12 février 2020

Temps de lecture : 3 min

La Perla c’est 1300 euros la nuit, mais éthique, alors…

Fondée en 2010 en Autriche, la Gemeinwohl-Ekonomie (GWÖ) souhaite aligner l’économie aux valeurs éthiques. Vaste concept… tout à fait respectable.

Fondée en 2010 en Autriche, la Gemeinwohl-Ekonomie (GWÖ) souhaite aligner l’économie aux valeurs éthiques. Vaste concept… tout à fait respectable.

Il n’y a pas que l’argent dans la vie. De prime abord pourtant, tout laisserait à penser le contraire. Pour s’offrir une nuit de rêve à l’hôtel La Perla à Corvara, la station de sports d’hiver d’Alta Badia dans le Sud Tyrol en Italie, la carte Gold pour ne pas dire Platinum est plutôt de mise. Avec un tarif en pleine saison de 1300 euros la nuit pour une chambre double en demi-pension, cet élégant chalet construit au pied des pistes n’est pas franchement accessible à tous les amateurs de poudreuse. Les propriétaires de cet établissement familial ont pourtant été parmi les premiers à suivre en 2011 les critères imposés par la Gemeinwohl-Ekonomie (GWÖ).

La France, grande absente

Lancée en 2010 par l’Autrichien Christian Felber, « l’économie du bien commun » est une association qui évalue ses membres grâce à une nouvelle matrice qu’elle a appelé le bilan citoyen. Plus une entreprise est responsable socialement et écologiquement et plus elle obtient des points. « Notre système économique actuel marche sur la tête, condamne Christian Felber. L’argent est devenu une fin en soi plutôt qu’un moyen pour ce qui compte vraiment : une bonne vie pour tous. » Aligner l’économie aux valeurs éthiques : voilà le maître-mot de cette organisation. Belles paroles ou réelle stratégie « disruptive » ? Là est la question… Une chose est certaine : plus de 2000 entreprises supportent la GWÖ et plus de 500 ont déjà établi leur bilan citoyen. Ses membres se trouvent aujourd’hui en Autriche, en Allemagne, en Suisse, en Italie, en Espagne, aux Pays-Bas, au Luxembourg, en Turquie, en Suède, en Slovénie, au Royaume-Uni, au Chili et aux Etats-Unis. La France est une des grandes absentes de cette initiative principalement germanophone. Ce modèle lancé dans les Alpes demande une réelle remise en cause de la part de ses « adeptes » qui doivent modifier certaines de leurs habitudes pour la « bonne cause ».

Protéger notre monde

« Le système économique actuel est obsolète, on ne peut pas croître à l’infini sans nuire aux autres, résume Michil Costa qui dirige l’hôtel La Perla fondé par son père. L’économie du bien commun est une alternative claire et concrète. Il est de notre devoir de protéger notre monde et ses ressources du mieux que nous le pouvons, et il est de notre devoir de veiller au bien-être de notre voisin ». Mais que signifient ces « belles paroles » dans la réalité ? « Nous ne préparons plus de strudel aux pommes en été par exemple car il faut beaucoup de CO² pour rendre les pommes disponibles toute l’année, explique Michil Costa. Le vendredi, il n’y a plus de viande, le « Stües », a été transformé en restaurant végétarien, il n’y a plus de poisson d’outre-mer et au Berghotel Ladinia, il n’y a plus de Coca-Cola. Nous achetons de façon saisonnière, locale et durable. Nous essayons d’éviter autant que possible les longues distances de transport et là où il n’y a pas d’autre moyen, comme pour le café, le cacao et les bananes, nous achetons du commerce équitable. Bien que ce ne soit pas le moyen le moins cher. Les meilleures pommes de terre doivent provenir de la vallée de Puster, les abricots de la vallée du Vinschgau, le vin du Tyrol du Sud. Tous les invités n’aiment pas cela. Certains habitués, d’ailleurs, ne viennent plus chez nous ».

 Des tiraillements en interne

Cette nouvelle politique n’a pas non plus été appréciée par tous les salariés du palace. Le chef du restaurant a démissionné après plus de 25 ans de service. Certains employés à l’accueil et les voituriers n’ont pas non plus été ravis que les pourboires soient désormais partagés entre tous les collaborateurs de l’établissement en fonction de plusieurs critères dont leur ancienneté et leur proximité directe avec la clientèle. D’autres, au contraire, saluent cette initiative. « J’ai rejoint cet hôtel au mois d’octobre car je souhaitais travailler pour une compagnie qui avait une autre approche du business qu’une société traditionnelle », souligne Stephanie Völser, la responsable des ventes et du marketing.

Nos employés sont ce que nous avons de plus précieux

« Nos employés sont ce que nous avons de plus précieux, résume Michil Costa. Leur bien-être va de pair avec celui de l’entreprise. Ils ont la possibilité de manger avec nous dans le bistrot, ils peuvent utiliser la piscine de notre spa « Eghes Sanes » et ils peuvent également réserver des soins à des prix spéciaux. Les recettes de cette opération sont versées à notre Fondation qui finance des projets humanitaires. En outre, un service gratuit de location de vélos est à la disposition de notre équipe et nous organisons des cours de formation internes, qui sont organisés par le personnel. Nous nous efforçons enfin de réduire les heures de travail. Lors d’une phase de test, nous avons réussi à réduire de 25 % le temps de travail des chefs en cuisine». Trop beau pour être vrai ? Testez ce modèle par vous-même…

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