« For A Better World, le temps de l’action ». Avec ce thème, la 6ème édition de La Journée de la Femme Digitale a réfléchi sur l’horizon des possibles pour construire, grâce au digital, un monde plus créatif et égalitaire. Le 17 avril, au Studio 104 de La Maison de la Radio, 50 intervenants ont partagé leur expérience pour donner envie aux femmes d’oser, entreprendre, innover et agir.
Intelligence artificielle, éducation, diversité, entrepreneuriat, intrapreneuriat, innovation, autant de thèmes abordés lors de cette 6ème édition de La Journée de la Femme Digitale pour une prise de pouvoir par les femmes sur le digital. Des « talks » de femmes et d’hommes inspirants : entrepreneurs, intrapreneurs, PDG, start-upper, experts, journalistes, ou encore politiques, mais aussi des partenaires comme FDJ, L’Oréal, Microsoft, Engie, Orange, Google, Paypal et Coca-Cola France qui ont pu y contribuer chacun à leur manière. Un concentré de rencontres, de partages de savoirs et d’expériences, valorisant avec bienveillance la synergie des talents et la prise d’initiatives.
INfluencia s’attardait, il y a peu, sur le sujet de la réappropriation des métiers de demain par le second sexe : « la représentation genrée des métiers empêche les femmes d’envisager certaines carrières numériques. Résultat : seulement 27% d’entre elles y évoluent, 6% dans le coding et 10% à la tête de start-up ». Pourtant, selon l’Union Européenne, le PIB européen augmenterait de 9 milliards d’euros par an si les femmes représentaient la moitié de ce secteur. La JFD, c’est donc une des démarches d’actions concrètes et de sensibilisation dont le monde a besoin pour évoluer vers une sphère digitale plus égalitaire.
La passion au coeur des conversations
Parmi cette multitude d’intervenants, nous avons rencontré 2 start-uppeuses aux projets et parcours distincts, qui nous ont raconté leur histoire. La première, Sharon Shofer est la fondatrice de StartUp For Kids, une jeune pousse ludo-pédagogique qui propose des événements pour préparer les jeunes de 6 à 20 ans au monde de demain à travers des ateliers, conférences, « Créathons » et le futur de l’éducation. Du ludique et du choix pour démystifier les métiers du digital et initier en toute mixité les enfants à de nouvelles passions. La seconde, Naomi Ceder, développeuse transgenre à l’origine de la start-up Trans*Code, organise des hackatons se concentrant sur le renforcement de la communauté, le partage des compétences et l’exploration de solutions techniques innovantes relatives aux problèmes des trans et genderqueer au Royaume-Uni. Questions-réponses à 2 voix pour en savoir plus.
INfluencia : dans quel contexte l’idée d’une start-up a-t-elle vu le jour ?
Sharon Shofer : un accident. J’ai toujours travaillé dans la tech et je suis maman de deux ados. J’ai envie de monter ma boîte et je cherchais des activités extra-scolaires scientifiques pour ma fille. Et je n’ai rien trouvé. C’est comme ça qu’est née l’idée. Dans ce cadre, j’ai voulu faire un petit événement à l’école 42 et ça s’est très vite accéleré. C’était sensé être éphémère mais ça a duré. 7 ou 800 enfants pour la première édition. De là, je me suis focalisée sur Start-up for Kids en 2015.
Naomi Ceder : l’idée m’est venue de Californie, à Oakland. Kortney Ryan Ziegler y a fondé Trans*H4CK, une boîte qui s’attaque aux problèmes sociaux de la communauté trans en développant de nouveaux produits technologiques open source. J’en ai parlé à mon amie, Jessica Rose, et nous avons décidé de transposer ce concept à Londres et dans dans d’autres villes de Grande Bretagne, puis via des événements à Zurich et Chicago… Historiquement, il y a toujours eu des trans dans le mileu de la tech mais comme pour les femmes, les trans sont souvent confrontés à des discriminations leur laissant peu de place pour s’affirmer. Leur proposer de prendre la parole dans une sphère bienveillante et sans compétition m’a alors paru évident.
IN: quelles sont les ambitions à court et long terme de votre jeune pousse ?
S.S. : j’aime beaucoup le format événementiel. L’idée est d’insuffler des graines, inspirer des gamins. J’ambitionne de garder cette méthode en développant peut-être de nouvelles formes de partenariats et aussi de l’étendre en région. Je souhaite aussi intégrer les parents à ce processus au maximum car il sont garants de l’éducation des adultes de demain. Montrer aux enfants qu’il y a plein de choses dans le digital, dans l’innovation, leur apprendre que la science-fiction, c’est déjà là, démystifier la tech, et leur faire prendre conscience que L’IA and co ne sont que des outils dont ils sont maîtres. Le tout saupoudré d’une forte volonté de mixité et diversité sociale.
N.C. : je ne dirais pas que j’ai d’ambition formelle, écrite et chiffrée pour le moment. La chose la plus satisfaisante que j’envisage sur le long terme serait de voir d’autre pays adapter ce format d’échange mettant la tech au service de cette communauté trans. En Amérique du Sud, par exemple.
IN : à travers votre programme, avez-vous pour ambition de sensibiliser surtout les filles à ces métiers du digital qu’elles fréquentent encore trop peu ou votre projet n’a-t-il pas de genre ?
S.S. : je milite à fond pour une mixité 50-50. Et c’est loin d’être évident. Lors de la deuxième édition de notre événement, on s’est rendus compte que les ateliers de coding, par exemple, étaient deux fois plus fréquentés par les garçons. Plus les thèmes sont techniques et plus il y a des hommes. On a donc changé les intitulés des ateliers pour attirer les filles, et ça a marché. Comme quoi il suffit de pas grand chose pour inverser la donne.
IN : comment se traduisent concrètement les techniques innovantes palliant aux problèmes de la communauté trans et genderqueer?
N.C. : pendant nos hackatons, chacun est invité à noter une idée sur un tableau, donner un brief d’une minute et ceux qui sont intéressés travaillent ensemble sur le projet. Les participants sont très enthousiastes à l’idée d’avoir une voix, d’être écoutés mais aussi de partager les même combats. La bienveillance surpasse donc toute forme de compétition.
IN : votre « statut » de femme entrepreneuse pour l’une, et de trans entrepreneuse pour l’autre, a-t-il été un obstacle ou en tout cas un critère de considération ? Comment l’avez-vous géré ?
S.S. : Ce n’est pas vraiment plus compliqué. Je dirais que même en étant avertie et consciente des discriminations, nous, femmes, sommes souvent plus réticentes à nous mettre en avant. J’y travaille personnellement mais je sais qu’il me manque ce petit truc qui me met sur le même pied d’égalité. Et c’est là que mon combat prend tout son sens : l’éducation joue un rôle majeur dans cette capacité des femmes à savoir se valoriser et se faire confiance.
N.C. : quand j’ai procédé à ma transition, il y a 6 ans, les choses étaient bien différentes de celles d’aujourd’hui. On ne connaissait pas encore Bruce Jenner, la pub ne parlait pas des transgenres et les gens était moins conscients de ce que cela représente, mais ce n’était pas non plus le premier cas. J’ai rencontré les mêmes challenges qu’une femme affronte d’une manière générale lorsqu’elle se lance dans l’entrepreunariat mais à un niveau bien plus élevé. On dit souvent aux femmes que peu importe leurs décisions, elle ne feront jamais rien d’aussi bien qu’un homme, imaginez alors ce qu’on dit au trans. Après leur transition, ils sont souvent virés de leur poste et mis en marge de la norme. C’est donc évidemment un combat.
IN : qu’attendiez-vous de la JFD ?
S.S. : j’aime parler de mon projet, alors… Sensibiliser et donner un sujet de réflexion orienté vers la jeunesse. Quel message donner aux enfants pour ne pas leur mettre de frein ? Bien évidemment le sujet des femmes me passionne aussi et la JFD ne peut que nous enrichir.
N.C. : mon seul but était de pouvoir partager mon expérience de femme trans dans la tech et de sensibiliser à cette communauté, et pourquoi pas l’enrichir de nouveaux talents !
Pour en savoir plus sur la Journée de la Femme Digitale, cliquez sur la photo ci-dessous !