Le changement c’est bien mais changer c’est mieux ! Il serait temps de passer de la parole à l’acte. Et pour cela, commencer par connaitre les desiderata des Français serait un bon début. C’est ce que propose L’atelier CSA dans sa dernière étude : « Français, si vous réinventiez la France ? ».
Qu’il s’agisse du mode de vie, de la politique ou bien encore de la stratification sociale, les Français aspirent à un réel changement. Pourtant, derrière cette volonté affichée de réinventer notre nation, se cache une foule de sentiments exacerbés avec le temps. De la nostalgie d’une France fantasmée par la plupart des Français au refus d’une globalisation destructrice de valeurs économiques sur notre territoire, l’hexagone aspire à un monde meilleur qui, en raison d’une grande diversité culturelle, tarde à pointer son nez. L’atelier CSA apporte à travers son étude un éclairage sur les pensées françaises et la compréhension d’un des peuples les plus complexes au monde…
Un souffle de créativité et d’innovation
Libérer les énergies est devenu une condition sine qua non pour les forces vives. La créativité (94%) et l’innovation (91%) sont, avec la famille (94%) et la liberté (94%), le quatuor de tête des mots qui évoquent quelque chose de positif pour les Français. Un renouveau qui est soutenu par l’envie pressante d’assouplir le marché de l’emploi (45%) sans pour autant renier le volet social du modèle à la Française. Même le temps de travail, si précieux, doit être allongé pour un Français sur deux. L’entreprise quant à elle est en phase de réhabilitation avec huit interviewés sur dix qui la jugent désormais de manière positive. Un chiffre intéressant qui montre une envie grandissante d’entreprendre et prouve qu’une confiance pour le « made in France » alimente cette aspiration à être acteur plutôt que spectateur du développement économique de la France.
Un désir de changement puissant et radical
Sur les 2000 personnes interrogées, 87 % voient le changement comme une notion positive. Le besoin de réforme arrive en deuxième position avec 75% des suffrages, tandis que la révolution arrive en bonne place avec 57%. Il est même rassurant de voir que malgré la sécurité de l’assiette pleine et l’espoir de pouvoir s’acheter un écran plasma, nos concitoyens gardent en eux leurs origines révolutionnaires. Et le mouvement unique au monde du dimanche 11 janvier a démontré que descendre dans la rue resait, pour eux, d’une facilité déconcertante…
Les choix de nos différents gouvernements, jugés très sévèrement, motivent aussi et sûrement ce besoin d’un changement profond. 89% des sondés désapprouvent la gestion des finances publiques et ils sont même 82% à mettre en cause le développement économique mené par nos hommes politiques. Le logement, avec 74 % d’opinion négative, est lui aussi beaucoup critiqué… Seuls le système de santé avec 57% de bonne opinion et les affaires étrangères (54%) trouvent grâce à leurs yeux… peut-être par tradition!
Les 5 rêves français
L’étude découpée en 5 « fantasmes » permet de découvrir les aspérités de nos compatriotes. Tout d’abord, « Le Rêve scandinave » (30%) nous mènerait vers une France pragmatique protégeant et valorisant la créativité. Certes, cette vision pourrait être intéressante mais elle ne prend pas en compte l’aspect social diversifié et les enjeux de notre société. Un modèle qui s’applique très bien à des petits pays mais plus difficilement en France.
Grandeur et nostalgie obligent : « le rêve de la France d’avant » (27%) demeure très présent. Il s’agit, dans ce cas précis, d’une nation qui protège et maintient l’ordre établi. D’une forte envie de revenir au Franc, d’instaurer le droit du sang ou encore de rétablir l’uniforme à l’école. Une France qui rassure et qui pourrait trouver un écho au-delà des conservateurs.
« Le rêve du village global » (18%) met en avant une France qui protège, s’ouvre au monde et prône la fraternité. Etonnamment, c’est un idéal voulu par la génération des 50/64 ans. L’idée principale est avant tout d’aménager le modèle français plutôt que de le transformer ou le réformer. Les solutions viendraient de la France et non reprises d’un autre pays ou d’une culture différente. Une version 100 % Française mais ouverte sur le monde.
« Le rêve anglo-saxon » (18%) est sûrement celui qui nous pend le plus au nez. Car dans cette lutte culturelle et idéologique, la partie est loin d’être gagnée. Surtout que cette idée est prônée par les cadres et les milieux aisés, pour résumer, ceux qui ont un vrai pouvoir de décision. Des profils qui veulent profondément transformer la France avec une liberté d’action exacerbée et un « laisser-faire » omniprésent.
Et en dernière position on trouve un rêve pour le moins, au-delà du nom, surprenant : celui du « Paris-Dubaï-Shanghai-Vegas » (7%). Un modèle très opportuniste basé sur les marques, la publicité, le capitalisme et la mondialisation. Le libéral dans toute sa splendeur où les collectivités seraient désengagées de tout… Ce sont les moins de 25 ans qui le défendent, c’est-à-dire la génération élevée aux mamelles du numérique et qui un jour sera au pouvoir… Wait and see…
Je t’aime moi non plus
Preuve d’un réel désaveu, le mot France évoque pour 41% des sondés quelque chose de négatif. Un chiffre fort et douloureux sur ce que représente aujourd’hui la République dans son ensemble aux yeux d’une grande partie des Français. Et le résultat de cette désaffection amènerait un citoyen sur quatre à quitter le pays. Une donnée qui peut paraitre pessimiste mais qui pourtant bien gérée pourrait être un véritable atout pour notre économie. Car quid d’une émigration organisée dans certains pays pour donner un nouveau dynamisme au rayonnement français ? Et si le changement venait de l’étranger, des pays francophones ? La France n’a jamais été aussi forte que lorsqu’elle était globalisante.
La tentation d’un retour en arrière
La machine à remonter le temps à la côte comparée à celle qui envoie dans le futur… Ils sont 54% à vouloir faire machine arrière pensant qu’hier sera mieux que demain contre 44% à se tourner vers le futur… Mais encore une fois de quelle France parlons-nous ? Des Trente Glorieuses ou de la Belle Epoque ? Ou peut-être des Années Folles ? Car, étonnamment, ce sont les 35-49 ans (60%) qui cherchent des valeurs du passé pour construire notre avenir.
L’esprit de laïcité n’a, quant à lui, jamais été aussi fort. Il est même sacralisé pour 71% d’entre nous et vu comme une notion positive pour 82%. Le rejet des dogmes et des religions est omniprésent. Le gaullisme qui peut être considéré comme un dogme est en revanche épargné avec 61 % de personnes favorables tout comme le libéralisme qui vit des heures joyeuses dans notre pays (55% d’avis positifs). En revanche, le capitalisme, le communisme, les religions monothéistes ou bien encore les partis politiques sont à bout de souffle et doivent sérieusement penser à se réformer sous peine d’être éjecter de la partie… On dira que « c’est le jeu ma pauvre Lucette ».
Mais la priorité des priorités est de changer l’élite politique (25%) devant la vie économique (20%), l’emploi (15%) et la fiscalité (9%). Et pour 63%, il faut désormais gérer le jeu politique comme une entreprise. Un bon pied de nez aux énarques, énormément décriés et qui sont surtout formés pour mettre de l’huile dans la machine, donc entretenir un système plutôt que de le changer. Ce chiffre indique aussi l’envie que la société civile s’implique dans les affaires de l’état.
Tout changer mais préserver l’essentiel
Un état fort, un modèle social qui protège et des valeurs qui font la République. Le socle d’une France conquérante voulue par son peuple ! L’interventionnisme reste ancré dans l’esprit des Français (78%) qui désirent voir leur état garant de la sécurité, de la justice et d’une bonne protection sociale. Les grandes orientations économiques doivent aussi dépendre de la nation (51%).
Cependant défendre une telle politique ne veut pas dire un état centralisé. La décentralisation reste en tête de gondole avec 56% devant un état fédéral (27%) composé de plusieurs entités autonomes. Un modèle qui doit aussi privilégier la proximité grâce à un territoire organisé en grandes régions (36%) et en départements (48%). Une organisation qui pourrait voir des pans entiers du territoire revendiquer une puissante autonomie voire une indépendance qui morcellerait le pays.
Une chose est sûre notre nation est belle et puissante. Notre culture est forte mais nos compatriotes névrosés ! Que cela soit une entreprise, une marque, un média ou bien un parti politique, tous ces acteurs vont devoir redoubler d’écoute et surtout lire entre les lignes pour mener notre pays et lui trouver une place de choix dans les décennies à venir…
Cliquez sur le lien pour accéder à l’intégralité de l’étude : atelier-csa-2014.pdf