La récupération du féminisme par les marques et leurs communicants est en plein essor. A bout de souffle, ne sachant plus comment parler aux femmes, les marques en ont fait des héroïnes incomprises à coups de spots publicitaires pour leur vendre toujours plus de choses inutiles. Des jeunes filles, aux jeunes mamans, en passant par les petites filles, les publicités regorgent de références au girl power.
Le web, devenu la cour des miracles pour féministes de comptoirs s’est fait le support privilégié des tentatives d’intellectualisation de l’objectification de la femme. A l’instar du faux discours féministe, les instagram et autre outils développés pour propulser les égotrips des narcissiques en puissance ont pris une part majeure dans la fabrication des contenus publicitaires et placements de produits. Tous complètement largués et incapables de se projeter sur les sujets qui intéressent la femme d’aujourd’hui et de demain les Vogue, Glamour, Vanity fair etc n’ont pas encore compris que leurs achats média sont voués à disparaître, étant donné qu’instagram a déjà commencé à les remplacer.
La publicité-réalité a envahi nos vies sans même qu’on s’en aperçoive. La vie privée des stars accessibles au peuple, étiquetée « codebarrisée », est devenue la stratégie de toutes les marques en quête de pouvoir, et les ingrédients pour séduire sont toujours les mêmes. Le pouvoir, l’argent et le sexe avec les dérives que cela implique. Les ambassadrices des marques de luxe sont devenues des « putes à clic » , on transforme les jolies jeunes filles de boites de nuit en it-girl, et les scandales des stars de la pop les propulsent toujours plus au top. Il était donc tout à fait compréhensible qu’une nouvelle tendance se fraye un chemin dans le marché mondial du textile et du parfum. Une tendance que l’on n’a pas vu venir, qui nous a pris en traitre, à peine voilée et hyper-discrète à l’image des valeurs qu’elle porte.
On a appelé ça la « modest fashion », traduire mode pudique, ou mode pour celle qui veulent être vêtues de manière confortable, éthique, et discrète. Ça ce sont les mots que nous servent les géants du prêt à porter lorsqu’ils lancent un collection de hijabs, ou des collections spécial ramadan dans les pays arabes. Les adeptes de ces marques sont évidemment pratiquantes, musulmanes, juives ou orthodoxes, et on trouvé enfin leur manière à elles d’être aussi superficielles que la femme occidentale. Plus on cache plus c’est sexy. On est d’accord là-dessus mais il y a une limite à tout. Que la femme s’habille comme elle veut, ou comme elle peut on fonction de sa croyance et de sa culture c’est tout naturel.
Mais quand la religion vient influencer des stratégies de marques mondialisées cela devient un tout autre débat. Lorsque l’on sait que les japonais dépensent moins que les musulmans en vêtements et chaussures et que leur achats dépasseront en fin d’année les 300 milliards de dollars… On est alors en droit de se demander si ce n’est pas la raison pour laquelle nous avons assisté à des débordements inadmissibles dans certaines enseignes qui ne veulent surtout pas se fermer la porte à ce marché très lucratif, celui qui surfe entre culture et religion, soumission et profit, pudeur et tolérance. Car le textile n’est pas le seul concerné, toutes les industries sont touchées, notamment celles qui rassemblent des hommes et des femmes dans des lieux clos. De la boutique de luxe, au restaurant, au magasin de décoration. Nous n’avons pas pu nous empêcher de rapprocher les divers évènements qui ont fait scandale comme chez Starbucks ou encore Ikea, en parfaite synchronisation avec les lancements de collections des différentes marques de vêtements, petit résumé en images des dernières inepties en date.
En 2011, on découvre une des premières « auto-censure » pour la marque H&M qui rhabille les femmes sur ses campagnes destinées au Moyen-Orient, comme sur cette photo de Gisèle Bundchen. Evoquant le fait que certains marchés sont « plus stricts sur la quantité de peau qu’on peut montrer ». Rien de dramatique jusque là, la marque s’adapte pour être sûre de passer les contrôles de l’agence gouvernementale…
En Arabie Saoudite, automne 2012, le cynisme est de rigueur pour un catalogue Ikea. Le visuel le plus choquant. Une photo du catalogue où un enfant se retrouve orphelin parce que sur la photo originale la maman était en pyjama à carreau. Pas en nuisette, en pyjama… et on ne discernait rien d’autre que sa tête et ses cheveux. Pas assez convenable la maman occidentale pour les saoudiens ?
En 2014, de nombreuses pochettes de disques ont également été censurées. De Mariah Carey, à Kylie Minogue en passant par Lady Gaga, Madonna ou Katy Perry.
Kylie Minogue – avant/après
H&M qui a souvent défendu et pris le parti de ses salariées voilées fait preuve d’une grande ouverture d’esprit dans cette campagne de Septembre 2015. Avec pour slogan « En mode, il n’y aucune règle mais recyclez vos vêtements ». Cette campagne regroupe une vingtaine de photos de célébrités et d’anonymes dans la vie quotidienne, comme Iggy Pop, un groupe japonais, un étudiant à la cool, et cette jeune femme. La photo fera évidemment polémique et H&M sera accusé d’atteinte à la liberté des femmes…
Encore en Arabie Saoudite, ce début d’année 2016 Starbucks bat tous les records en interdisant l’entrée des femmes dans leurs établissements. Elle devront envoyer un homme leur chercher leur café machiato. Malgré l’indignation générale, Starbucks persiste et signe en invoquant que les « Les Starbucks adhèrent aux coutumes locales » Angoissant, quand on sait que la mort par lapidation y est appliquée… Pas étonnant que plusieurs associations aient appelé au Boycott de la marque.
Et encore plus récemment, le géant japonais Uniqlo s’attaque au marché Américain en lançant lui aussi une collection de voiles. Collection qui sera identique à celle lancée il y a peu en Asie. Uniqlo a pour but de faire passer la pilule et créé une collaboration avec Hana Tajima, une blogueuse anglaise et musulmane convertie. Au programme donc, hijab, kebaya et jubbah, pensés dans des matières respirantes, la grande spécialité d’Uniqlo.
Et puis quoi de plus normal quand on sait que les musulmans dans le monde dépenseront en 2019 plus de 484 milliards de dollars par an en chaussures et vêtements ? L’année dernière déjà, Mango et Tommy Hilfiger avaient chacun dévoilé pour la première fois deux collections pour le ramadan, seulement vendues dans les pays arabes. Moins d’un an plus tard, ça s’accélère avec l’arrivée d’une collection d’abayas et d’hijabs par la marque Dolce & Gabbana. Est-ce une évolution ? Est-ce une régression ? Encore une fois, à vous de juger.