21 octobre 2015

Temps de lecture : 3 min

Les adblockers peuvent-ils devenir les alliés des annonceurs ?

En pensant fuir la pub, une partie des utilisateurs d’AdBlock se retrouvent bien malgré eux être aujourd’hui une cible pour les annonceurs. Analyse d’un paradoxe qui finalement n’en est pas un.

En pensant fuir la pub, une partie des utilisateurs d’AdBlock se retrouvent bien malgré eux être aujourd’hui une cible pour les annonceurs. Analyse d’un paradoxe qui finalement n’en est pas un.

« Straight Outta AdBlock », c’est l’histoire imaginaire du logiciel anti-pub le plus dangereux du monde… publicitaire. Sa bande annonce à la Wes Craven noue les estomacs des créatifs et des marketeurs. Imaginez : sur un fond sonore angoissant, un consommateur allume son ordinateur et ouvre son navigateur. Il est jeune, arbore les signes extérieurs du geek cool, le noir de sa chambre à coucher est pesant, la lumière de son écran illumine son visage comme un miraculé de Lourdes. Dans sa barre d’adresse il rentre un lien url. Derrière ses lunettes de hipster, ses yeux se fixent sur la page web. Soudain, un agacement, l’atmosphère musicale s’assombrit. Une pub vient déranger la lecture, la réplique de l’internaute est immédiate. Il télécharge AdBlock. Les violons deviennent stridents : le tueur en série de revenus publicitaires a encore frappé ! Pourtant pour certaines marques, les victimes du nouvel ennemi « public » ne sont pas des consommateurs irrécupérables. Ils constituent même une nouvelle cible.

L’idée de convertir l’internaute délibérément vacciné contre la pub c’est un peu le fantasme du prosélyte adoubant son converti. Sur le papier, le défi a du sens. Le portrait-robot de l’utilisateur d’AdBlock peut logiquement attirer des marques : masculin, millennial, très branché nouvelle technologie. Pour les concepteurs de jeu vidéo, ce consommateur ressemble à l’anneau unique pour Gollum. En pensant se débarrasser des annonceurs, cette cible là ne fait en réalité que la séduire encore plus. Fuis moi, je te suis, suis moi, je te fuis. « Nous avons anticipé depuis longtemps le fait que les logiciels de blocage empêchent les annonceurs d’atteindre leur cible. C’est ce qui est en train de se passer et les agences qui représentent les marques de jeu vidéo commencent à sérieusement chercher un moyen de marketer ces utilisateurs d’AdBlock », explique Sean Blanchfield, CEO de PageFair, dans un article très intéressant publié par Digiday. En fournissant les outils technologiques pour contourner le blocage, PageFair vit de l’aversion populaire à la pub. Dans sa récente étude conjointement menée avec Adobe, les chiffres peuvent faire paniquer les marques : en 2015, le blocage publicitaire a gagné 41% d’adeptes dans le monde et va faire perdre presque 20 milliards d’euros à l’industrie de la pub. Si les supports mobiles sont encore épargnés, les médias sociaux et le gaming sont les principales victimes.

Le défi ? Ne pas déranger

Interrogée par Digiday, Laura Mete Frizzell, directrice générale de l’analytique et du média chez l’agence de marketing digitale 360i, estime que les annonceurs « doivent trouver les moyens d’atteindre ces consommateurs en respectant la façon dont ils ont envie qu’on communique avec eux. Ils font partie d’une audience pour qui une marque peut être pertinente et offrir une utilité. » Senior vp et responsable de l’innovation digitale chez MediaVest, Jon Anselmo pense lui que « le comportement des gens et y compris le blocage de pubs, fournit des indices sur qui ils sont  et ce qu’ils veulent. »

Dans une étude séparée de leur rapport alarmant pour les marques, PageFair et Adobe révèlent que si la moitié des utilisateurs d’AdBlock ne veulent pas croiser la moindre pub sur le web, 67% sont prêts à s’engager avec du texte et des images publicitaires. Interpeller sans être intrusif, voilà le défi pour ne pas prendre ce consommateur irritable pour un benêt. Comme pour toute l’industrie de la pub, un brand content native constitue ici la clef. Car même si un média peut payer pour ne pas avoir les pubs bloquées, la marque prend le risque en forçant le passage de complètement se mettre à dos le bloqueur

Le « breakvertising », une réponse inédite anti-AdBlock

Co-fondateur du média pour millennials Mic, Chris Altchek avoue qu’il chercher désormais à convaincre les agences d’opter pour un format de brand content, tout en développant des produits publicitaires qui tirent avantage des plateformes distribuées, moins touchées par le blocage. « L’affichage traditionnel ne résonne plus chez les internautes, il faut absolument améliorer la qualité de sa pub », déclare-t-il dans Digiday.

Toujours selon PageFair et Adobe, AdBlock frôle les 200 millions d’utilisateurs mensuels, dont 45 uniquement aux Etats-Unis. Pour les médias classiques, le défi à relever est immense, il requiert l’assimilation d’une nouvelle culture dans un écosystème en permanente mutation. Innover pour trouver des nouvelles méthodes d’engagement avec un consommateur exigeant et lassé, Fox.com s’y est récemment collé en proposant une nouvelle expérience publicitaire aux fidèles de l’émission Master Chef Junior. Sur le vieux continent, l’agence belge These Days Y&R invente, quant à elle, un autre concept novateur : le « breakvertising » ou la « pub du bouton Pause ». Est-ce la solution idoine ? Elle n’est qu’une réponse publicitaire parmi d’autres. La plupart restent encore à explorer.

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