C’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures : un proverbe qui semble avoir été fait pour La Suite Jenny Sacerdote. Cette jeune pousse reprend une marque emblématique de la mode des années 20, mêlant technologie au savoir-faire français historique.
Encore une pépite qui nous séduit. Une start-up mode 100% made in France, vu et revu direz-vous ? Et bien pas tout à fait. Car cette jeune pousse nommée La Suite Jenny Sacerdote n’est pas née de la dernière pluie. Il s’agit en fait de la reprise d’une marque de haute couture des années 20, Jenny Sacerdote, fondée par une Française, Jeanne Adèle Bernard qui deviendra alors la 2ème femme en France à recevoir la Légion d’Honneur pour ses services rendus à la couture, rien que ça ! Un revival de marque chargé d’histoire, de révolution et d’ambition, dont les valeurs fondatrices se perpétuent : l’artisanat et la qualité à la française, la liberté de mouvement et la célébration des femmes, la tech en plus.
Loin de ne conquérir qu’un coeur, la jeune pousse a rapidement tapé dans l’oeil du concept store dédié aux marques françaises, Studio Français, qui l’accueillera à partir du 2 novembre 2018, pour un lancement mêlant expérience, histoire et modernité. Une première vitrine de communication pour la marque dont la suite s’écrira sur les réseaux sociaux pour toucher sa cible via un canal qu’elle affectionne : le digital ! À la tête de cette aventure, l’entrepreneuse Anne Vogt-Bordure, ambitieuse et passionnée, qui nous en dit plus sur son projet.
IN : d’où vous est venue l’idée de faire renaître cette marque emblématique, et comment avez-vous procédé ?
Anne Vogt-Bordure : et bien….disons que sa fondatrice et moi-même avons exactement 100 ans d’écart. J’ai retrouvé sa trace dans le sud-ouest, là où est né mon père, puis son histoire m’a bouleversée. Elle s’appelle Jeanne, Jeanne Adèle Bernard. Elle est née de père inconnu, sa mère est tailleuse et sa grand-mère couturière. Comme une revanche sur la vie, Jeanne veut devenir professeur de littérature française. Elle intègre Normal Sup, mais à l’âge de 39 ans décide, finalement, de se lancer, elle aussi, dans la mode. Sa nouvelle vie commence alors à Paris. Pendant un an, elle travaille en tant que vendeuse chez Béchoff-David, puis passe première d’atelier chez Jeanne Paquin. Elle y reste un an et ouvre sa première boutique. Son surnom, Jenny, lui est donné par les clientes américaines. Sacerdote est son nom d’épouse.
Voilà donc comment tout a commencé : recherches historiques, compréhension de la philosophie culturelle de marque, identification des actions qui mèneront Jeanne à devenir la 2ème femme en France à recevoir la Légion d’Honneur pour ses services rendus à la couture, et enfin exploration de pistes de rupture pour nourrir une vision contemporaine de ce qu’une marque doit apporter aujourd’hui aux femmes connectées, globe trotteuses et conscientes. Ainsi, par symétrie d’intentions, j’ai imaginé avec bienveillance une suite à cette histoire inouïe.
IN : reprendre un si beau navire chargé d’histoire, quelles contraintes cela-a-t-il apporté à la conception de vos collections et du projet au global ?
A. V-B. : cette femme pionnière porte en elle les valeurs des héroïnes d’aujourd’hui. Jeanne était trés instruite mais, en quelque sorte, n’avait pas d’expérience professionnelle dans la couture. Elle s’est néanmoins fixée un but, s’est armée d’audace et, a suivi ses intuitions. Elle est allée jusqu’au bout de ses rêves. C’est une « self made woman », une femme de caractère, volontaire et victorieuse. Notre monde d’aujourd’hui est en pleine mutation, tout comme l’était le début du XXème. Les avancées technologiques, scientifiques révolutionnent chaque jour notre quotidien, tout comme c’était le cas au début du siècle dernier, et chaque univers se croise.
L’espace, le temps, l’environnement, les émotions et le respect sont des données à intégrer, plus comme des éléments de réponses à une nouvelle proposition, que comme des contraintes. Jeanne aimait à dire que les vêtements n’étaient pas faits pour être admirés sous cloche, mais portés. Inspirées de son univers de marque, les créations d’aujourd’hui remettent le corps au centre de toutes les préoccupations, avec ce qu’il a d’imperfection, et ce qu’il a de plus beau. Toutes les pièces sont uniques, montées par des artisans, travaillant dans la plus pure tradition de la couture française. Les tissus sont sourcés en France, selon des critères bien précis.
IN : sur quelles valeurs vous êtes-vous appuyée pour designer vos nouvelles collections ?
A. V-B. : Jeanne ne savait pas coudre et s’appuyait pour son business model sur les talents de son époque. La première technicienne avec qui elle s’associa fut Marie Le Corre, une véritable virtuose. Quelques années plus tard, elle a recruté c’est le très jeune et très talentueux modéliste Ara Frenkian. C’est donc en suivant cet ADN que je me suis naturellement tournée vers les jeunes talents de la scène française. Tout comme Jeanne le faisait, j’ai choisi de donner la parole aux modélistes experts pour revamper des formes telles quelles, tellement intemporelles. Je suis très fière de travailler avec ces artistes aussi créatifs que précis dans l’exécution de leurs gestes.
Simplicité et qualité se déclinent dans des matériaux nobles, et la soie se porte à même la peau. C’est bien plus qu’un voyage suspendu dans le temps qui est suggéré. Cette première collection nous conduit à la recherche de la souplesse, de l’apesanteur et, de l’agilité à l’état pur.
IN : vous parlez d’un processus 100% digital, comment cela fonctionne-t-il et comment mariez vous cet aspect au côté artisanal de la marque d’origine ?
A. V-B. : il me semblait important de doter cette marque, pionnière à son époque, des attributs digitaux les plus avant-gardistes, afin de la propulser dans le futur. Comment Jeanne aurait-elle travaillé à notre époque ? Vers quelles technologies se serait-elle tournée ? Elle aurait certainement explorer et ouvert de nouvelles voies. C’est pourquoi, le digital est au coeur de notre système, en amont et en aval de la chaîne de fabrication. Il s’agit de proposer une expérience client unique, et de renverser les rôles dans le processus de création. C’est à dire que la cliente devient elle-même la créatrice de son propre vêtement.
IN : quelle cible souhaitez vous séduire en relançant Jenny Sacerdote 4.0. ?
A. V-B. : je crois qu’il n’y a pas de cliente type, mais des femmes qui aiment les belles choses, qui assument leurs convictions pour exprimer pleinement qui elles sont. Nous vivons une époque très « La la Land ». Nous devons croîre en qui nous sommes pour aller jusqu’au bout de nos rêves, comme Jeanne. Un esprit libre dans un corps libre.
Notre robe Camelle a été confectionnée avec 3 mètres de mousseline de soie et 5 mètres de broderie faite main. A la fois précieuse et confortable, elle convient parfaitement aux mouvements extrêmes. Version sophistiquée pour les grands soirs, ou nonchalante pour le skate parc. C’est ça la richesse de Jenny Sacerdoce : customiser les extrêmes.
IN : 100% made in France, 100% lifewear, une tendance actuelle qui continue son bout de chemin vers une économie durable et libératrice selon vous ?
A. V-B. : difficile de ne pas prendre parti et de ne pas s’engager, lorsque l’on a conscience des enjeux environnementaux et sociétaux. Le monde est vaste, le monde est beau, il regorge de richesses. Etre citoyen du monde aujourd’hui, c’est comprendre que l’on fait partie d’un tout, que chacun avec sa propre individualité endosse des responsabilités collectives, que chacun à son propre niveau doit agir. Par ailleurs, la France détient des savoir-faire merveilleux, des talents que le monde entier nous envie. L’artisanat est précieux. Défendons-le, partageons-le, transmettons-le !
Jenny Sacerdote avant :
La Suite Jenny Sacerdote :