Impossible de passer à côté du phénomène ! Sorti le 5 juillet dernier en Australie, Nouvelle Zélande et aux Etat Unis, et le 24 juillet en France, le jeu vidéo mobile Pokémon Go est en train de battre tous les records. Plus de 75 millions de téléchargement de l’application sur les App Stores de Google et d’Apple, des recettes mobiles records (200 millions de dollars de recette en un mois selon Sensor Tower), 30 millions d’utilisateurs quotidiens aux Etats-Unis à la mi-août …
Le succès est sans précédent et intrigue (combien de commentaires sur les réseaux sociaux essayant de comprendre qui sont ces « tarés » qui courent dans les parcs…) autant qu’il inquiète (combien d’articles parus sur les dangers de l’application et des victimes de cette dernière…). Si la folie collective liée au lancement du jeu semble un peu se tasser ces dernières semaines, il y a fort à parier que la toile frétillera à nouveau à l’arrivée de nouvelles bestioles ou d’opérations commerciales alléchantes.
La réalité augmentée, un rêve en passe de devenir un usage
Mais derrière ce phénomène, c’est surtout un usage jusque-là confidentiel qui s’offre aux marques. Avant Pokémon Go, la réalité augmentée se limitait à quelques opérations de communication à usage unique ou presque. Ce fut le cas de la campagne lancée par Ikea il y a deux ans qui permettait de visualiser directement chez soi les meubles du catalogue, ou encore l’application Genius Make Up lancée par L’Oréal qui propose de tester du maquillage directement sur soi et surtout de l’acheter dans la foulée. Snapchat, pour sa part, utilise la RA de façon ludique en ajoutant des accessoires et autres masques à votre visage. Cela ne sert à rien mais ça marche du tonnerre !
Si la réalité augmentée n’est pas une nouveauté en soi et que beaucoup de marques y ont déjà goûté, Pokémon Go l’a démocratisée et développe considérablement sa fréquence d’utilisation. De « très occasionnelle » elle passe à « quotidienne » (l’application est utilisée en moyenne 43 minutes par jours selon Similar web).
En rentrant dans les usages, elle va inciter des marques à se (re)lancer dans l’aventure en intégrant ses communications, ses produits, ses égéries dans la vraie vie à travers l’écran de votre smartphone. Plusieurs possibilités s’offrent désormais à elles. Elles peuvent par exemple mettre en place un partenariat avec Pokémon Go, comme le fait déjà McDonald’s au Japon où 3 000 restaurants sont devenus des arènes Pokémon. Elles peuvent également profiter de l’euphorie générée par ce jeu pour créer du trafic en magasins ou en restaurants en fournissant des réductions et en activant des PokéStop, ou bien mettre en avant les Pokémons présents dans leurs locaux.
Une promotion réservée aux membres de la Team Instinct
On est à la limite de l’ambush marketing mais Niantic, le créateur de Pokémon Go, a probablement d’autres Pokémons à fouetter en ce moment que de se préoccuper de l’utilisation de l’image de ses charmantes bestioles ! L’autre solution est de s’affranchir de Pokémon Go et de capitaliser sur le renouveau de la réalité augmentée pour se mettre en avant. Chasses au trésor, intégration de contenu complémentaire (idéal pour visualiser les biens immobiliers à vendre en se promenant dans les rues d’une ville ou des idées de recette devant des produits en supermarché), visites guidées de musées ou de bâtiments… Les solutions offertes par cette technologie sont infinies … si les utilisateurs sont au rendez-vous ! Cela semblant être désormais le cas, gageons que les solutions de RA vont fleurir dans les prochains mois, avec plus ou moins de succès
La géolocalisation, l’autre pépite de Pokémon Go
Mais la nouveauté ne se limite pas à la réalité augmentée (particulièrement énergivore, elle a été désactivée par une grande majorité des joueurs…). L’autre levier de Pokémon Go, c’est la géolocalisation, le sésame de toute marque rêvant de faire du Drive to Store ! Bien utilisée, la « géoloc » permet de savoir qui passe à proximité de votre affiche, votre point de vente, votre rayon… et d’identifier ainsi un client potentiel à travers les datas qu’il accepte de partager avec vous. Jetée au pilori par le film Minority Report où chaque individu se faisait scanner les yeux et recevait des messages publicitaires en retour. Vous avez dit intrusif ?
Les publicités dans Minority Report
Nous n’en sommes fort heureusement pas à devoir nous faire remplacer les rétines comme Tom Cruise pour retrouver un certain anonymat ! Et il est même possible de trouver un avantage pour nous, pauvres consommateurs, derrière cette technologie. L’application de trafic et de navigation communautaire Waze l’a bien compris en « pushant » régulièrement, au bord de la route, des marques avec qui elle est partenaire. Facile, quand on est sûr d’avoir des personnes connectées pour suivre leur itinéraire. Mais pas forcément efficace en termes de transformation en visite ou en acte d’achat (on ne clique pas sur son téléphone pendant que l’on conduit !).
Transposez maintenant le dispositif dans le monde des piétons. Vous êtes en train de traverser Paris avant d’aller au travail, à la recherche d’un Pokémon que vous n’avez pas encore attrapé et là, d’un seul coup, vous voyez apparaitre dans votre écran le logo d’un Starbucks qui vous propose une offre exceptionnelle : un capuccino acheté, un œuf d’Onyx offert ! Adieu le petit café noir au coin de la rue, direction le géant américain. Et vous aurez, en plus de votre café, la certitude d’avoir prochainement le Pokémon de vos rêves dans votre pokedex, pour peu que vous marchiez quelques kilomètres avec l’appli ouverte (le temps de croiser 3 autres promos toutes aussi alléchantes !). En dehors de Pokémon Go, il y a fort à parier que d’autres applis de géolocalisation emboiteront le pas pour proposer toujours plus d’offres à même d’attirer le chaland. Maintenant que les possesseurs de smartphone ne semblent plus avoir peur de passer pour un extraterrestre en déambulant avec leur smartphone à la main, tout est possible !
Des dresseurs de Pokémons en pleine chasse dans le Parc de La Villette à Paris
Le phénomène Pokémon Go est donc bien parti pour révolutionner les usages de la communication et la manière dont les marques recruteront des clients potentiels. Avec la démocratisation de la réalité augmentée et de la géolocalisation, il sera plus facile d’interpeller un consommateur potentiel et de l’attirer dans ses filets. On verra peut-être Google revenir à la charge avec ses Google Glass, un peu trop vite enterrées et qui sont l’objet idéal pour regrouper ces deux technologies. Ou de voir les Hololens de Microsoft se développer à vitesse grand V. Il reste un peu de miniaturisation à accomplir mais l’usage devrait aider à cela. Les joueurs relèveront les yeux de leurs mobiles et se redresseront pour redécouvrir le monde qui les entoure. Ce monde, redevenu notre terrain de jeux.