuits, inspirés par des héros de la Playstation 3, sur smartphone et tablette, avec sur chaque interface une publicité pour la célèbre boisson.

Rendez-vous la semaine prochaine pour découvrir les autres innovations recensées par PQR 66 et présentées dans le rapport « Français, Françaises, etc. »

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