La démocratie est-elle le meilleur modèle politique pour résoudre la crise actuelle ? Non, répond un Français sur deux, une proportion bien supérieure à celles observées ailleurs dans le monde, selon la dernière étude Prosumer de BETC1. La pandémie semble révéler chez nous un désir d’autorité latent, déjà palpable dans le baromètre Fractures françaises d’Ipsos2 : plus de quarante ans après la dernière exécution capitale dans notre pays, 55% des Français se disent favorables au rétablissement de la peine de mort, suite à une hausse record qui concerne toutes les classes sociales, et particulièrement les cadres. Dans une Ve République qui concentre une grande partie des prérogatives dans les mains du chef de l’État, les Français voudraient donc donner plus de pouvoir à un pouvoir déjà fort. Quitte à renoncer à une chose fondamentale, dont nous sommes censés être si épris : les Français ne sont qu’un sur dix à faire de la liberté la valeur la plus importante pour demain, privilégiant massivement l’égalité et l’unité1. Nos libertés, même les plus quotidiennes, peuvent bien reculer, tant que nous subissons tous le même traitement.
La crise n’est donc pas seulement sanitaire, économique et sociale. Elle est aussi politique. Depuis la peste d’Athènes dans la Grèce antique jusqu’à la Covid-19, l’État a toujours vu sa souveraineté testée et mise à mal par les épidémies, nous rappelait récemment l’historien de la santé Patrick Zylberman3. Et moins les données scientifiques sont certaines et prévisibles, plus les mesures administratives sur lesquelles elles se basent peuvent paraître brutales. Ce moment de vérité pour les institutions intervient aujourd’hui alors que la démocratie libérale classique est déjà assiégée. Menacée depuis une vingtaine d’années par la montée progressive de l’abstention (dépassant pour la première fois les 50% aux élections législatives de 2017 et aux municipales de 2020 en France), elle est prise entre les feux de systèmes autoritaires et de régimes nationalo-populistes, et fragilisée par la fin d’un tabou, celui d’une politique qui gagnerait en efficacité en empiétant sur nos libertés fondamentales. […]
Ceci est un extrait de l’article paru dans le dernier numéro de la revue INfluencia, numéro 35, « Inspirations 2021 ». Pour accéder à l’intégralité de ce contenu , cliquez ici pour vous abonner ou acheter la revue (en version print et/ou digitale)