Puisque les messageries instantanées en raffolent et que les consommateurs lui donnent blanc-seing, le marché des chatbots devrait atteindre près de 1 milliard d’euros d’ici à 2024. Le problème c’est que ce robot logiciel met méchamment le boxon dans le déjà très chaotique e-shopping de baskets. Nike répond à ce problème par la réalité augmentée.
» Les applis de messagerie seront les nouveaux navigateurs, les bots seront les nouveaux sites Web. C’est l’avènement d’un nouvel Internet « : la prophétie est signée Ted Livingtson, fondateur et CEO de la messagerie Kik, 275 millions d’utilisateurs tout de même. Un an après l’annonce par Facebook, en avril 2016, de leur intégration dans Messenger, plus de 100 000 » agents conversationnels » ont été lancés sur la messagerie instantanée. Nouveau levier d’engagement pour les marques, qui investissent logiquement dans les messageries, le bot commence à discuter avec les consommateurs, malgré une technologie encore balbutiante. Mais quand il permet aux nouveaux margoulins 3.0 de profiter des lois de farwest du shopping online de chaussures de sport, il devient l’ennemi d’une cible privilégiée par les marques : le vrai fidèle. Pour contrer le sneaker bot, devenu le cauchemar des fans de baskets, Nike investit dans la réalité augmentée pour remettre l’expérience et l’humain dans la quête de la chaussure tant attendue.
L’achat-vente de paires de Nike collectors est depuis plus d’un an un business ultra juteux pour les spéculateurs du web : ils ont vite compris que dans le chaos du » premier arrivé, premier servi « , le bot est le meilleur ami de l’e-shopper pour qui chaque seconde compte. Pour faire simple, ce programme souvent pirate, gratuit ou payant, permet en quelques secondes seulement d’ajouter un article à son panier et de le régler. Ou comment faire fonctionner un robot pour être le premier à mettre la main sur une nouvelle basket revendue ensuite à prix d’or sur eBay ou Amazon. La tricherie éthique plombe le moral des loyaux aficionados. Sans le vouloir initialement, la marque au switch a trouvé une parade pour rassurer les frustrés quasi résignés. Comment ? Grâce à ses expériences consommateur de réalité augmentée, pas conçues pour cela au départ.
Quand Adidas se lance dans la chaussure imprimée en 3D et dans un atelier éphémère fabriquant des vêtements personnalisés et en direct, Nike sort le portefeuille pour remettre du fairplay dans la chasse aux sneakers. Comme INfluencia l’a déjà expliqué, la réalité augmentée constitue un déclencheur d’achat à deux faces pour l’industrie du prêt-à-porter : elle permet d’essayer virtuellement des vêtements et de gamifier l’expérience d’appropriation préalable. Chez Nike, l’exemple le plus marquant de ce nouveau levier pré-transactionnel reste la plus récent, à savoir l’application SNKRS pour iOS. C’est sur elle uniquement que le fan de la Dunk High Pro Momofuku pouvait acheter son sésame. Pour valider l’achat, il devait d’abord afficher le modèle 3D de la chaussure puis pointer la caméra de son smartphone sur un des posters affichés quelque part dans la ville, ou bien sur le menu du très trendy restaurant new-yorkais Fuku, tenu par le chef David Chang, partenaire de l’opération spéciale.
Ne pas créer de frustrations chez les perdants
Marier l’interaction physique à l’achat en ligne permettrait donc d’amoindrir les effets néfastes des bots dans l’achat en ligne. Selon Heidi O’Neill, la présidente de la division Direct to Consumer de Nike, qui s’est exprimée sur le sujet il y a dix jours lors de la conférence Code Commerce, organisée conjointement par Recode et Shoptalk. Elle a par ailleurs assuré que grâce à un nouveau programme pilote, Nike avait réussi, pour l’instant, à limiter le nombre de reventes sur Amazon, plateforme tiers très prisée des revendeurs. Jouer pour acheter, c’est bien mais encore faut-il cajoler ceux rentrés bredouilles en ne leur donnant pas le sentiment d’être restés sur le banc. » Nous ne voulons pas décevoir et donner le sentiment à ceux qui aiment notre marque qu’ils ont perdu « , explique ainsi Heidi O’Neill dans Engadget. Faut-il supposer que le leader mondial de la chaussure de sport va pour l’instant limiter ses expériences de réalité augmentée ?
Dans le même temps, 80% des entreprises envisagent de confier à un chatbot leurs interactions clients d’ici à 2020 quand il n’y a pas spécifiquement besoin d’un agent humain. Un gain de temps et d’efficacité sur les demandes réccurentes et basiques qui permettrait d’économiser 8 milliards de dollars pour les services clients d’ici à 2022. L’agence Conversationnel, qui dressait un état des lieux en juin 2017, prévoit une croissance de 37% en 4 ans pour atteindre un marché de près de 1 milliard d’ici à 2024.