Depuis 2015, la newsroom Adidas Paris endosse le costume de chef d’orchestre de la communication digitale et du storytelling de la marque aux trois bandes dans l’hexagone. INfluencia a laissé passer la semaine de la créativité d’Adidas dans la capitale, marquée par trois raouts évènementiels au début du mois, pour discuter des enjeux derrière cette initiative.
Dans l’univers du tout info et du tout TV de l’Oncle Sam, la newsroom fascine. Elle a même inspiré une excellente série TV éponyme politiquement incorrecte. Dans l’imagerie populaire, cette salle de rédaction nourrie à l’adrénaline de l’actualité symbolise le paroxysme de la réactivité. Transformation digitale oblige, le social media représente aujourd’hui le principal défi de l’engagement marketing et publicitaire, en quête de réactivité, de ciblage, de pertinence, d’identité et d’identification. Pas étonnant donc que dès 2014 KLM, avec DDB & Tribal Amsterdam, mettait en place sa propre newsroom de 30 personnes, « Happy to help », pendant cinq jours. Plus récemment, McCANN France lançait LIVE, la nouvelle méthodologie globale social media du groupe. Adidas aussi a compris les enjeux fondamentaux autour de l’interactivité et de la conversation à la sauce chaîne d’info.
En 2015, la marque aux trois bandes repensait l’organisation de son équipe marketing France pour s’adapter à son environnement. Le but ? Etre en conversation permanente avec ses consommateurs et développer son attractivité. C’est dans ce contexte que naissait la Newsroom Paris, dirigée par l’ancien Brand Communication Manager Sport, Benoît Menard. Il y a deux semaines, Adidas a comme promis » enflammé Paris » lors de la finale de la Tango League sous la Canopée des Halles en présence de Karim Benzema qui pouvait interagir avec les joueurs grâce aux écrans LED placés sur chaque côté du terrain, mais aussi pendant la présentation de la nouvelle Predator Precision avec Zinedine Zidane, au Football Store des Halles, premier magasin Adidas au monde dédié 100% au football, accompagnée d’une exposition en réalité virtuelle ou encore pendant le lancement de l’EQT Adidas Originals au Palais de Tokyo.
Quel rôle, pour quelle mission et quel impact pour la newsroom d’Adidas pendant cette semaine dédiée à la créativité ? INfluencia en a parlé avec Benoît Menard.
INfluencia : tout d’abord, en quoi est-ce créatif de faire venir deux égéries sur des évènements brandés ? On est là dans le coup de com classique, non ?
Benoît Menard : ce n’est pas les faire venir qui est créatif, mais la façon de le faire. Par exemple, pour la présence de Zizou à la présentation de la nouvelle Predator nous avons installé une exposition de ses meilleures moments dans laquelle vous pouviez vivre une expérience de réalité virtuelle. Dans la partie supérieure du magasin, nous avions plongé une pièce dans le noir complet pour permettre aux gens de se mesurer à la technique de Zidane via des faisceaux lasers. Pour Karim Benzema, nous avons placé un terrain de football dans la Canopée des Halles, du jamais vu. En plus, Benzema est venu avec le trophée de la Ligue des Champions. Ensuite, le vendredi, nous avons lancé le modèle EQT Adidas Originals au Palais de Tokyo avec notamment PNL et Spri Noir, en plus de prestations artistiques de danse. Tout cela est très créatif.
IN : est-ce que ce » show off » des grands raouts évènementiels qui nécessitent des gros budgets, est avant tout un passage obligé ?
B.M. : non, c’est simplement notre stratégie : être la marque la plus connectée et la plus digitale avec le consommateur. Etre la marque du » Create The New « . Etre au contact et échanger en permanence, surprendre et attirer sans cesse l’attention. Les plus beaux messages sont les plus créatifs. Notre plateforme de marque » Here To Create » est un levier de créativité B2C essentielle, parce qu’Adidas ne fait plus de lancement de chaussure traditionnel. En ce qui concerne les budgets, l’argent ne fait pas tout. Parfois avec des petits moyens on peut connaître un énorme succès. La clef c’est le quartet : préparation, planification, créativité et exécution.
IN : comment se relaye aujourd’hui ce type de créativité événementielle par la newsroom ?
B.M. : Newsroom Paris a été créée en 2015 et emploie aujourd’hui 12 personnes en lien avec le brand marketing. Elle est constituée comme une rédaction avec des comités éditoriaux réguliers. Nous sommes le chef d’orchestre de la communication digitale et du storytelling de la marque. La sphère digitale d’Adidas c’est primo, les médias sociaux; secundo, les influenceurs, avec qui nous faisons de la co-créativité; tertio, les PR. Pour nous, il y a trois types d’actualité : les lancements de produits, l’actualité culturelle et sportive et celle de nos » assets « . Notre rôle est de mettre en oeuvre toutes ces histoires en étant au plus près du consommateur. Mais aussi de monitorer et de suivre au quotidien ce qui marche ou pas, pour changer de braquets en cours de route en fonction de ce que nous dit la data. Nous créons du contenu et des histoires en renvoyant toujours vers la plateforme de marque » Here To Create « .
IN : si nous regardons un épisode de la série » Newsroom « , pouvons-nous reconnaître le fonctionnement de la vôtre ? Ou alors une newsroom de marque est d’abord et avant tout un département social » in house » maquillé derrière le fard d’un nom ronflant qui offre une crédibilité éditoriale ?
B.M. : nous sommes différents d’un média car nous ne couvrons pas toute l’actualité 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. J’ai d’ailleurs beaucoup d’admiration pour les rédactions qui sont capables de le faire. Elles sont une inspiration pour nous. En aucun cas, on veut se substituer à la newsroom de l’Equipe mais là où on se rapproche le plus d’une newsroom classique c’est sur des évènements. Comme par exemple l’Euro 2016 où pendant cinq semaines nous étions tous sur le pont pour rebondir chaque jour sur l’actualité. Pendant la Coupe du monde de handball, nous avons déporté la newsroom dans l’enceinte même des matches, à l’AccorHotels Arena dans une logique d’open source, en ouvrant la newsroom à des tiers, que ce soit les médias classiques ou spécialisés et des talents externes. C’est avec eux qu’on gagne en créativité et en innovation.
IN : en se projetant un peu dans le futur, est-ce que la data-dépendance n’est pas le premier danger qui guette les newsrooms comme la vôtre ?
B.M. : l’enjeu n’est pas la data pure mais la smart data. Trop de chiffres tuent la lecture, or la donnée doit au contraire nourrir la stratégie. Notre data analyst n’est pas un cracheur de données, il les interprète et les analyse pour co-créer une stratégie avec nous. Je ne veux donner de leçon à personne mais il faut, je pensen savoir prendre du recul avec les données, pour être capable de les digérer et d’accepter de faire des choix, par exemple sur le KPI’s. Trop de data tue la data.