3 avril 2018

Temps de lecture : 3 min

2018 : un lieu doit être  » instagrammable  » ou n’est pas

Instagram transforme les espaces de restauration, qui tentent d’être toujours plus photogéniques.

Instagram transforme les espaces de restauration, qui tentent d’être toujours plus photogéniques.

Le restaurant, comme l’hôtel, se retrouve confronté à 2 tendances qui découlent de nos usages des réseaux sociaux : le « food-porn » et le « design-porn ». Une bonne expérience n’existe que si elle est partageable. Pour les générations accros d’Instagram, une expérience n’existe pas sans ce partage sur le réseau. Les architectes d’intérieur doivent désormais créer la fresque, la déco, l’agencement qui finira sur Instagram. A cet égard, des lieux comme le Hoxton, les Mama Shelter ou la piscine du OFF on fait leurs preuves à Paris.

Quand on rentre dans la boulangerie New Yorkaise Supermoon, le premier réflexe est de sortir son téléphone pour prendre en photo chaque détail du lieu. Son créateur, Aron Tzimas, ne s’en cache d’ailleurs pas et confirme avoir eu Instagram en tête pendant toutes les étapes de la conception du lieu. Ouvert à l’automne 2017, cette boulangerie a attiré presque autant l’attention pour son design que pour ses pâtisseries, signées par un grand chef. En France, on pense évidemment à la boulangerie Liberté qui a révolutionné le genre et dont les espaces sont presque  autant « instragrammables » que ses produits.

Au Supermoon Bakehouse, derrière le comptoir, une pile de boîtes luminescentes scintille contre un mur, et sur le mur opposé les mots espiègles  » Bite Me NYC  » dans un éclairage au néon rose. Une vitre sépare la vitrine de la cuisine, pour que les clients puissent observer les pâtissiers en train de travailler. Même les citadins les plus chevronnés reconnaitront que cette conception de la boulangerie est loin d’être habituelle. La présentation du magasin ressemble à une galerie d’art où les pâtisseries sont le héros et à l’arrière, les clients peuvent découvrir les pâtissiers artistes en résidence.

Supermoon Bakehouse kitchen

Ces derniers temps, une foule de nouveaux lieux, indépendants et au potentiel « instagrammables » a vu le jour un partout dans le monde, de la célébration du rose poudré de l’Élan Café à Londres à celle de l’arc-en-ciel sous toutes ses formes au Flour Shop de New York ou encore le restaurant minimaliste et végétal de San Francisco, Media Noche. En France, Rivié, le restaurant de l’hôtel Hoxton, les grands verres, celui du Palais de Tokyo, ou le Radioeat à la Maison de la Radio l’ont bien compris : pour exister face à la multitude de propositions parisiennes, il est crucial d’envisager le décor comme un élément essentiel de l’expérience, voire même de sa survie. Instagram est en effet devenu un outil marketing central pour les restaurants. En novembre 2017, le réseau ne comptait pas moins de 800 million d’utilisateurs actifs, 80% de ses membres suivent une marque et 60% déclarent découvrir des produits et des services via l’application, selon une étude d’Instagram, qui commence à être en mesure de dicter ses propres règles.

De gauche à droite : Élan Café, Flour Shop, Media Noche

En février 2018, le restaurant HWKR a ouvert ses portes à Melbourne. De l’aveu de son créateur, Michael Tan, être compatible avec les critères esthétiques d’Instagram était l’un des éléments clés du processus de design. Depuis le néon à l’entrée jusqu’aux personnages animés, inspirés par les emojis, sur le mur du fond, le restaurant HWKR a été conçu comme un lieu que l’on a envie de partager sur les réseaux sociaux. L’architecture du lieu propose un espace ouvert, digital-friendly mais capable de réconcilier l’analogue et le numérique. A une époque où le selfie règne en maitre, nombreux sont les restaurants qui conçoivent des espaces facilitant l’engament social.

Photography by Jaime Diaz Berrio

Des murs roses, des murs floraux et des enseignes au néon, les concepteurs rivalisent d’ingéniosité pour que l’esthétique et l’expérience des intérieurs de restaurants soient le plus « instagrammable » possible. Cependant, tout n’est pas rose au pays des hipsters. A trop vouloir être pris en photo pour exister sur les réseaux sociaux, tous les restaurants commencent à se ressembler: tuiles blanches, terrazzo rose, enseignes au néon. Cette frénésie de décors « Instagrammables » et leur recette de décoration facile à suivre ferait presque oublier que l’authenticité et l’expérience sont des concepts pérennes qui font que les gens ont envie de revenir. Et si la prochaine étape pour les intérieurs Insta n’était pas tout simplement l’authenticité ?

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