À rebours d’une certaine uniformisation esthétique, les marques de streetwear privilégient le sentiment régional comme principal levier d’action marketing. Une manière pour elles de créer davantage de lien avec leur cible et d’assumer pleinement leur dimension urbaine. Après le made in france, le made in région.
Que l’on parle de retail, d’agro alimentaire ou d’automobile, le constat reste le même : de plus en plus de marques cherchent à appuyer leurs stratégies marketing sur des cultures et des identités régionales. Un enracinement dans une culture locale qui se révèle très souvent lucratif mais qui pose un certain nombre de questions. Comment développer un positionnement pertinent à partir des cultures régionales et comment intégrer adéquatement le régionalisme dans la stratégie marketing d’une marque supra-nationale ? Nous pouvons distinguer deux types de stratégies marketing dites régionalistes. La première approche, l’effet « made in », amène les responsables marketing à se focaliser sur l’origine du produit, son lieu de fabrication. Ils manipulent les imageries culturelles de la région pour mettre en évidence l’origine du produit et ainsi un supplément d’âme à leur offre : une spécificité culturelle régionale -savoir-faire, recette, etc.-. La seconde approche, celle qui nous intéresse aujourd’hui et que l’on pourrait appeler « culturaliste », s’appuie sur l’expérience et le vécu de l’identité régionale. Il s’agit alors de s’enraciner dans la culture pour permettre aux individus de vivre, d’exprimer, de faire partager et de légitimer la spécificité de leur « ethnicité régionale ». Une dimension géographique sur laquelle les marques de streetwear ont jeté depuis quelques années leur dévolu. Ma 6t fait vendre (NDLR, Ma cité).
Des produits de leur environnement
Pour promouvoir CHILE 20, la collection exclusive adidas originals x Foot Locker vendue exclusivement en europe, la marque aux 3 bandes a confié à l’agence 84.Paris la conception de sa dernière campagne intitulée « Cities Made to Create ». Elle se compose d’un volet print et digital et d’un film de 2 minutes, mettant en scène Oboy et Kojey Radical, deux artistes émergeants de la scène rap, dans leurs villes d’origine, Paris et Londres. Conçu comme un hommage à ces deux bassins de la culture urbaine, « Cities Made To Create » présente la collection CHILE 20 comme le symbole de cette nouvelle génération d’artistes, très attachés à leurs racines comme sources permanentes d’inspiration. Dans le spot, Oboy et Kojey Radical partagent leurs liens intimes avec leurs villes d’origine. Oboy, à Villeneuve-Saint-Georges en banlieue parisienne, explique comment cet environnement « gris », « moche » et pourtant si vivant, influence constamment sa musique, tandis que Kojey Radical emmène son audience dans Hoxton, son quartier, évoquant la mode, le street art et l’énergie du lieu, celui qui l’a construit et qui l’inspire encore. Il ouvre aussi les portes du Concorde Youth Center où il a forgé son talent musical et où il continue d’inspirer les jeunes du quartier.
« Cities Made To Create est une immersion authentique dans l’ambiance brute et urbaine de Paris et de Londres », expliquent Hervé et Olivier Bienaimé, les jumeaux Co-Présidents et Directeurs de la Création de 84.Paris. « Loin des clichés touristiques, cette campagne parle de racines, de street-culture et de l’énergie des villes comme sources d’inspiration. Oboy et Kojey Radical incarnent cette nouvelle génération de rappeurs qui, loin d’oublier d’où ils viennent, rendent hommage à l’environnement qui les a construit ». La campagne est déployée en DOOH sur Paris et Londres, sur les réseaux sociaux et sur Youtube depuis le 14 février dernier jusqu’à mi-mars 2020.
91, 92, 93, 94, 95, 75, 77, 78, c’est le darwah
À l’été 2019, Nike, alias le grand némésis, criait déjà son amour aux départements franciliens… et aux portefeuilles de ses habitants. Pour promouvoir un tournoi de football destiné à l’Île de France, la marque à la virgule dévoilait une collection composée de maillots personnalisés pour tous les départements de la région, permettant ainsi aux différentes équipes de défendre leur propres couleurs. Sept tuniques très stylisées pour raconter d’histoire de chaque district et des slogans, choisis par les départements eux-mêmes, qui apparaissaient dans le dos des maillots. La collection, mise en vente en édition limitée, avait connu une importante couverture médiatique, notamment de la part des médias dédiés à la « culture urbaine » au sens large -booska-p, mouv, hypebeast, ou même Konbini-, lui permettant de rencontrer rapidement son public. De quoi conduire la firme américaine à continuer de privilégier les spécificités esthétiques territoriales plutôt que de capitaliser sur des patterns stylistiques sans aucune personnalité. Un message également bien compris outre-rhin : la gue-guerre Nike/Adidas se jouera désormais en bas de chez vous.