Les annonceurs ne sont pas satisfaits de leurs agences. Leurs prestataires ne sont plus à la hauteur de leurs besoins.
C’est ce que vient de révéler une enquête realisée par le WFA (World Federation of Advertisers). Ses conclusions sont basées sur les réponses de 50 annonceurs internationaux, et de vingt-six agences uniformément répartis sur 50% du territoire mondial.
Des annonceurs mécontents…
En effet, 60 % des clients interrogés révèlent qu’ils souhaitent réduire le nombre de leurs prestataires, mais paradoxalement, 50% indiquent qu’ils recherchent aussi à accroître le nombre de partenaires “ par spécialités “. Enfin si les annonceurs se disent mécontents, ils ne se voient pas, à 82%, vivre sans le conseil des agences, garde-fous indispensables…
…Mais responsables aussi
Ces derniers admettent à 40% ne pas donner les informations nécessaires à leurs agences, manquer de personnel pour assurer la fluidité des process, et de clarté dans leurs briefs… Ce qui, ils le reconnaissent à 52%, aurait un impact négatif sur le travail de leurs agences. Il y a donc du chemin à parcourir, et de nouveaux fonctionnements à trouver, » d’autant que nous avons à faire à un changement radical chez les consommateurs, qui n’appréhendent plus le monde des marques comme par le passé « , explique Roel de Vries, Corporate VP, Global Head of Marketing, chez Nissan.
Engagement et transparence
» Les clients souhaitent que leurs prestataires soient des partenaires commerciaux impartiaux, avec une réelle connaissance de leurs marques. Un changement sensible est attendu de part et d’autre. Engagement, et transparence sont les maîtres mots de ce nouveau partenariat » commente Lucinda Peniston-Baines, co-fondateur et associé directeur de l’Observatoire International.
Robin Garabedian, est directeur marketing de A line, plateforme collaborative de conseil, création et dévelopement qui gère des opérations pour Lancel, Carrefour, Aubade, Engie, etc. Il analyse pour nous la situation agence-annonceurs et défend son modèle innovant basé sur le co-freelancing.
INfluencia : cette étude transcrit bien ce que l’on observe au quotidien dans ce métier devenu chaotique…
Robin Garabedian : difficile de ne pas reconnaître que le modèle actuel de la relation agences-annonceur est cassé. Une problématique dont les raisons sont autant structurelles que culturelles. Le modèle des agences -avec son système de rémunération aux fees- a été bâti sur la base d’une activité centrée sur la répétition de tâches récurrentes, dans un paysage media relativement simple. Or, l’économie et le panorama actuel demandent un basculement vers une activité de plus en plus centrée sur un modèle de projets, en étant capable d’aligner une multitude d’expertises afin de répondre au rythme et la diversité des besoins des annonceurs. Des annonceurs qui doivent jongler avec immédiateté, nouvelles technologies, data, approche locale, hyperpersonnalisation, etc.
IN : est-il encore temps de rebâtir sur de l’existant ?
R.G. : le couple agences-annonceur est mal en point. Il faut reconnaître que pendant des années les agences ont été le moteur de l’innovation au sein de ce couple, notamment en matière de nouvelles technos. Or les annonceurs, tous secteurs d’activité confondus, ont dû faire face ces dernières années à l’avènement de l’économie des startups qui est venu disrupter leur marché les poussant à chercher le moyen de se réinventer pour rester innovant et compétitifs.
IN : existe-t-il une solution d’avenir au modèle agences-annonceurs ?
R.G. : il faut dépasser le simple cadre de l’économie marketing/publicitaire/communication/digitale. Chercher à tout prix une solution à travers le prisme de cette équation historique est une non-solution. Il ne faut pas que les agences oublient la mutation profonde liée au monde du travail qui tend à dessiner ce que sera le futur des projets publicitaire/communication/digitale : la démocratisation massive du statut de freelance, d’indépendant. On estime en effet aujourd’hui que 20 à 30% de la population active est concernée par une activité d’indépendant (source rapport de l’EIFIP) -une tendance particulièrement marquée sur les métiers créatifs et techniques. Une grande partie du coeur de métiers des agences en somme.
IN : une agence est tout de même rassurante, structurante pour un annonceur…
R.G. : la valeur et la force des agences résident avant tout dans les talents qui les composent, la question pour une entreprise porteuse de projet, qu’il soit stratégique, créatif ou de production, n’est plus « quel roadster adopter avec des agences ? » mais plutôt « comment mettre en place la bonne équipe, les bons talents indépendants pour mon projet ? ». La relation agences-annonceurs laisse ainsi place à la relation annonceurs-talents indépendants. Reste alors à déterminer comment, en fonction de besoins spécifiques, je peux aligner la bonne équipe d’indépendants, présentant les expertises exactes dont j’ai besoin, complémentaires sans contraintes structurelles, tout en garantissant la cohérence de marque. C’est tout l’enjeu de cette nouvelle plateforme.