Depuis quatre ans, l’agence Change s’est emparée du sujet de la bénévolence en lançant, avec BVA, le Benevolence Index. Aujourd’hui, son président publie «The power of benevolence »*, une véritable croisade pour un monde meilleur, où les marques résonneront de responsabilité et d’utilité dans la société.
IN : comment définiriez- vous la bénévolence? comme une nouvelle disruption?
Patrick Mercier : c’est à la fois un vieux mot français et la parfaite adaptation anglo-saxonne de la bienveillance. La bénévolence raconte la capacité des marques à être utiles et responsables dans le quotidien des gens. Pour moi, c’est une réponse concrète à la quête de sens, c’est en fait l’étape qui suit celle de la confiance. Comme la disruption, la bénévolence n’est pas un mouvement facile pour les marques. Elle est, dans un format différent, tout aussi intense et profonde. Si elle paraît plus progressive et plus douce, en réalité, décider de faire de sa marque une marque bénévolente relève d’une même volonté de rupture, de changement, de transformation et de radicalité.
Nous constatons tous que depuis trente ans le rôle des marques a changé, la société aussi. Les consommateurs acceptent volontiers tout type de disruption dans la mesure où elle leur est utile et où elle induit une forme de responsabilité vis-à-vis de notre société.
IN : la bénévolence n’est-elle pas un peu une utopie ?
P.M. : si vouloir être utile et responsable est une utopie, si utiliser la créativité, l’innovation pour faire le bien et rendre le monde meilleur est une utopie, si Richard Branson, Bris Rocher, Frédéric Mazzella, Pascal Demurger dirigent des entreprises utopistes, si croire que nous avons besoin d’une nouvelle forme de croissance est une utopie, et si penser que les marques ont un rôle à jouer dans la transformation du monde est une utopie alors, oui, la bénévolence est une utopie. Et comme il nous est toujours permis de rêver un peu, je souhaite qu’elle puisse nous servir de guide et que les valeurs humaines qui lui sont liées inspirent les stratégies des marques et des organisations.
IN : la bénévolence est donc le vrai futur des marques…
P.M. : Michel Serres, philosophe et observateur attentif du monde, déclarait déjà il y a huit ans : « Ce n’est pas une crise, c’est un changement de monde ». Je pense aussi que la bénévolence pointe du doigt une phase dans laquelle la relation des marques avec leurs clients doit être bouleversée radicalement et positivement. Nous vivons une phase de changement profond dans laquelle la bénévolence peut s’avérer un guide précieux. C’est en tous les cas notre profonde conviction. Les marques peuvent changer le monde. En mieux. On sait aussi que leur valeur sociétale permettra de faire la différence. Pour cela, oui, la bénévolence est peut-être le futur des marques. Si elle peut permettre de passer à l’acte, alors elle jouera son rôle de transformation positive. Un Français sur deux pense aujourd’hui qu’il faut revoir complètement notre modèle économique.
Dans le même temps, selon l’étude menée par Greenflex, 88 % déplorent que les marques les poussent encore à la surconsommation. L’avertissement est clair. Nous ressentons tous que nous sommes à un point de bascule économique global dans lequel chaque marque va devoir revoir son propre écosystème. Il faudra donc probablement identifier de nouveaux critères pour définir la croissance des marques. La croissance quantitative seule a atteint ses limites, notamment dans les pays développés, le plus pour le plus ne pourra tenir très longtemps.
IN : comment les marques peuvent-elles changer le monde ?
P.M. : je ne suis pas inquiet pour elles. Elles sauront agir et changer le monde, en mieux. Elles sauront dans certains cas éduquer et encourager les gens à changer, ou calmer leurs désirs de consommation inutiles. Elles ont démontré pendant la crise leur dévouement, leur générosité, et leur volonté de faire du bien et d’être utiles. Je suis convaincu que beaucoup d’entre elles continueront à le faire sincèrement et concrète- ment. Prendre le chemin de la bénévolence est de toute évidence une solution pour contribuer à ce changement nécessaire. Les nouvelles marques ont plus de liberté pour le faire et la plupart sont nées dans un contexte très différent de celui des grandes marques. Pourtant, nous attendons beaucoup de ces dernières, car ce sont elles qui dominent l’économie.
Si les dix plus grandes modifient leur trajectoire, alors ce sera un signal planétaire, y compris pour les institutions. Je ressens partout cette même volonté de transformation de l’existant. Peu importe si cela prend du temps, le plus important est de commencer. Nous avons découvert ou redécouvert en préparant ce livre des di- zaines d’exemples de marques qui ont compris qu’elles devaient évoluer et qui agissent déjà concrètement pour faire bouger les choses. Et chez Change, nous pensons que notre métier est de les aider à devenir plus utiles et responsables à travers la force de la créativité et de l’innovation. C’est le cœur et l’ambition de la bénévolence.
*Editions LPM – welovebooks – juin 2020
Ce Pub’Art est tiré de la Revue INfluencia n°33 : « Le Good : Dessine-moi un monde nouveau ». Cliquez ici pour découvrir sa version digitale. Et par là pour vous abonner.