2 décembre 2015

Temps de lecture : 5 min

Les start-up, l’avenir de l’expérience client ?

Le marketing ne peut plus se passer de l’expérience client. Représente-t-elle le futur des marques ? Brian Solis le pense et en parle dans son nouveau livre. Entretien avec un analyste chantre de la réinvention.

Le marketing ne peut plus se passer de l’expérience client. Représente-t-elle le futur des marques ? Brian Solis le pense et en parle dans son nouveau livre. Entretien avec un analyste chantre de la réinvention.

En septembre dernier, INfluencia se posait la question : le marketing peut-il se passer de l’expérience client ? Pour Emmanuel Vivier, co-fondateur du Hub Forum : « la Transformation Digitale est en marche, les consommateurs sont de plus en plus connectés et les entreprises doivent réagir et s’adapter à ces changements de comportement ». Les Français passent en moyenne 4,1 heures par jour sur Internet et en moyenne une heure par jour sur leur mobile.

La multiplication des usages liés à la mobilité et à l’ultra-connectivité des individus a modifié en profondeur le parcours d’achat du consommateur. Le grand défi des entreprises dans la Transformation Digitale est d’identifier tous les points de contact potentiels avec le consommateur et lui proposer une offre cohérente et personnalisée tout au long du parcours d’achat. Repenser l’expérience client de manière omnicanale devrait être la priorité des annonceurs pour réinventer leur business de demain. Dans son nouveau livre, « X : L’expérience ou quand le business rencontre l’expérience », Brian Solis,  spécialiste du numérique, anthropologiste et qui se décrit aussi comme un futuriste, se penche sur cette réinvention.

Pour lui, l’expérience en elle-même est la marque. Celle qui se partage est le nouveau marketing. Sa double assertion est-elle présomptueuse ? Dans son bouquin, l’analyste de l’Altimeter Group et maître des réseaux sociaux, décrypte le monopole programmé de l’expérience dans le futur des marques. INfluencia a tenté une expérience : parler de l’expérience avec un prophète de l’expérience. Entretien.

INfluencia : quand nous lisons le pitch de votre livre sur le futur des marques lié aux experiences qui ont du sens et qui se partagent, nous sommes tentés de dire “rien de neuf sous le soleil”. Ne pensez-vous pas que les marques se sont déjà ajustées ?

Brian Solis : vous avez raison. Chaque marque croit dans la valeur ajoutée que représente une expérience pleine de sens et sollicite le partage. Après tout aucun dirigeant d’entreprise n’a jamais avoué vouloir se moquer des consommateurs. Pourtant des études montrent que seulement 7% des sociétés sont pleinement consommateur-centrique. Si tous investissaient activement dans les expériences, c’est toute l’économie en général qui se porterait mieux. Le besoin d’innovation et de concurrence s’accélère, il suffit d’étudier les forces perturbatrices qui ont engendré la construction de nouvelles fortunes. Le fameux club des « Fortune 500 » n’a jamais connu autant de turnover. En partie parce que des industries entières sont challengés par des start-up qui ont trouvé de nouveaux moyens de délivrer des produits et des services packagés comme des expériences. Ces start-up répondent à la demande d’une nouvelle génération de consommateurs, en construisant de nouveaux modèles technologiques qui correspondent aux attentes de leur cible. Dans le même temps, elles installent de nouveaux standards d’attentes, conditionnant le consommateur à penser différemment. Les autres entreprises sont contraintes de réagir, même si elles ne le font pas avec la bonne philosophie consommateur-centrique.

IN : ne pensez-vous pas non plus que le service peut être une expérience ?

BS : oui, il le peut. L’expérience client (CX) est érigée en nouvelle frontière de la concurrence. Cela signifie que soit vous êtes compétitif dans l’expérience consommateur, soit vous êtes seulement compétitif sur un marché plus petit et moins significatif. De fait, 85% des consommateurs affirment être prêts à payer 25% de plus pour une meilleure expérience, ce constat devrait servir à lui seul de catalyseur pour le changement. Beaucoup de sociétés pensent encore que l’expérience client passe par améliorer la technologie et le processus d’engagement en se basant sur les modèles existants. C’est de l’itération plus que de l’innovation. La disruption passe par une philosophie centrée sur ce qui est cassé aujourd’hui et ce qui est possible demain. Inévitablement les marques ont besoin d’une nouvelle approche de l’expérience client pour être compétitif et répondre aux comportements évolutifs et aux nouvelles attentes des consommateurs.

Etude après étude on constate que les consommateurs peuvent changer de marques à cause d’une expérience négative, dans le même temps seulement 37% des dirigeants de ces marques sont motivés par de nouvelles initiatives d’expérience client. Ce n’est pas tout, 95% des consommateurs réagissent après une mauvaise expérience et 79% partagent leurs expériences négatives. Tout change donc, les consommateurs digitaux sont des narcissiques par accident. C’est une bonne chose et il n’y aura pas de retour en arrière, pas dans une société connectée où les attentes explosent. Ils sont bien plus informés et connectés que n’importe quel consommateur avant eux et chaque application et canal digital leur apprennent qu’ils sont le centre de leur propre univers. L’expérience client et les services qui définissent l’engagement dans les moments de vérité ont démontré au fil du temps qu’ils étaient sources de croissance et de fidélité pour les marques.

IN : quel est l’impact des technologies émergentes comme la réalité virtuelle et la réalité augmentée dans l’offre des expériences que peut proposer une marque ?

BS : la RV et la RA introduisent de nouveaux canaux d’expériences. Mais l’innovation permet uniquement de délivrer une expérience, aussi avancées et futuristes soient ces deux technologies. La conception d’une expérience nécessite une vision et une architecture qui puissent utiliser la technologie, les canaux et tous les points de contact comme catalyseurs. La RV et la RA peuvent servir un engagement qui a plus de sens, tout comme peuvent le faire les plateformes traditionnelles et émergentes. Mais rien ne se fait sans le point de départ qui consiste à définir ce qu’est une expérience et pourquoi elle a de l’importance. Une expérience est une émotion, une observation ou une réaction. Les expériences s’accumulent au fil du temps comme le résultat de chaque engagement au travers d’une vie. L’expérience consommateur n’est pas simplement une seule chose, c’est le tout. Avant que nous repensions des canaux et que nous investissions dans des nouvelles technologies et des nouveaux points de contact, les sociétés doivent penser de façon holistique, en alignant les équipes, les travaux et les buts autour d’une expérience unique et unie. Les marques qui investissent dans l’expérience consommateur apprennent à travailler différemment avec de nouveaux modèles, processus, équipes et systèmes de support.

IN : l’expérience est-elle au final un meilleur allié pour le marketing ou pour la pub ?

BS : l’expérience est la nouvelle marque, le nouveau marketing, le nouveau catalyseur du management d’expériences consommateur. Si vous réfléchissez, cela veut dire que le marketing joue un rôle plus important que jamais. Ce n’est plus seulement quelque chose dans lequel investir pour du branding ou le fameux Premier moment de vérité. De la conception du produit à la publicité et aux campagnes marketing en passant par les ventes et les services à travers la loyauté, l’expérience peut unir, optimiser et renforcer chaque étape du processus intégral vécu par le consommateur. L’expérience est la marque. Les expériences partagées sont le nouveau marketing.

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